Immobilier fractionné : Bricks.co lève 13 millions d’euros (et ajuste réglementairement son modèle)

La fintech montpelliéraine Bricks.co, qui a développé un modèle d’investissement par contrat de royalties dans l’immobilier fractionné, boucle une 2e levée de fonds de 13 millions d’euros. Face à l’engouement pour ses performances, la startup a dû ajuster son modèle à la demande de l’Autorité des marchés financiers qui avait retoqué sa précédente levée de fonds en avril. Bricks.co vise maintenant le nouveau statut européen de prestataire de services de financement participatif. Et va accélérer sur son développement à l’international.
Cécile Chaigneau
Dix-huit mois après son lancement, la startup montpelliéraine Bricks.co, créée par Cédric O'Neill (photo), annonce compter plus de 230.000 membres ayant investi dans 42 biens immobiliers pour un montant avoisinant les 50 millions d'euros.
Dix-huit mois après son lancement, la startup montpelliéraine Bricks.co, créée par Cédric O'Neill (photo), annonce compter plus de 230.000 membres ayant investi dans 42 biens immobiliers pour un montant avoisinant les 50 millions d'euros. (Crédits : DR)

Plateforme d'investissement immobilier créée à Montpellier en avril 2021 par Cédric O'Neill, Bricks.co permet à des investisseurs d'investir dans des immeubles de rapport et des biens immobiliers à partir de 10 euros. C'est ce qu'on appelle de l'immobilier fractionné : les investisseurs acquièrent des parts dans des immeubles gérés par une filiale dédiée de Bricks.co, et perçoivent chaque mois des revenus locatifs en royalties au prorata du montant investi.

« Les immeubles sont la propriété de Bricks.co et la valeur des biens immobiliers est découpée en fractions qui sont vendues avec un contrat de royalties, précise Cédric O'Neill. Donc les investisseurs ne sont pas copropriétaires mais disposent d'un droit à percevoir des loyers. »

Dix-huit mois après son lancement, la startup annonce compter plus de 230.000 membres ayant investi dans 42 biens immobiliers pour un montant avoisinant les 50 millions d'euros.

Alors qu'elle avait annoncé lever 20 millions d'euros en avril 2022, la startup réitère et annonce, le 26 septembre, une levée de 13 millions d'euros, « à 85% auprès de notre communauté d'investisseurs », indique le fondateur de l'entreprise.

Soit 8.700 particuliers pour un montant de 8 millions d'euros, et une quarantaine de business-angels comme Tony Parker (ancien joueur de basket-ball international) ou Thibaud Elzière (cofondateur du startup studio eFounders) pour les 5 millions d'euros restant.

Accréditation de l'Autorité des marchés financiers

Mais entre les deux levées de fonds, un ajustement a été réalisé, à la demande de l'Autorité des marchés financiers (AMF).

« En avril dernier, la levée de fonds, lancée sur notre site internet, avait initialement un objectif de 5 millions d'euros mais la campagne participative les a très vite atteint et on est monté à 20 millions d'euros, rappelle Cédric O'Neill. Nous avions alors décidé d'utiliser le modèle de contrat de royalties pour les 15 millions collectés auprès de particuliers (les 5 autres auprès d'investisseurs expérimentés, NDLR). Or l'AMF nous a rappelé que les royalties ne sont pas considérées comme des titres financiers et que ce modèle n'était donc pas pertinent. Car si Bricks faisait faillite, les investisseurs pourraient alors se retourner contre l'AMF pour défaut de prévention. Nous avons donc déposé un document d'information synthétique auprès de l'AMF qui a validé les nouvelles conditions de l'opération : une levée de fonds en actions, avec un maximum de 8 millions d'euros collectés auprès de particuliers. Nous avons donc dû rembourser 7 millions d'euros sur les 20 collectés... »

Alors que le principe de l'immobilier fractionné séduit de plus en plus d'entrepreneurs, les contrats de royalties s'exercent pour l'heure en dehors de tout cadre légal, c'est à dire qu'ils ne sont contrôlés ni par l'AMF ni par l'ORIAS (organisme pour le registre unique des intermédiaires en assurance, banque et finance).

« Cette situation met les autorités en difficulté car il y a de plus en plus d'acteurs qui s'emparent du sujet avec plus ou moins de responsabilités, détaille Cédric O'Neill. Cela nous met en difficulté pour deux raisons : le contrat de royalties est une exception française donc difficile à transposer dans la législation européenne, et toute la profession autour de l'AMF décrie ce contrat. Comme nous avons des velléités de développement à l'international, nous avons fait la demande auprès de l'AMF afin d'obtenir une accréditation pour le nouveau statut européen de PSFP (prestataire de services de financement participatif, NDLR) qui permet à une plateforme de crowdfunding d'exercer partout en Europe. Notre contrat de royalties deviendra un contrat d'obligations, sous contrôle de l'AMF donc. Nous devrions l'obtenir d'ici novembre. Pour les investisseurs immobiliers, ça ne changera rien. »

Des biens au Portugal, des investisseurs en Allemagne

Les 13 millions d'euros collectés aujourd'hui vont permettre à l'entreprise d'enclencher la deuxième phase de son plan de croissance, en renforçant ses équipes et en accélérant son développement à l'international.

« Nous avons pris de six mois de retard en raison de l'argent de la précédente levée de fonds qui était bloqué, indique Cédric O'Neill. Pour nous développer en Europe, nous irons dans certains pays où il est intéressant d'acheter de l'immobilier, comme le Portugal ou l'Espagne mais nous n'y développerons pas de site car nous allons plutôt cibler les investisseurs de l'Europe du Nord, comme l'Allemagne ou le Danemark, pour les inciter à acheter dans des pays où la rentabilité est meilleur que chez eux. C'est un développement que nous allons opérer depuis Montpellier, en accentuant notamment notre communication via les réseaux sociaux et les influenceurs, et en investissant sur le marketing. »

Alors que Bricks.co emploie aujourd'hui 45 personnes, la startup annonce vouloir en recruter une vingtaine d'autres dans les prochains mois, « en développement informatique et en développement commercial », précise Cédric O'Neill.

La startup quittera les locaux du Village by CA de Montpellier dans quatre jours, pour s'installer dans les anciens bureaux de Sopra Steria.

Quant à son ambition de financer quelque 300 millions d'euros de nouvelles propriétés d'ici fin 2022, Cédric O'Neill concède un ajustement : « Les financements bancaires n'ont pas suivi à hauteur de 50% sur les propriétés que nous acquérons car les problématiques réglementaires évoquées ne rassurent pas les banquiers. Ce qui va s'arranger avec l'accréditation PSFP et le contrat d'obligations... D'autant que dans le contexte actuel des taux d'usure qui empêchent les gens d'obtenir des prêts, l'immobilier fractionné monte en puissance ».

Cécile Chaigneau

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