A Montpellier, les deux plateformes d’hébergements touristiques Bedycasa et Sportihome se préparent pour l’été

Bedycasa propose des hébergements chez l’habitant « éthiques et durables » (frontalement concurrentiel avec Airbnb…) tandis que Sportihome référence des logements pour un tourisme sportif. Les deux sont basées à Montpellier. La première est en phase de re-lancement et lance un nouveau modèle, la seconde en rythme de croisière. La Tribune fait le point avec Magali Boisseau-Becerril et Sylvain Morel alors que la saison estivale démarre.
Cécile Chaigneau
Magali Boisseau-Becerril, fondatrice de Bedycasa, et Alexane Renaut qui va être Chief Marketing Officer.
Magali Boisseau-Becerril, fondatrice de Bedycasa, et Alexane Renaut qui va être Chief Marketing Officer. (Crédits : DR)

Aux portes de l'été, les plateformes d'hébergements touristiques affûtent leurs armes et redoublent de publicité en tous genres pour appâter le client. A Montpellier, deux entreprises se sont positionnées sur ce segment de marché ultra concurrentiel, chacune avec ses spécificités : Bedycasa, plateforme d'hébergement chez l'habitant qui se veut un « Airbnb éthique et durable », et Sportihome, plateforme de réservations de logements pour un tourisme sportif. Elles aussi se préparent pour la saison estivale afin de répondre à son potentiel d'opportunités.

En relançant Bedycasa, qui a connu une trajectoire mouvementée jusqu'à chuter (née à Montpellier en 2007, rachetée en 2017 et liquidée en 2019), sa fondatrice initiale Magali Boisseau-Becerril avait promis une autre philosophie pour sa plateforme qui se positionne frontalement à Airbnb : « La promesse d'Airbnb à ses débuts n'est plus tenue car ils se sont orientés vers de l'hébergement professionnel et de l'investissement immobilier. La communauté qui cherchait un hébergement chez l'habitant ne s'y retrouve plus. Bedycasa propose une alternative ».

En janvier 2022, la jeune femme, obstinée, annonçait relancer une nouvelle plateforme, sous le même nom qu'à l'origine.

Pointant chez Airbnb « des appartements complètement dédiés à la location touristique et donc vides de leurs habitants », elle dénonce « des bénéfices qui contribuent à enrichir encore plus les propriétaires d'immeubles entiers qui louent plusieurs appartements afin d'en tirer un large bénéfice et par la même, empêchent les habitants de se loger ». A l'inverse du géant américain qui a colonisé la terre entière, elle promet que Bedycasa s'inscrit dans une démarche éthique et responsable : « On accepte des particuliers mais pas les investisseurs immobiliers qui louent plusieurs appartements dans un même immeuble, les hôteliers ou les gens qui feraient de la spéculation de leur logement ».

Ethique, solidaire ou durable

La nouvelle société qui porte la plateforme Bedycasa a été créée en mai 2022 à Montpellier et l'activité a réellement démarré début février 2023 « avec petite levée de fonds de 112.000 euros auprès de la communauté de Bedycasa », indique aujourd'hui Magali Boisseau-Becerril. Une communauté qu'elle dit très fidèle et très présente.

« Aujourd'hui, nous comptons 3.000 hébergements et 7.600 membres voyageurs et hébergeurs, en France majoritairement, mais aussi en Espagne, en Italie, au Portugal et... à Cuba où Bedycasa est bien identifiée depuis sa création, indique-t-elle. Demander l'exclusivité aux hébergeurs ne serait pas réaliste, même si certains hébergeurs occasionnels ne sont que sur Bedycasa car ils ont une certaine philosophie. Mais les logements que nous référençons doivent avoir au moins une de ces trois valeurs : être éthique, c'est à dire pas plus de deux logements à la même adresse dans une ville de plus de 200.000 habitants ; être solidaire, c'est à dire pratiquer des prix doux par exemple pour des étudiants, des freelances, des séniors ou des réfugiés ; être durable, c'est à dire être fabriqués avec des matériaux écologiques comme les écolodges ou proposer aux voyageurs des activités écologiques, des chantiers écologiques, des ateliers culinaires bio, etc. Ce que nous souhaitons développer davantage. »

La jeune femme rappelle que si « Airbnb prends 15 à 17% de commission aux voyageurs, et 3% à l'hébergeur mais 15% s'ils utilisent l'outil de coordination entre différentes plateformes », Bedycasa se contente d'une commission de 7,5% partagée entre hébergeur et voyageur, et aucune commission prise sur les frais de ménage ou autres services, « et ils savent où va leur argent, à savoir que 50% sont reversés aux personnes de la communauté qui ont investi dans Bedycasa ».

« Notre objectif, c'est d'atteindre les 10.000 hébergements avant fin 2023 pour être prêts pour les JO Paris 2024, ambitionne-t-elle. Actuellement, 22.000 sont en cours d'évaluation par les appréciateurs (en ligne, NDLR) et les prescripteurs qui eux, vont sur place. »

Nouveau modèle : le Club à impact

Le 13 juin prochain, la dirigeante lancera un nouveau modèle : le Club à impact. Elle sera secondée par Alexane Renaut qui sera Chief Marketing Officer de Bedycasa.

« C'est un nouveau modèle qui intègre toutes les parties prenantes : clients, salariés, entreprises, associations, explique Magali Boisseau-Becerril. Aujourd'hui, les modèles de sociétés sont obsolètes face aux enjeux sociaux été environnementaux car calés uniquement sur des facteurs financiers. Or nous voulons intégrer la nature et l'humain. Prendre un abonnement annuel (50, 100 ou 150 euros pour les particuliers, 5.000, 10.000 ou 20.000 euros pour les entreprises, NDLR) au Club à impact donne accès à des avantages : l'abonné reçoit 30 à 50% de crédits voyage, il a droit une réduction sur ses réservations de -5 à -10%, et 15% de son abonnement sont reversés aux associations sociales et environnementales qui font partie du club et qu'il aura choisies, en échange de quoi il obtient un reçu fiscal pour défiscaliser. Il entre dans un réseau d'écocitoyens. Et 15% de son abonnement vont dans une tirelire communautaire : tous les 1.000 euros atteints, les abonnés peuvent candidater à une "bourse éco-habitat" de 1.000 euros pour équiper leur logement durablement. Pour ça, nous travaillerons en partenariat avec un fournisseur d'énergie (non communiqué, NLDLR) et l'association OIZZO qui distribuera des refuges de biodiversité... C'est une mission sociétale pour faire de l'habitat un levier. »

Alors que la crise du logement poussent de plus en plus de maires à réclamer un encadrement plus sévère des locations touristiques de courte durée qui privent les villes d'un grand nombre de logements disponibles pour les habitants, Magali Boisseau-Becerril assure vouloir, à moyen terme, inciter les voyageurs à cibler d'autres hébergements que ceux des grands centres-villes : « Pour des besoins touristiques, on n'a pas besoin d'aller tous tout le temps au même endroit ! Je comprends la colère des maires, celle des voisins aussi. Nous avons tous besoin d'évasion et on ne va pas l'interdire, mais nous voulons diriger le flux de touristes vers les périphéries des grandes villes et nous le mettrons en place avec notre prochaine levée de fonds, de 200.000 euros, qui va démarrer la semaine prochaine et devrait être bouclée cet été ».

10.000 hébergements pour sportifs

Créée en janvier 2017 à Montpellier, Sportihome a développé une plate-forme d'hébergement pour sportifs : « Nous combinons les locations de vacances - gîtes, chalets, mobil-homes - avec une couche de sport : chaque hébergeur indique les équipements de sport disponibles sur place, les spots de pratique, les sports qu'il pratique et son niveau d'engagement - simple conseil, pratique ou activités partagées - », rappelle Sylvain Morel cofondateur et COO de Sportihome.

Tous les sports sont concernés, avec une récurrence plus forte pour la randonnée, le vélo de route, le VTT, le ski, le golf ou le kite-surf.

« Aujourd'hui, Sportihome propose 10.000 logements dans une quarantaine de destinations-pays, dont la majorité en France, précise-t-il. On s'est rendu compte que la course aux nouveaux logements n'était pas le plus rentable et qu'il valait mieux d'abord qualifier l'existant. Nous avons donc envoyé des photographes professionnels auprès des hébergeurs et on s'est aperçu que les annonces fonctionnaient mieux comme ça. Nous ne sommes donc pas dans une stratégie d'acquisitions massives comme initialement prévu, et nous misons sur une croissance naturelle régulière. »

Là non plus, pas d'exclusivité Sportihome mais des logements qui sont aussi inscrits sur d'autres plateformes : « On vient de faire une grosse mise à jour pour les propriétaires : ils peuvent continuer à annoncer sur Sportihome mais aussi activer des canaux Airbnb ou Booking au même endroit pour synchroniser leurs calendriers ». Le modèle est aussi celui de la commission (15 à 20%), Sylvain Morel indiquant que « sur les deux dernières années, un propriétaire gagne en moyenne 1.554 euros par an chez nous ».

Le dirigeant ne communique pas sur son chiffre d'affaires et préfère indiquer un panier moyen : « Pour les touristes français, il est de 850 euros pour 5 nuits et 5 personnes, et pour les touristes étrangers, qui pèsent pour 30% de notre chiffre d'affaires, il est de 1.700 euros pour 10 jours et 5 personnes... Ce qui marche le mieux, ce sont les hébergements en France, sur l'Ile Maurice pour le surf, en Espagne, au Portugal, et dans les Dom-Tom ».

Sportihome emploie 12 salariés et Sylvain Morel prévoit de multiplier le chiffre d'affaires par trois sur la saison 2023, « ce qui sera en-dessous de nos ambitions », analyse-t-il.

« Depuis début janvier, on voit moins de grosses réservation, et on observe une légère baisse, de 10% environ, du panier moyen, souligne le dirigeant. C'est lié au contexte d'inflation : il y a plus de gens qui se lancent dans la location pour trouver de nouveaux revenus, donc les propriétaires maintiennent voire baissent leur prix face à cette nouvelle concurrence. Et il y a un pays qu'on ne voit plus, c'est l'Angleterre, depuis le Brexit... »

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Cécile Chaigneau

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