Christiane Taubira ferraille avec les avocats en congrès à Montpellier

La Convention nationale des avocats avait lieu du 28 au 31 octobre à l’Arena Park&Suites de Montpellier. Un rendez-vous où se sont pressés quelque 5 000 avocats, honoré de la présence de Christiane Taubira, la Garde des Sceaux et ministre de la Justice. L’occasion d’échanges cordiaux mais vifs.
Cécile Chaigneau
La Garde des Sceaux Christiane Taubira, ce jeudi 30 octobre à Montpellier pour la Convention nationale des avocats, face à Jean-Marie Burguburu, le président du Conseil national des barreaux.

Ils étaient 5 000, sans leur robe noire, rassemblés pour la Convention nationale des avocats à l'Arena Park&Suites de Montpellier, du 28 au 31 octobre. Point d'orgue de cette manifestation : la présence de la ministre de la Justice et Garde des Sceaux, Christiane Taubira, ce jeudi 30 octobre.

Ce rendez-vous était, pour la profession, l'occasion de faire le point sur une actualité législative chargée. Et menaçante en certains points, selon les avocats.

Car plusieurs dossiers agacent, voire fâchent, la profession. À commencer par la réforme de l'aide juridictionnelle (AJ) que souhaite engager le gouvernement.

« Depuis près de quinze ans, des rapports indiquent que le système est à bout de souffle, rappelle Christiane Taubira. Elle augmente chaque année de 10 % (379 M€, NDLR) et je souhaiterais encore élargir son périmètre. Mais il faut en trouver la ressource... Je prends le risque d'essayer de réformer l'aide juridictionnelle, mais pas contre vous. Pas avec brutalité. »

En juillet dernier, des milliers d'avocats avaient fait grève pour demander un financement durable. Suite à ce mouvement, le Premier ministre avait demandé au député Jean-Yves Le Bouillonnec de lui faire des propositions. Un rapport remis le 27 octobre à la Chancellerie. C'est sur la base de ce rapport que Christiane Taubira devrait engager une concertation avec les avocats.

« Dans ce rapport, il y a un présupposé inexact : il qualifie l'aide juridictionnelle de politique publique de solidarité, s'enflamme Jean-Marie Burguburu, le président du Conseil national des barreaux (CNB). En réalité, l'État a pour obligation de permettre l'accès au droit à tous les citoyens, et non un accès dont les avocats seraient les débiteurs. Ils n'en sont que les exécutants ! »

La ministre rappelle que, selon des chiffres fournis par le CNB, seulement 7 % des avocats assurent 57 % de l'AJ.

« Nous avons évoqué le principe d'un prélèvement proposant que tous les cabinets qui ne font pas d'AJ soient sollicités à hauteur d'une demi-heure ou d'une heure d'honoraires par an, argumente la ministre. Vous vous y opposez... »

Un prélèvement que le président du CNB qualifie d'oxymore politique - « une contribution volontaire obligatoire » - lui valant une ovation de la salle.

« Même cachée sous le manteau de la solidarité, cette contribution est inacceptable ! », lance-t-il. Le CNB peut prendre sa part mais ne sera pas le percepteur pour prendre aux uns de quoi payer les autres ! »

Le projet Macron dans le collimateur

Autre pierre d'achoppement : le « projet Macron » comme le résume Jean-Marie Burguburu. Un projet qui comprend, entre autres, la suppression de la postulation territoriale, l'ouverture du capital des cabinets d'avocats, ou encore la création d'un statut d'avocat d'entreprise. Et qui déclenche « la colère, l'incompréhension, le désordre » dans la profession.

« Nous combattons ce projet de Bercy, qui peut être mortel pour notre profession ! », s'exclame Jean-Marie Burguburu, dénonçant une réforme purement économique.

« Je m'interroge sur cette suppression de la postulation territoriale, les rassure Christiane Taubira. Il faut préserver l'accès au droit sur tout le territoire. Je veux la plus grande prudence sur ce sujet. »

Sur la question de la protection du secret professionnel et de l'interdiction des écoutes de conversations des avocats avec leurs clients - « c'est la démocratie qui est en danger ! », dénonce Jean-Marie Burguburu -, la ministre annonce un projet de texte de loi très prochainement.

« Les malentendus se dissipent par la parole, et je sais qu'en m'adressant aux avocats, je suis au pays du verbe », conclut la ministre, ouvrant grand la porte à la concertation. Ajoutant au micro des journalistes : « Nous partagerons éventuellement la responsabilité d'échouer sur la réforme de l'aide juridictionnelle ».

« Nous allons discuter ! », répond Jean-Marie Burguburu...

Cécile Chaigneau

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