« Passer du temps de l’urgence à celui de la relance » (Pascal Tachon, Banque de France)

Rentrée économique (2/2) - Année 2020 compliquée, un début 2021 qui s’inscrit dans une situation sanitaire inquiétante. L’économie régionale serre les dents. La Tribune Montpellier a invité les acteurs des principales filières régionales pour évoquer les perspectives et les attentes des chefs d’entreprises dans ce contexte.
L'événement La rentrée économique 2021 organisé par La Tribune Montpellier interroge les perspectives 2021 des principales filières économiques de l'Occitanie.
L'événement "La rentrée économique 2021" organisé par La Tribune Montpellier interroge les perspectives 2021 des principales filières économiques de l'Occitanie. (Crédits : Eric Durand)

Après une année 2020 marquée au fer rouge par la crise liée au Covid-19 et alors que l'année 2021 s'est ouvert sur une situation sanitaire inquiétante, l'économie serre les dents... Les entreprises tentent de résister, l'Etat continue de déployer des aides massives et les collectivités s'efforcent elles aussi d'apporter leur contribution pour traverser la tempête.

Lors de son événement "La Rentrée économique" (à voir en replay ici), La Tribune Montpellier a interrogé les acteurs économiques des territoires d'Occitanie sur le devenir des principales filières.

« Deux de nos principaux moteurs en Occitanie, l'aéronautique et le tourisme, ont été particulièrement touchés, rappelle Pascal Tachon, directeur de la Banque de France Hérault, en préambule. Fin décembre, l'industrie en France était revenue à 80% de son niveau d'activité avant crise mais seulement 60% côté Occitanie en raison de l'aéronautisme. Et le tourisme seulement 20 à 30%. »

Grâce aux nombreuses aides de l'État (notamment 130 milliards d'euros de PGE distribués en France, 9 milliards d'euros en Occitanie), le pays enregistre « très peu de dépôts de bilan, soit 30 à 40% de moins qu'en 2019 », précise Pascal Tachon, qui pointe désormais une nécessité : « Se pose maintenant la question de passer du temps de l'urgence à celui de la relance ».

« Chez les particuliers, l'épargne a été conséquente, environ130 milliards d'euros de surcroît, mais seront-ils transformés en épargne de précaution ou réinjecté dans l'économie ?, interroge-t-il. Ce serait l'un des moteurs de la croissance. La sortie de crise économique sera la sortie de crise sanitaire au travers de la vaccination. Même si on est dans un marasme économique ambiant, des incertitudes ont été levées, notamment avec les élections aux Etats-Unis et l'espoir d'un dialogue plus apaisé, et le Brexit qui permettra d'éviter des droits de douanes. »

Les filières d'avenir qui font sens

Les experts-comptables, témoins du quotidien des entreprises, ont accompagné les entrepreneurs sur le chemin chaotique de la crise et dans le dédale des dispositifs d'aides.

« Si on met les PGE en endettement de trésorerie, ça va pénaliser les entreprises, souligne Freddy Nicolas, président de l'Ordre des experts-comptables Occitanie. On propose de mettre une partie en quasi-fonds propres, une partie en subvention, et notre profession travaille pour voir si une partie de cet endettement peut être abandonnée... »

De son côté, André Deljarry, président de la CCI Hérault, exprime son inquiétude pour les secteurs les plus impactés, désormais bien identifiés (tourisme, hôtellerie-restauration, bar, boîtes de nuit, salles de sport, événementiel), mais pointe aussi plusieurs « trous dans la raquette », notamment les 7.500 entreprises qui se sont créées en 2020, dont « certaines qui ne sont donc éligibles à rien ».

« A côté de l'État, les CCI ont montré qu'elles sont un maillon indispensable dans l'écosystème économique, cela nous remet dans le jeu », ne manque-t-il pas de se féliciter au passage...

Sur la Métropole de Montpellier, Hind Emad, la vice-présidente en charge du développement économique et numérique, fait le constat d'une baisse du nombre d'emplois créés : « d'habitude, + 2% pour 5.000 emplois par an, mais seulement 2.700 emplois en 2020 ».

« En 2021, nous allons utiliser des outils pour accompagner la reprise, notamment les filières dynamiques qui font sens pour les Montpelliérains comme la santé, numérique, les industries culturelles et créatives et la transition écologique, ajoute-t-elle. Et au travers de l'agence de développement économique que nous créons, nous développerons les coopérations avec les collectivités. »

Tourisme : sauvé par la clientèle de proximité

Outre ces filières d'avenir, les secteurs plus traditionnels résistent comme ils peuvent. Et réfléchissent déjà comment se positionner demain...

« Le tourisme pèse 16 milliards d'euros par an, soit 10% du PIB, et 100.000 emplois, campe Jean pinard, directeur du Comité régional du tourisme (CRT) Occitanie. La saison d'été a été moins pire que prévue et moins pire aussi que dans les autres régions françaises, à condition qu'on enlève la chute de fréquentation à Lourdes. Le positif, c'est notamment qu'on a travaillé les clientèles de proximité, ce qui nous a sauvé et de loin. Nous avons aussi bénéficié de la forte fréquentation des résidences secondaires, 550.000 en Occitanie, avec plus de cinq millions de nuitées, mais aussi des touristes français qui ne sont pas partis à l'étranger et sont venus en Occitanie. »

Le secteur travaille déjà la redéfinition des offres touristiques : « On a beaucoup fantasmé la croissance sur les clientèles étrangères. Mais il faut savoir que sur les 16 milliards d'euros de l'économie touristique, un tiers provient d'une clientèle de proximité. Il ne faut pas opposer les deux mais on aurait tort de ne pas considérer les enjeux de croissance de cette clientèle de proximité. D'autant que la clientèle étrangère ne viendra pas en 2021... ».

Autre enjeu majeur pour le tourisme : renouveler la qualité des hébergements et donc accompagner les propriétaires de logements touristiques dans ce long cheminement.

« L'État joue l'amortisseur »

Dans le bâtiment (10 milliards d'euros de chiffre d'affaires annuel en Occitanie, 6% du PIB, 156.000 actifs), les entreprises ont jusqu'à présent traversé la crise « sans licencier, même si en revanche, l'intérim a souffert, agissant comme variable d'ajustement », analyse Frédéric Carré, le président de la FFB Occitanie. Si la profession se réjouit des futurs effets du plan de relance, elle mise aussi sur le Plan Marshall régional.

« Dans le Plan de relance, il y a 7 milliards d'euros pour la rénovation énergétique, 4 milliards d'euros sur les bâtiments publics et 2 milliards d'euros sur la prime rénovation, énumère Frédéric Carré. En octobre dernier, 2,7 milliards d'euros du public ont été débloqués et en Occitanie, nous avons 10% de cette enveloppe, soit 270 millions d'euros pour 96 projets qui peuvent être déclenchés avant fin 2021. L'État injecte 25% de la baisse, et joue l'amortisseur. »

Enfin, dans la filière des travaux publics, Olivier Giorgiucci, le président de la FRTP Occitanie, évoque la réactivité des entreprises qui se sont organisées pour rattraper le retard du premier confinement, mais aussi des commandes non renouvelées.

« On a enregistré une chute de - 15% dans les travaux publics en Occitanie en 2020, explique-t-il. C'est lié à la mise en place des nouvelles équipes municipales qui a tardé et les projets n'ont pas été lancé aussi vite que souhaité... Le plan de relance est important car on a besoin de visibilité à court et moyen terme. J'en appelle aux élus pour relancer leurs marchés. »

Olivier Giorgiucci identifie deux marges de manœuvre souhaitées par la filière : « Des critères d'attribution plus lisibles pour les élus et la territorialisation du plan de relance car il ne faut pas que le premier qui lève la main soit le premier servi ».

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