Que font réellement les Maisons de la Région de l'étranger ?

Après un rapport sévère de la Cour des comptes en 2017, le Conseil régional revoit sa stratégie en matière de Maisons de la Région, structures initiées par Georges Frêche à compter de 2006. Vérification avec celle de Londres, qui travaille principalement le vin, et qui est en phase de transition alors que la Région remanie aussi ses agences économiques et touristiques.
Isabelle Kanaan, directrice de l'antenne de Londres, devant le 3, Manchester square qui abrite la Maison de la Région.
Isabelle Kanaan, directrice de l'antenne de Londres, devant le 3, Manchester square qui abrite la Maison de la Région. (Crédits : PC)

Voulues par Georges Frêche, alors président du Conseil régional Languedoc-Roussillon, à compter de 2006, les Maisons de la Région à l'étranger sont des spécialités languedociennes, affiliées à Sud de France. Les quatre antennes encore en activité - Shanghai, Londres, New York et Casablanca - sont désormais les Maisons de l'Occitanie. Elles disposaient de 2,7 M€ de budget en 2017, dont 800 000 € pour Londres.

La Maison de Londres, qui fêtera ses dix ans en 2008, devrait recevoir sa nouvelle feuille de route, alors que Sud de France est désormais intégrée à Ad'Occ et que sa compétence touristique a été transférée au nouveau CRT régional. La fin d'un mélange des genres entre la promotion des produits Sud de France et le tourisme, que la Cour des comptes avait épinglée en février dernier.

Quels services peuvent trouver les entreprises dans ce petit bout d'Occitanie anglaise ?

Le vin, le coeur de cible

À sa nouvelle adresse, elle occupe un deux pièces (50m2), dans un immeuble typique du centre de Londres. Loin de l'ancien showroom 180 m2 sur Cavendish Square, le budget (800 000 €) trop serré et les loyers londoniens ont obligé la Maison (qui a compté jusqu'à cinq salariés) à déménager. Résultat, il lui est difficile d'héberger les travailleurs détachés au sein du bureau, mais réserver la salle pour des dégustations est toujours possible.

"Travailler le marché du vin est notre activité principale, avec l'agro-alimentaire, détaille Isabelle Kanaan, directrice de la Maison de Londres. En dix ans, nous avons développé un carnet d'adresses qui peut être mobilisé sur certains événements ou des rendez-vous BtoB, un peu moins sur des dégustations, car le marché est saturé."

La France ne représenterait que 13 % des vins en vente à emporter en Grande-Bretagne. Une proportion plus importante en restauration, de l'ordre de 30 %. Pour autant, l'Occitanie est la seule Région à disposer d'une antenne sur place.

"Depuis dix ans, les acheteurs connaissent Sud de France, une communication primordiale pour compenser un déficit d'image, et mettre en avant un bon rapport qualité-prix."

Un argument déjà développé par Xavier de Volontat du CIVL en février dernier, lors de la présentation des chiffres annuels du secteur. La Royaume-Uni est le 3e marché (21,6 M€ de CA), après la Chine et les Etats-Unis pour les vins languedociens.

"Nous travaillons très bien avec la Maison de Londres", indiquait alors la président du CIVL.

Connaître le marché

La Maison de Londres agit comme une agence de conseil pour pénétrer le marché britannique. Sud de France Développement (aujourd'hui Ad'Occ) à Montpellier aiguille les entreprises vers les services d'Isabelle Kanaan et son équipe.

Les contacts professionnels peuvent alors prendre la forme de rendez-vous BtoB, ou d'événements de networking même si l'institution ne partage son carnet d'adresse, mais "donne des pistes". Pour le vin, les acheteurs sont plutôt :

"La restauration, les sommeliers, les distributeurs indépendants et certains supermarchés haut de gamme comme Marks & Spencer, poursuit Isabelle Kanaan. On voit moins la grande distribution comme Tesco ou Sainsbury's."

Sur l'agroalimentaire, Isabelle Kanaan applique une stratégie similaire, mais sans dégustation.

"Cela ne marche pas, le marché est très dur. Les Anglais ne sont pas gastronomes : taureaux, foies gras ou même fromages sont difficiles à vendre. La meilleure vente, ce sont les olives Lucques. Le prix est un critère. En Grande-Bretagne, les hard discounters connaissent actuellement une croissance à deux chiffres."

maison de londres

La salle de réunion à la Maison de la Région de Londres.

Communication & sponsoring

La Maison de la Région organise en moyenne deux opérations de promotion par an. Elles peuvent se matérialiser sur le prix de certaines bouteilles dans les linéaires des supermarchés. Mais les campagnes digitales, sur le site de l'acheteur, restent essentielles, alors qu'une insertion publicitaire dans un grand journal anglais se chiffre vite à 10 000 £.

"Éduquer les consommateurs est une priorité, surtout que les Anglais raisonnent par cépages. Ils achètent un sauvignon ou un syrah. Nous devons montrer la pertinence de nos assemblages."

La Maison de Londres se concentre désormais sur le développement économique, alors que Sud de France n'a plus la compétence touristique.

"C'était complémentaire de notre activité. L'oenotourisme par exemple était un angle d'attaque intéressant. Les vins deviennent alors une matérialisation des souvenirs de vacances."

Avec cette réorganisation, Isabelle Kanaan devrait voir sa feuille de route renouvelée dans l'année de l'agence Ad'Occ. Elle espère la recevoir à temps pour les dix ans de la Maison de Londres qui auront lieu le 12 juin prochain. L'institution organisera en même temps son événement phare : le Top 100, un concours de vins régionaux avec les acteurs anglais.

Les Maisons de la Région, un héritage languedocien

L'ex-Région Languedoc-Roussillon a compté jusqu'à cinq Maisons de la Région dans le monde. Bruxelles a ouvert en décembre 2006, Milan en octobre 2007, Shanghai en novembre, Londres en juin 2008 et New York en avril 2009. Le 25 juin 2012, ouvrira aussi la Maison de Casablanca au Maroc.

Ces créations sont de véritables filiales de l'agence de développement économique régionale à l'étranger, sous droit local. Dans son dernier rapport la Cour des comptes sanctionne la politique touristique de l'ex-LR, sous la houlette de Sud de France, et pointe la faillite de Barcelone et Milan.

"Les deux filiales ont déposé le bilan, laissant la SEM en supporter les conséquences, indique le rapport. À Barcelone, elle a été condamnée à payer une indemnité nette de 468 000 € et a dû consentir à sa filiale un abandon de compte courant à hauteur de 379 000 € à la clôture de l'exercice 2014. La liquidation de la maison de Milan a été prononcée, à la suite de sa fermeture en juillet 2010, et les titres ont été passés en perte. Pour autant aucun bilan financier sur le coût global de la maison n'a été transmis."

Entre-temps, la Maison de Bruxelles est devenue la nouvelle interface de la Région Occitanie avec l'Union Européenne, comme l'avait souligné Carole Delga lors de son inauguration le 31 mai 2017.

"Cette Maison de la Région à Bruxelles est le lieu qui incarne notre ambition européenne, et le début d'une nouvelle ère concernant notre implication dans le projet européen."

De même, après plusieurs années, les locaux de la Maison de Barcelone viennent d'être vendus, 1,3 M€, en deçà du marché selon une information de Midi Libre.

Les directeurs des Maisons de Région se retrouvent une à deux fois par an à Montpellier. Ils peuvent occasionnellement réutiliser certains supports ou campagnes, mais travaillent principalement leur marché chacun de leur côté.

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