Sobriété énergétique : la stratégie de la Métropole de Montpellier, qui refuse de fermer les piscines

Série (3/4) – L’affolant baromètre des prix de l’énergie affecte aussi les collectivités. Depuis cet été, c’est l’alerte rouge et l’heure à la chasse aux économies, avec la difficulté de ne pas trop obérer la qualité du service public. Or le principal levier des collectivités pour la sobriété énergétique, ce sont les piscines, très consommatrices d’énergie. Des stratégies différentes se mettent en place et à Montpellier, pas question de les fermer.
Cécile Chaigneau
La piscine (olympique) du quartier d'Antigone, à Montpellier.
La piscine (olympique) du quartier d'Antigone, à Montpellier. (Crédits : DR)

De la même manière que les entreprises, les collectivités font face à une équation complexe : l'envolée des prix de l'énergie les oblige à chercher des moyens de réduire leur facture en affectant le moins possible la qualité du service public. Alors que partout en France, l'une des premières décisions que prennent les collectivités est de fermer partiellement (voire totalement) les établissements, la Métropole de Montpellier se positionne sur une stratégie différente.

Le 9 septembre, lors d'une conférence de presse de rentrée, Michaël Delafosse, maire de Montpellier et président de la Métropole, a confirmé ce que ses services avaient commencé à annoncer : « Contrairement à beaucoup de collectivités, nous ne fermerons pas les piscines ».

« Il faut aller chercher des marges de manœuvre de tous les côtés, préconise l'élu. Les collectivités ne bénéficient pas d'un bouclier tarifaire donc nous négocions des prix plus bas. Nous mettons des moyens pour ne pas fermer. Nous travaillons à un plan sobriété qui sera prochainement délibéré en conseils municipal et métropolitain. »

+ 175%, + 250%...

La Tribune a interrogé Olivier Nys, le directeur général des services de la Ville et de la Métropole, pour expliciter le contexte et les solutions que les deux collectivités cherchent à déployer « pour réduire cette facture qui devient indigeste », déclare Olivier Nys.

Pour leurs achats d'électricité, la Ville et de la Métropole passent par des contrats à terme via un groupement de commande d'achat piloté par Hérault Energie (avec quelque 200 autres collectivités) qui achète l'électricité sur le marché au meilleur prix au gré des opportunités. Avec l'augmentation des cours de la précieuse électricité, les dépenses prévisionnelles passeraient de 4,37 millions d'euros en 2022 à 12,02 millions d'euros (+ 175%) en 2023 pour l'électricité des bâtiments (Ville et Métropole), et de 4,16 millions d'euros à 7,28 millions d'euros (+ 75%, une augmentation moindre car il s'agit de tarifs de nuit) pour l'électricité de l'éclairage public (Métropole). Sur le gaz, l'explosion de la facture des bâtiments des deux collectivités est encore plus importante (+ 250%), passant de 2,36 millions d'euros en 2022 à 8,25 millions d'euros...

14 piscines, 1 million d'euros d'électricité

 « Nos principales dépenses en énergie proviennent de notre patrimoine (1 million de m2, NDLR) dont 14 piscines, et de l'éclairage public, précise Olivier Nys. En 2021, les piscines représentaient une facture de 1 million d'euros d'électricité et de 930.000 euros de gaz, avec une qui domine le palmarès, la piscine olympique d'Antigone qui pesait à elle seule 300.000 euros d'électricité et 183.000 euros de gaz... »

Pour autant donc, pas question de les fermer. Plusieurs pistes sont sur la table et à l'étude, comme l'explique Olivier Nys : « Réduire la température de l'eau de 1 degré, ce qui ferait faire entre 7 et 10% d'économie, et réduire la température des bâtiments. On se pose la question des bassins extérieurs l'hiver. Mais l'augmentation des tickets d'entrée n'est pas sur la table pour l'instant car ce n'est pas de la responsabilité de l'usager, et l'idée n'est pas de rajouter de la crise à la crise ».

Quant à la patinoire de Montpellier, elle est sous délégation de service public avec l'entreprise Vert Marine, n° 1 de la gestion d'établissements publics sportifs en France (dont la piscine de Nîmes).

« Comme Vert Marine achète de l'électricité de manière instantanée, ils ont pris de plein fouet la multiplication par dix des prix, indique Olivier Nys. Mais la patinoire a fait une très bonne année 2022 et leur équilibre économique est correct, donc Vert Marine ne peut pas juridiquement fermer. Toutefois, nous leur proposons de regarder si, au lieu d'acheter l'électricité en temps réel, ils pourraient se connecter à notre marché d'achat d'électricité, avec des prix plus bas donc. »

Photovoltaïque, petites éoliennes horizontales

Où se situent les autres « marges de manœuvre » des collectivités pour réduire les consommations énergétiques ? Le DGS annonce avoir demander à l'ensemble des équipes d'explorer toutes les pistes possibles. Il rappelle tout d'abord que la Ville et la Métropole se sont engagées, dès le début du mandat de Michaël Delafosse en 2020, dans des démarches de sobriété sur lesquelles elles vont désormais accélérer, comprenant notamment des programmes de rénovation thermique des bâtiments, un plan de maîtrise des températures dans les locaux ou le verdissement de la flotte automobile.

« Nous allons essayer de faire d'ici 2024 ce qu'on pensait faire pour 2026, annonce Olivier Nys. D'ici la fin du mandat, 50% des véhicules légers et utilitaires seront électriques, ce qui est aussi une façon de faire des économies. »

La production d'électricité est aussi une voie qui sera accélérée (aujourd'hui, la Ville produit 0.6 GWh d'électricité solaire qu'elle revend pour 210.000 euros de recettes annuelles) : « Par exemple, généraliser le photovoltaïque sur nos terrasse ou toitures, envisager de mettre des micro-éoliennes horizontales sur les toitures. Ce sont les petits ruisseaux qui feront les grandes rivières... Sur le Lez, le niveau est trop bas et le fleuve et trop irrégulier pour installer des mini-centrales hydrauliques ».

Dans le parc social de l'office public HLM, ACM Habitat, Michaël Delafosse annonce le changement prochain de 1.243 radiateurs et 82 chaudières : « Nous serons offensifs, on ne néglige personne ! ».

Transports : la facture multipliée par 4

« Et nous sollicitons tous nos gros satellites, notamment la TAM (SEM de transports de la métropole, NDLR) qui est très consommateur d'énergie, ajoute Olivier Nys. La sur-facture prévisionnelle est de 9 millions d'euros sur une année, c'est à dire que la TAM multiplie sa facture par quatre en passant de 3 à 12 millions d'euros... Comment réduire la facture ? Pour le moment, il n'est pas question de réduire l'offre de transport. On étudie, sur les lignes moins fréquentées, de changer le bus pour un véhicule plus petit et moins consommateur d'énergie. Ou de parquer les tramways sous des ombrières pour éviter que la température intérieure monte trop, ce qui entraîne une grosse consommation de climatisation ensuite. »

Enfin, sur la question de l'éclairage public, la Métropole a déjà lancé des expérimentations d'extinction ou de réduction de l'intensité lumineuse sur certains axes.

« Il y a toutefois un obstacle : la question de sécurité, rappelle Olivier Nys. Il faut donc arbitrer et concilier sécurité et sobriété. Les expérimentations en cours n'ont pas encore été évaluées. »

Dans ce dossier "Sobriété énergétique", lire également :

Cécile Chaigneau

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