« Le Pacte de Milan, c'est est un accord international entre villes mondiales petites et grandes, qui, attentives à la catastrophe climatique actuelle et conscientes des enjeux, s'engagent pour mener des politiques publiques afin d'améliorer la durabilité de leurs systèmes alimentaires, rappelle Cécile Michel, la secrétaire générale du Pacte de Milan, en préambule du 5e Sommet international des maires du Pacte de Milan qui s'est ouvert le 7 octobre, pour trois jours, à Montpellier. Le Pacte de Milan, c'est 37 actions politiques concrètes dont les maires peuvent s'inspirer. Les villes peuvent être une partie du problème mais elles peuvent aussi être une partie de la solution car les maires ont le pouvoir de mener des politiques attachées aux réalités du terrain, de toucher les acteurs locaux. »
Aujourd'hui, près de 200 villes dans le monde ont signé ce Pacte, initié en 2015, et 90 d'entre elles sont représentées pour ce sommet montpelliérain, dont 30 capitales mondiales. De nouvelles villes vont s'engager lors du sommet montpelliérain, parmi lesquelles Toulouse.
« Si les États sont capables de donner les grandes directives, d'appliquer les grandes compétences, ce sont les villes qui arrivent à organiser au niveau planétaire des politiques comme celles sur l'alimentation durable, la lutte contre le réchauffement climatique, sur l'eau, etc., assène Philippe Saurel, maire de Montpellier et président de la Métropole. Les maires sont confrontés aux mêmes situations et parlent le même langage. »
Re-politiser et restaurer la confiance
Damien Conaré, secrétaire général de la chaire Unesco Alimentation du monde Montpellier Supagro, s'est chargé de re-contextualiser les débats.
« Le tableau est sombre, souligne-t-il. Le spectre des matières premières se réduit. Environ 30 % de la production alimentaire n'est pas consommée, selon FAO, ce qui représente des surfaces agricoles gaspillées de la taille du Mexique. Par ailleurs, nous observons un problème de distanciation sur ce sujet, notamment de distanciation politique ou cognitive : les citoyens ont le sentiment de perdre le contrôle sur leur alimentation, on ne sait plus ce qu'on mange, ce qui entraîne une perte de confiance. L'invisibilité de la production agricole dans nos villes fait que l'alimentation perd de la valeur, ce qui favorise le gaspillage. Les diverses initiatives comme les paysans boulangers, les jardins partagés, les circuits de proximité ou les épiceries solidaires, contribue à re-politiser l'alimentation et à restaurer la confiance. Les villes peuvent actionner de nombreux leviers politiques. Un de leurs défis est de réfléchir comment faire du lobbying pour imposer ces politiques dans les instances européennes et internationales où se décident les politiques alimentaires.
Urgence climatique
En juillet dernier, le président de la Métropole de Montpellier avait déclaré « l'état d'urgence climatique », et créé un fonds d'urgence en fléchant « 10 à 15 M€ du budget 2020 pour lutter contre le réchauffement climatique sur des thématiques précises, notamment un soutien aux projets solaires et la protection thermique de l'habitat », a-t-il précisé le 7 octobre. Les 21 et 22 septembre, l'édile s'était rendu au Sommet des Nations Unies pour le climat, à New York, pour présenter son « Manifeste de Montpellier pour une ville écologique et humaniste », feuille de route d'une trentaine d'engagements.
« Il est normal que Montpellier, en proie à des phénomènes climatiques de grande ampleur, prenne de grandes résolutions, ajoute-t-il. C'est l'objectif du SCOT, construit sur ce diagnostic, qui préservera 2/3 des surfaces naturelles et agricoles. Cela figurera dans le PLUI. »
Ne pas opposer
La collectivité a profité du Sommet pour s'engager un peu plus loin avec les acteurs de l'écosystème agroécologique local au travers d'une Charte pour la transition agroécologie et l'alimentation durable, dont l'ambition est de changer les systèmes alimentaires territoriaux. Ils étaient neuf à la rédiger et à la signer le 7 octobre : la métropole de Montpellier, le Grand Pic-Saint-Loup, le Pays de l'Or, la Chambre d'agriculture de l'Hérault, le MIN de Montpellier, InPACT Occitanie, Ocebio Occitanie, Civam Bio 34, et Terre et Humanisme.
« Il faut accompagner les agriculteurs dans cette transition, déclare Jérôme Despey, président Chambre d'agriculture 34. On ne doit pas opposer l'activité économique, l'urbanisation et l'agriculture. On doit faire évoluer nos pratiques dans une démarche de concertation, non pas les uns contre les autres, il ne faut pas opposer riverains et agriculteurs."
La charte prévoit six engagements, notamment sur l'économie circulaire, une production responsable, un approvisionnement de proximité. Pour les cosignataires, c'est l'amorce d'une démarche qui devra s'amplifier.
« Cette charte, c'est bien mais c'est le minimum et c'est encore insuffisant, fait observer Olivier Hébrard, chargé de mission pour Terre et Humanisme. Le compte à rebours est lancé, il ne nous reste pas 20 ans, il faut faire très vite ! »
« Nous parlons d'agriculture paysanne, pas productiviste, ajoute Vincent Nourigat, président de InPACT Occitanie. Nous espérons que cette charte est le début d'un phénomène plus contraignant. »
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