Le Meeting Art Objectif a mis en lumière les nombreux visages du mécénat artistique

La 1e édition du Meeting Art Objectif, organisé par Objectif Languedoc-Roussillon le 29 septembre, a mis en lumière les nouvelles formes de mécénat se diffusant en région. Revivez en images les temps forts de cet événement, qui attiré près de 300 décideurs au Domaine de Verchant, à Montpellier.
Le MAO a réuni près de 300 personnes, qui ont pu observer la performance de l'artiste ARDPG en clôture de la manifestation

L'art contemporain fait rêver, est porteur de prestige, et soutenu par des dispositifs fiscaux destinés à encourager les entreprises à s'engager en faveur de la création artistique. Le Meeting Art Objectif (MAO), manifestation organisée par Objectif Languedoc-Roussillon le 29 septembre au Domaine de Verchant, en présence de près de 300 décideurs et acteurs économiques, a permis de sonder les différentes facettes de cet enjeu.

Retrouvez en images les temps forts du MAO dans le diaporama accessible ici.

La 1e table-ronde

La première table ronde du MAO invitait des intervenants à livrer leur expertise sur l'art contemporain et le mécénat.

Il convenait de noter, en préambule, que le marché de l'art, atypique et compliqué car déréglementé, est plutôt florissant.

« En 2013, les ventes publiques se sont montées à 13 Mds $, et en 2014 à 15,5 Mds $, souligne Arnaud Dubois, directeur associé d'IP ART, société de conseil spécialisée dans le placement des œuvres d'art. En valeur, c'est un marché qui prend plus de 10 % par an depuis le milieu des années 2000, notamment parce que les marchés financiers, en berne, ne sont pas très attractifs, et qu'on observe un fort engouement du public pour l'art. »

La fiscalité, pour les collectionneurs particuliers, est qualifiée d'« exceptionnellement intéressante » par l'expert, qui ajoute que, par ailleurs, « les grands groupes utilisent volontiers le dispositif de leasing qui leur permet de louer une œuvre d'art et d'en devenir propriétaire ».

« Contrairement à ce qu'on espérait, le mécénat est affecté par la crise, observe cependant François Debiesse, président d'ADMICAL (association qui développe le mécénat des entreprises et des entrepreneurs). Alors que 31 % des entreprises étaient mécènes en 2012, elles sont aujourd'hui 21 % seulement. On observe un report important vers le social, vers ce qui apparaît le plus urgent. »

Tout comme les petits collectionneurs contribuent autant que les grands à la vitalité artistique, et contrairement aux idées reçues (portées par la médiatisation des actions de mécénat artistiques menées par les grands groupes), les TPE et PME sur les territoires apparaissent comme des acteurs significatifs, même si elles ont dû « se serrer la ceinture avec la crise », note François Debiesse.

« Il existe deux types de mécénat, explique Christophe Bourdin, avocat montpelliérain. Le don d'argent ou le mécénat en nature, et le mécénat de compétences, soit le détachement d'un salarié au profit d'un organisme d'intérêt général. »

La loi Aillagon (relative au mécénat, aux associations et aux fondations) votée en 2003, a permis de rapprocher la culture et l'entreprise.

« Par exemple, nous avons réussi à faire signer la DRAC-LR (direction régionale des affaires culturelles - NDLR), la CCI des Pyrénées-Orientales, la Chambre des experts-comptables et la Chambre des notaires pour monter une fondation d'entreprises sur le territoire, rappelle Véronique Cottenceau, en charge du mécénat à la DRAC-LR. Elle compte 35 TPE et PME qui ont apporté 4 000 à 15 000 €, soit 237 000 € récoltés en cinq ans, pour "mécéner" une dizaine de projets culturels. À Montpellier, la CCI et la Chambre départementale des notaires ont créé un fonds de dotation, l'an dernier, pour aider 8 projets. »

Le dispositif de défiscalisation pour les entreprises autorise la déduction de 60 % du don effectué, dans la limite de 0,5 % du chiffre d'affaires réalisé en France (et non à l'export).

« Il faudrait faire tomber ce plafond de 0,5 % », suggère François Debiesse, rejoint par Christophe Bourdin, qui qualifie les avantages fiscaux de « très faibles ».

« Mais pas d'angélisme, assure François Debiesse. Une entreprise qui se lance dans le mécénat le fait avec une idée. Le mécénat a notamment un impact en terme de communication, de rachat d'image : c'est le cas des banques ou du groupe Total, par exemple. Mais aussi un impact en communication interne avec les collaborateurs en terme de recherche de sens, d'engagement sociétal. »

« Les collectionneurs d'art contemporain sont des spéculateurs, déclare Arnaud Dubois. Le collectionneur est très fier d'avoir fait le bon choix, et le prestige est un élément qu'il ne faut pas négliger. »

Numa Hambursin, directeur artistique du Carré Saint-Anne à Montpellier, souligne l'importance des acteurs privés dans la politique publique d'art contemporain, rappelant que « la figure du collectionneur est capitale dans l'histoire de Montpellier ».

« Au carré Saint-Anne, nous avons organisé les 1ères expositions d'œuvres de collectionneurs, raconte-t-il. Les collectionneurs sont les derniers chasseurs de trésor ! Ils sont la pulsation artistique d'une ville, ils donnent le "la". Cela permet de sortir de l'entre soi... »

L'universitaire montpelliéraine Nathalie Moureau (Université Paul Valéry), qui a déjà signé une étude sur le profil du collectionneur d'art contemporain, a lancé une nouvelle enquête sur les collections d'entreprises, le lien entre art et entreprises.

Les différentes expressions du mécénat artistique

Lors de la 2e table-ronde du MAO consacrée aux différentes expressions du mécénat artistique, les témoignages ont démontré la diversité des formes que prend cet engagement en faveur des scènes artistiques nationale ou locale. Ainsi, la Collection Société Générale, créée il y a une vingtaine d'années, a d'abord été mise en route pour décorer les 10 km de couloirs du siège de la banque, à la Défense à Paris, avant qu'elle n'évolue en véritable politique de mécénat structurée, qui profite "largement aux collaborateurs" comme l'a rappelé Aurélie Deplus, responsable du mécénat artistique de Société Générale. La Collection compte aujourd'hui 400 œuvres originales, 700 lithographies, et la moitié des artistes soutenus sont d'origine étrangère.

Pour sa part, Estelle Francès, créatrice de le fondation éponyme avec Hervé Francès, a voulu, à l'origine, accrocher des œuvres dans son entreprise pour créer "une empathie avec son environnement proche". Mais le thème central de cette collection parfois dérangeante - l'homme et ses excès - l'a poussé à installer sa fondation dans la ville de Senlis (60) en l'ouvrant au public, afin de "montrer que l'art contemporain peut aussi déranger les vieilles pierres".

"Le problème de l'art contemporain est que les gens se sentent souvent exclus, souligne Gilbert Ganivenq, P-dg du groupe immobilier sétois Proméo. Pour ma part, je finance une collection de 500 œuvres avec mes fonds privés (dont une partie est exposée au siège du groupe, NDLR). Mais je ne suis pas un collectionneur qui court après une plus-value. L'art est un hobby, une passion. Le but de la démarche est de se faire plaisir mais aussi de partager, car je n'oublie pas le rôle social d'une entreprise, qui emploie des salariés, compte des associés et fait du mécénat."

"Nous avons choisi de placer de l'art dans une opération en 2008, et face aux bons retours, nous avons systématisé cette démarche, nous nous sommes entourés en allant jusqu'à créer une agence qui gère l'interface avec les artistes, détaille Alexandra Aznar, directrice de l'agence de conseil et d'évènementiel Égéria, filiale du promoteur Hélénis. En lien avec le sens de notre activité, nous voulons faire entrer des œuvres dans de nouveaux territoires, au-delà du plaisir du collectionneur."

Pour Mécènes du Sud, collectif de 45 entreprises de Marseille-Provence œuvrant à la promotion et au soutien de la création artistique, le mécénat a été pensé, dès 2003, comme un "acte politique", selon son président Christian Carassou-Maillan : il s'agissait de créer une marque, pour donner à ce territoire une nouvelle image et montrer sa modernité.

"La Fondation d'entreprises du Musée Fabre de Montpellier a été, lors de la réouverture en 2007, une première en France car il s'agissait d'une fondation spécialement dédiée au musée, rappelle son directeur, Michel Hillaire. Elle associe aujourd'hui 22 entreprises membres, qui doivent s'acquitter chacune d'une cotisation de 10 000 €. Nous avons totalisé, depuis 2008, 1,8 M€ qui ont été utilisés principalement pour les acquisitions du Musée, mais aussi pour la publication d'un ouvrage et la restauration d'une œuvre."

Bientôt un centre d'art contemporain

En introduction du MAO, Bernard Travier, vice-président de Montpellier Méditerranée Métropole délégué à la culture, était revenu sur le projet de création d'un centre d'art contemporain à Montpellier, ardemment défendu par le président Philippe Saurel.

« C'est un projet phare. Les retombées économiques seront beaucoup plus importantes qu'un musée à la fréquentation aléatoire qu'aurait été le musée de la France en Algérie. Philippe Saurel n'a jamais tergiversé à ce sujet. Ce centre ne sera pas une succursale du musée Fabre, comme on a pu l'entendre ».

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Commentaire 1
à écrit le 30/09/2015 à 10:12
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Tout cela est très bien, mais à quel moment se pose-t-on la question de l'artiste ? Pendant que les entreprises gagnent de l'argent grâce au mécénat les artistes crèvent de faim.

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