Covid-19 : « La gendarmerie vient de créer un groupe Cyber à Montpellier »

Afin de contribuer à prémunir autant que possible les entreprises du risque de cambriolages et de cybermenace durant la période de crise sanitaire, la gendarmerie nationale a réorganisé ses forces et priorisé ses missions. Le général Jean-Valéry Lettermann, commandant adjoint de la Région de gendarmerie d’Occitanie (responsable régional sur l’ex-Languedoc-Roussillon) et Commandant du Groupement de Gendarmerie départementale de l'Hérault, explique.
Cécile Chaigneau
Le général Jean-Valéry Lettermann, commandant adjoint de la Région de gendarmerie d’Occitanie (sur l’ex-Languedoc-Roussillon) et Commandant du Groupement de Gendarmerie départementale de l'Hérault.
Le général Jean-Valéry Lettermann, commandant adjoint de la Région de gendarmerie d’Occitanie (sur l’ex-Languedoc-Roussillon) et Commandant du Groupement de Gendarmerie départementale de l'Hérault. (Crédits : DR)

Voilà maintenant un mois et demi que la crise sanitaire a conduit au dispositif de confinement. Comment la gendarmerie aborde-t-elle ses missions dans ce contexte ?

Général Lettermann : « Le groupement de gendarmerie de l'Hérault, ce sont 1 100 gendarmes, et 3 700 sur l'ex-Languedoc-Roussillon. Cette crise nécessitait d'avoir une réflexion sur notre propre plan d'activité. La question, c'est comment continuer à assurer notre mission de service public. Et le maître-mot, c'est la résilience. Nous avons organisé les équipes de l'État-Major mais aussi celles sur le terrain en bordées étanches (comprendre des équipes qui ne se croisent pas, NDLR) afin de limiter le risque de contamination : les gendarmes alternent une journée au bureau et une journée à la maison. Par ailleurs, nous avons déterminé les missions principales à tenir, notamment s'assurer du respect des mesures de confinement sur le terrain. Nous avons bien sûr mis des moyens spécifiques comme des écrans en plexiglace, fabriqués dans nos ateliers, sur les banques d'accueil, des kits sanitaires dans les véhicules, etc. »

Cette crise sanitaire est inédite. Pour autant, la gestion de crise ne vous est pas inconnue...

« C'est notre métier d'officier de gendarmerie de gérer la crise. Le gendarme est au contact de tous les disfonctionnements de la société : délinquance, violences, troubles à l'ordre public, incivilités, émeutes, accidents de la circulation, et toutes crises climatiques, sanitaires, etc. Or dans la région, on n'est pas épargnés, notamment par les crises climatiques comme l'épisode des inondations dans l'Aude en octobre 2018, la crise terroriste le 23 mars 2018 à Trèbes, ou encore le terrible accident de car de Millas en décembre 2017... J'ai été en poste à la sécurité de l'Hôtel de Matignon de 2007 à 2010, où nous avions à considérer deux sujets importants : la continuité d'activité en cas de crue de la Seine et en cas d'épidémie du H5N1. »

En quoi cette crise sanitaire expose-t-elle particulièrement les entreprises et commerces ?

« D'abord parce qu'ils sont fermés et risquent ainsi d'attirer les cambrioleurs... Nous avons observé une baisse des statistiques de délinquance classique depuis le début de la crise car les gens sont chez eux donc moins exposés aux cambriolages, et les rues désertes rendent les éventuels cambrioleurs plus identifiables. Il y a aussi une chute des trafics de stupéfiants. Tout ça génère une petite tension chez les délinquants habituels qui recherchent de nouvelles sources de "revenus"... Sur le volet cybermenace, beaucoup d'entreprises ont mis en place le télétravail pour leurs salariés, ce qui crée de nouvelles vulnérabilités ou le risque de mélange entre données personnelles et professionnelles quand les gens travaillent sur leur propre ordinateur. D'autant que les réseaux sont saturés, ce qui crée automatiquement des portes d'entrées supplémentaires dans les sociétés. Il se trouve toujours des gens pour exploiter l'inquiétude et la sensibilité accrue générées par la situation, en proposant des ventes illégales de gels, de masques, de services de désinfection, etc. Dans ce type de situation, on observe aussi une recrudescence du phishing, des ransomware, du vol de données, des faux ordres de virement. Autant de méthodes qui sont connues mais qui beaucoup plus utilisées. »

Quelle réponse apportez-vous ?

« L'opération Tranquillité entreprise a été mise en place avec la CCI de l'Hérault et elle est déployée au fur et à mesure dans les autres départements. Elle consiste en une surveillance renforcée des entreprises et commerces sur le même modèle que l'opération Tranquillité Vacances pour les particuliers. Les entreprises se signalent auprès de la gendarmerie ou de la CCI pour qu'au cours de nos patrouilles, on apporte surveillance particulière à ces sites. Depuis le 17 mars, une cinquantaine de signalements d'entreprises sont parvenues à l'Etat-Major, auxquels il faut ajouter quelque 175 chefs d'entreprises qui se sont directement adressés aux brigades... Concernant les cybermenaces, sur l'ex-Languedoc-Roussillon, la gendarmerie compte plusieurs centaines de cyber-gendarmes dans toutes les brigades pour informer et sensibiliser sur ces questions. A la Section de Recherche de Montpellier - dont le périmètre d'action s'étend sur l'Hérault, l'Aude, les Pyrénées-Orientales et l'Aveyron - on vient de créer un groupe Cyber de cinq gendarmes. Il devait être mis en place cet été mais nous avons anticipé son installation et il est à pied d'œuvre, avec pour mission de faire de la veille et des enquêtes. Et au niveau national, il existe une structure qui organise des cyber-patrouilles, c'est-à-dire des gendarmes qui patrouillent sur les réseaux pour repérer les attaques. »

Avez-vous enregistré une augmentation des plaintes ou eu connaissance d'une attaque particulièrement virulente dont aurait été victime une entreprise ?

« Ce sont plutôt par exemple des signalements de gens qui reçoivent des mails suspects... Il y a une collectivité territoriale, dans l'Hérault, dont le système informatique a été vérolé. Les services de la collectivité ne s'en étaient pas rendu compte et c'est la gendarmerie, par sa veille sur le darkweb, qui l'a découvert. Ça aurait pu aboutir à un blocage volontaire ou à un vol de données. »

Cécile Chaigneau

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Commentaires 2
à écrit le 08/04/2021 à 14:25
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Je suis stupéfait ! je me suis rendu ce matin au hyper U d'Agde , ou j'ai trouvé un rayon "Promo Beauté" ou il est impossible de respecter les gestes barrières. avec une concentration de personnes autour de ce rayon espacé de moins d'un mètre impossi...

à écrit le 08/04/2021 à 14:25
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Je suis stupéfait ! je me suis rendu ce matin au hyper U d'Agde , ou j'ai trouvé un rayon "Promo Beauté" ou il est impossible de respecter les gestes barrières. avec une concentration de personnes autour de ce rayon espacé de moins d'un mètre impossi...

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