Pourquoi Smoove a quitté Montpellier

La PME héraultaise Smoove, mise sous les feux des projecteurs il y a trois ans pour avoir remporté, au sein du consortium Smovengo, le marché des Vélib’ sur le Grand Paris, a fermé son site près de Montpellier pour se replier dans la banlieue lyonnaise. Explications.
Cécile Chaigneau
La PME Smoove, spécialiste des vélos en libre-service, est présente dans 23 pays dans le monde avec 40 000 vélos en circulation.

La PME héraultaise Smoove, spécialistes des marchés de vélos en libre-service, avait été mise en lumière en avril 2017 quand le consortium Smovengo - conduit par Smoove, associée au Catalan Moventia, à Indigo (ex-Vinci Park) et à Mobivia (ex-Norauto) - avait raflé le marché du Vélib' parisien, au nez et à la barbe du géant JCDecaux. Portant sur la fourniture de 20 000 vélos (dont un tiers à assistance électrique) et l'équipement de 1 800 stations sur le territoire du Grand Paris, le contrat affichait une valeur de 600 M€ sur quinze ans.

Après deux années mouvementées d'un déploiement laborieux et chaotique, Smoove assurait en septembre 2019 que les difficultés étaient derrière elle, et annonçait qu'elle remaniait ses structures financières et de gouvernance pour investir dans un nouveau plan stratégique...

En mai 2019 déjà, le cofondateur (avec son frère) de Smoove Laurent Mercat avait revendu ses parts à Via-ID, le fonds de développement de Mobivia, l'un des membres fondateurs de Smovengo, et cédé la gouvernance de la PME à Ludovic Bertrand, lui-même issu de Mobivia.

Aujourd'hui, Ludovic Bertrand est le président de Smoove et Benoit Yameundjeu, le directeur général depuis janvier 2020. Mais au cours du premier semestre 2020, Smoove a quitté Saint-Gély-du-Fesc, près de Montpellier, pour Oullins, dans la banlieue sud de Lyon.

Raison de coût

« Smoove a toujours eu 2 sites : le site corporate près de Montpellier, où était basé le siège social avec une dizaine de personnes, et le site plus industriel à Oullins avec la R&D, la supply-chain et près de 70 personnes, explique Benoit Yameundjeu à La Tribune. Nous avons décidé de regrouper les collaborateurs sur un même site pour des raisons de coût. Il a été proposé aux salariés de Montpellier de rejoindre Oullins. Certains, qui sont itinérants, continuent de vivre à Montpellier, et 4 ou 5 personnes n'ont pas souhaiter suivre. Aujourd'hui, Smoove emploie près de 80 salariés. »

Laurent Mercat et son frère Denis Mercat sont restés dans l'entreprise, le premier en tant que conseiller spécial pour Via-ID Mobivia, le second en tant que directeur de l'innovation.

Où en est aujourd'hui le déploiement du service Vélib' ?

« Tout est rentré dans l'ordre et fonctionne bien », se contente de déclarer Benoit Yameundjeu, qui renvoie vers Smovengo pour toute question sur le sujet, refusant notamment de commenter celles portant sur le volet financier, le consortium ayant écopé de lourdes pénalités de retard de la part du syndicat mixte Autolib' Vélib' Métropole.

Le 1er juillet dernier, alors que Smovengo annonçait la nomination de Stéphane Volant aux fonctions de président, étaient également rappelés les chiffres du service, en l'occurrence 19 000 vélos (dont 40% de vélos à assistance électrique) déployés dans près de 1 400 stations et plus de 380 000 abonnés.

Vélos connectés et stations virtuelles

Benoit Yameundjeu préfère se concentrer sur le plan de développement de Smoove, qui conçoit ses vélos à Oullins mais fait fabriquer les pièces en France et en Asie et assembler les vélos par la Manufacture Française des Cycles (MFC) à coté de Nantes.

« Fournir à des exploitants des systèmes de vélos en libre-service est notre cœur de métier et reste notre principal axe de développement, précise-t-il. Nous avons relancé la R&D en début d'année sur la mise au point de systèmes plus innovants, avec IoT notamment. Notre vélo a évolué grâce aux apprentissages tirés du Vélib'. Le nouveau modèle sera mis sur le marché l'an prochain et il est déjà proposé dans les appels d'offres. Le vélo intelligent est l'ADN de Smoove. Désormais, il est connecté en permanence, géolocalisé, avec les mêmes caractéristiques que la trottinette. La différence, c'est qu'il ne sera pas forcément bloqué à une station mais pourra être déposé à une station virtuelle grâce à une localisation GPS. On s'oblige à définir des zones où les vélos peuvent être déposés, accrochés à un simple arceau, ce qui constitue une station légère et donc moins coûteuse pour la collectivité. Par ailleurs, l'interface client a été revu et permettra un système d'échanges via le smartphone pour s'affranchir des totems sur les stations qui sont eux aussi coûteux pour les villes. »

Selon le DG, quelque 40 000 vélos Smoove circulent aujourd'hui dans 23 villes dans le monde, dont environ 5 000 à 8 000 vélos électriques. Parmi elles : Paris, Moscou, Helsinki, Vancouver, Marrakech, Montpellier, Strasbourg, Vannes, etc. L'entreprise vient de décrocher les marchés de deux villes en Russie, Nizhny Novgorod début juillet et Mourmansk en août. Elle avait ouvert Lima au Pérou en 2019 ou encore étendu les marchés d'Helsinki et de Moscou.

Le boom du vélo

Alors que la question des mobilités douces se posent partout et que le vélo connaît un fort regain d'intérêt, la PME est aux premiers rangs pour observer le phénomène.

« On voit les choses bouger au travers de l'évolutions des demandes des collectivités, confirme Benoit Yameundjeu. En effet, on observe une explosion des demandes de vélos partagés partout dans le monde. On voit aussi que sur les appels d'offres, il y a des projets de vélos partagés plus ambitieux, avec des flottes plus importantes, des demandes de vélos électriques. Beaucoup de villes souhaitent encadrer cette explosion de la micro-mobilité et avoir la main sur les systèmes de vélos partagés, qui sont une des briques des transports de la ville, de manière à mieux les intégrer aux autres dispositifs. »

Alors que l'entreprise avait réalisé un chiffre d'affaires de 45 M€ en 2019, Benoit Yameundjeu annonce que « le chiffre d'affaires 2020 sera probablement en baisse, notamment du fait du décalage de certains projets sur le 1e semestre », et que des recrutements sont en cours sur la R&D et le développement commercial.

Cécile Chaigneau

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