Créée en 1958 et dirigée par la seconde génération Aguilhon (Antoine, Julien et Fanny), La Botte Gardiane est spécialisée dans la fabrication de chaussures et articles en cuir : 220 modèles de bottes, bottines, sandales et chaussures, proposés avec un service de personnalisation et de sur-mesure.

La crise du coronavirus est aujourd'hui l'accélérateur de mise en œuvre d'une stratégie commerciale digitale.

En 2018, La Botte Gardiane misait sur la vente directe, investissant près de 1,5 millions d'euros dans des nouveaux locaux à Aigues-Vives (30) pour doubler sa surface (soit 1.180 m2, dont un atelier et une boutique).

Après avoir investi Paris, en 2012 et 2014, avec deux boutiques, elle en ouvrait une troisième, cette fois à Lyon. La marque cherchait alors de la visibilité... Elle avait même ouvert les portes de son atelier gardois aux visiteurs, histoire de dévoiler la fabrication de haute technicité de ses produits. Mais les deux confinements liés au Covid ont eu raison de ce tourisme d'entreprise.

Deux boutiques mises en vente

« Les visites d'atelier ont été divisées par deux, nous avons d'ailleurs dû annuler nos journées portes ouvertes, raconte Julien Aguilhon, cogérant. Mais dès le printemps 2020, nous nous sommes lancés dans la réalisation de masques, ce qui a permis de générer de l'activité pour les 22 salariés et d'amortir l'impact de la crise sanitaire. Nous accusons une perte globale de 15%. »

La société a enregistré en 2020 un chiffre d'affaires consolidé de 1,8 millions d'euros, dont 1,3 million d'euros sur l'atelier gardois.

Mais la problématique se pose aujourd'hui sur la fréquentation des boutiques (entités juridiques à part, détenues à parts égales par la fratrie) qui ont vu leur chiffre d'affaires s'effondrer : - 32% sur la boutique du Marais et - 25% sur celle de la rue de Charonne à Paris, et - 38% sur la boutique de Lyon.

« Sur le Marais par exemple, les loyers sont de l'ordre de 20.000 € par trimestre, explique Julien Aguilhon. C'est beaucoup trop aujourd'hui, compte tenu de l'absence de la clientèle étrangère. Les bailleurs ne voulant pas baisser leurs tarifs, nous avons décidé de mettre en vente les boutiques de la rue de Charonne à Paris et de Lyon. »

Co-branding 2021 avec Bonpoint et De bonne Facture

Pour garder son indépendance, La Botte Gardiane a toujours privilégié les circuits courts. Si elle a été tentée, en 2004, par de la marque blanche - pour Céline - qui lui a apporté une belle visibilité (avec notamment Claudia Schiffer arborant ses bottes de gardian), elle s'est vite affranchie des intermédiaires, trop gourmands.

Malgré une notoriété internationale, elle exporte seulement 20% de sa production, notamment vers les Etats-Unis, le Japon, le Moyen-Orient et l'Europe, soit à peine une centaine de revendeurs répartis sur les cinq continents.

« Nous sommes conscients d'avoir un fort levier à l'international, estime Julien Aguilhon. Mais produire plus, c'est aussi polluer plus. Nous préférons vendre mieux. »

C'est pourquoi, afin d'accroître sa visibilité, la marque, reconnue pour son savoir-faire et ses produits "made in France", préfère jouer la carte de la collaboration avec des créateurs de renom : Vanessa Bruno (2015), Jérôme Dreyfus (2016), Agnès.B (2019). Cet été, une collaboration est prévue avec la marque pour enfants Bonpoint et celle pour hommes De Bonne Facture.

« En général, ces maisons nous contactent, sélectionnent un modèle et lui apportent une identité supplémentaire, confie le cogérant, même s'il avoue la difficulté à quantifier le retour d'expérience. De Bonne Facture a choisi la sandale homme Jérôme en veau tanné végétal. Pour Bonpoint, nous avons développé une ceinture, un sac et une demi-botte gardian. Ce co-branding accroît notre notoriété et permet de partager un réseau de clients. »

« La crise sanitaire a été un accélérateur de réflexion »

Plus facile en revanche de mesurer l'impact direct des ventes internet dont les chiffres ont bondi cette année : + 78%, soit 24% du chiffre d'affaires global. Et ce malgré un site très perfectible que La Botte Gardiane affirme vouloir moderniser depuis des années.

« C'est vrai que nous nous sommes un peu endormis, admet le cogérant. Notre histoire digitale avait pourtant commencé en 2002, mais elle n'était pas notre priorité. Nous avons privilégié les boutiques pour rassurer nos clients, leur permettre de s'imprégner de notre savoir-faire, du cuir, du chaussant... Difficile de transmettre cela sur un site en ligne. Mais la crise sanitaire a été un accélérateur de réflexion. »

Pour optimiser cette expérience digitale, La Botte Gardiane s'est adjoint les services de Xavier Schreder, partenaire Shopify. Ensemble, ils travaillent sur un site plus ergonomique, plus intuitif, avec vidéos produits, parcours client amélioré, configurateur pour personnaliser les modèles, etc.

« Nous repartons à zéro avec l'idée de transmettre les valeurs éthiques de notre marque, annonce Julien Aguilhon. Nous allons également repositionner nos produits en nous orientant sur nos best-sellers : de 180 modèles nous allons passer à 80 modèles - hiver et été - pouvant être déclinés presqu'à l'infini. »

Avec ce nouveau site web (50.000 euros d'investissement), qui devrait être opérationnel avant l'été 2021, l'entreprise espère doubler ses ventes sur ce canal. Dans la foulée, La Botte Gardiane envisage de recruter deux ou trois personnes pour l'atelier de production.