ICC : comment la Grande Fabrique de l’image consacre Montpellier

L’appel à projet de La Grande Fabrique de l’image, ce sont 68 projets retenus pour un investissement de 350 millions d’euros. Un gros coup d’accélération pour la filière française des industries culturelles et créatives (ICC). Sur les 68 lauréats, onze sont localisés en Occitanie, dont huit sur l’aire urbaine montpelliéraine. Une consécration prometteuse pour ce territoire, qui fait des ICC un fer de lance économique.
Cécile Chaigneau
Très prometteuses en termes d'emplois et de retombées économiques, les industries culturelles et créatives (ICC) sont l'un des axes de développement du territoire montpelliérain, rendu notamment célèbre par le tournage de la série Un si grand soleil (photo) dans les studios de France TV, à Vendargues.
Très prometteuses en termes d'emplois et de retombées économiques, les industries culturelles et créatives (ICC) sont l'un des axes de développement du territoire montpelliérain, rendu notamment célèbre par le tournage de la série Un si grand soleil (photo) dans les studios de France TV, à Vendargues. (Crédits : © Fabien MALOT – FTV)

L'appel à projet "La Grande Fabrique de l'image" a retenu 68 projets, dont 11 en Occitanie. Sur les onze lauréats*, huit sont à Montpellier ou sur son aire urbaine... C'est durant le festival de Cannes, le 19 mai, que la ministre de la Culture Rima Abdul-Malak a présenté les lauréats de La Grande Fabrique de l'image, destiné à booster le cinéma hexagonal et à faire de la France le leader européen des tournages et de la production numérique.

Lancé en 2022, cet appel à projet s'inscrit dans le plan d'investissement d'avenir France 2030 (doté de 54 milliards d'euros), qui consacre une enveloppe d'un milliard d'euros à la culture. "La Grande Fabrique de l'image" est dotée d'un budget de 350 millions d'euros, afin « d'accompagner les forces vives du secteur à franchir un changement d'échelle au profit de la création française, et faire de la France un leader des tournages et de la production numérique ». Mais les enveloppes attribuées à chacun des 68 lauréats ne seront connues qu'en octobre prochain...

« Le territoire est repéré »

En attendant, le territoire montpelliérain ne boude pas sa joie. A commencer par le président de la Métropole de Montpellier, Michaël Delafosse.

« Le soutien de huit projets sur notre territoire est une vraie reconnaissance de notre savoir-faire et de la dynamique de la filière montpelliéraine des ICC (industries culturelles et créatives, NDLR), clame-t-il. Entreprises, écoles, associations, développent des projets ambitieux, dans un état d'esprit responsable, ouvert et constructif. Autant de talents que la Métropole accompagne au quotidien et qui savent unir leurs forces pour s'engager vers des destins créatifs partagés. La Grande Fabrique de l'image permet d'afficher au grand jour cette dynamique locale, le visage d'un des développements économiques majeurs du territoire de Montpellier... L'aire urbaine de Montpellier est le territoire qui a le plus de projets lauréats et, comme me l'a dit le président du CNC (Centre national du cinéma et de l'image animée, NDLR), cela confirme que ce territoire est très repéré, avec une réelle capacité à faire. »

La Grande Fabrique de l'Image vient donc amplifier l'ambition de la Métropole de Montpellier dans sa stratégie d'accompagnement des acteurs des ICC de son territoire : portage foncier et émergence de la Cité Créative (quartier dédié aux ICC), financement de la création via un fonds d'aide, soutien à la création d'entreprises (Montpellier Game Lab, future pépinière ICC et incubation thématique), structuration et animation de la filière. Michaël Delafosse enfonce le clou et annonce que « la Métropole va continuer à se staffer pour accompagner cette identification de Montpellier sur les ICC ».

Deux studios de tournages labellisés

La Grande Fabrique de l'image concerne trois types de structures : les studios de tournage, les studios numériques, les organismes de formation, la ministre de la Culture ayant affirmé que « la France a besoin de développer des pôles forts pour les tournages, la post production et la formation ».

Parmi les projets montpelliérains lauréats, deux portent sur les tournages : celui de France TV Studio, déjà implanté à Vendargues près de Montpellier et qui souhaite s'étendre en créant 4.000 m2 de plateaux supplémentaires, et le projet Pics Studio, porté par l'aménageur montpelliérain GGL et le promoteur immobilier SPAG et qui s'implantera sur trois sites de l'aire urbaine montpelliéraine (Saint-Gély-du-Fesc, Fabrègues et Pérols).

 « Le projet de France TV Studios est un projet d'extension pour pouvoir accueillir des projets de France TV mais aussi d'autres productions, explique Olivier Roelens, responsable des productions, fictions et feuilletons chez France Télévisions et producteur exécutif de la série quotidienne Un si grand soleil. Nous avons déjà entamé cette commercialisation de nos outils mais nous souhaitons aller plus loin. »

L'opérateur public compte bien ainsi attirer également le cinéma. A ce jour, un premier long métrage, Les Complices, a tourné quelques séquences dans ses studios. Olivier Roelens ne précise pas l'enveloppe budgétaire affiliée à cette extension, qui devrait être opérationnelle en 2025. Il ajoute que « le projet est plus large : nous discutons avec notre partenaire, la foncière Proudreed, qui dispose d'un vaste foncier de 11 ha autour de nos studios à Vendargues, où aménager une sorte de hub pour accueillir d'autres acteurs des ICC, ce qui serait une vraie force d'avoir des fournisseurs et prestataires au même endroit ».

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Être visibles

Du côté de Pics Studio, ambitieux projet (185 millions d'euros) de création d'un pôle cinéma, cette labellisation de la Grande Fabrique de l'image est évidemment aussi une bonne nouvelle. Le projet, qui était annoncé avec un financement 100% par des fonds privés, recevra finalement une subvention publique.

« C'est la reconnaissance de quatre années de travail, souligne Alain Guiraudon, fondateur associé de GGL Groupe et président de Pics Studio. Pics Studio, ce sera 16.800 m2 de plateaux de tournage à Saint-Gély et Fabrègues, un campus avec des écoles et 300 étudiants, et des écolodges pour accueillir les équipes de tournage à Pérols. Ce sera aussi 2.000 emplois directs et indirects. »

Il indique qu'un permis de construire a été accordé à Pérols et qu'un autre vient d'être déposé à Saint-Gély, tandis que le dossier de reconversion de friches industrielles à Fabrègues est en cours. L'achèvement des infrastructures est également annoncé pour 2025.

Deux studios de tournage d'envergure sur un même territoire : concurrence ou complémentarité ? Olivier Roelens répond que « plus on a d'acteurs forts sur un territoire, plus on a une offre intéressante, et plus on est visibles dans la mondialisation des tournages ».

« Ça va créer une appétence autour de Montpellier, ajoute Pierre-Marie Boyé, directeur des productions chez Les Tontons Truqueurs (spécialisés dans les effets spéciaux numériques), dont France TV Studio est actionnaire depuis 2020. La création de Pics Studio renforcera l'écosystème montpelliérain, qui est doté d'équipes de techniciens conséquentes et d'entreprises qui s'installent comme les Tontons Truqueurs mais aussi Mathematic ou The Yard. »

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Animation, jeux vidéo, formation

Les autres lauréats montpelliérains de La Grande Fabrique de l'image sont les studios d'animation Mathematic et The Yard (fondé en 2014 par Laurens Erhmann, César 2022 des meilleurs effets visuels pour Notre- Dame Brûle de Jean-Jacques Annaud, The Yard s'est aussi imposé avec des références comme Indiana Jones et le Cadran de la destinée, The Gray Man ou John Wick 4), le studio de jeux vidéo The Game Bakers (doublement des lignes de production et positionnement stratégique sur des jeux AAA), l'école du cinéma et de la télévision Travelling, installée à Montpellier (formant des techniciens de la mise en scène, de la production, du plateau et de la post-production), et les écoles de formation numérique Audio Workshop (création du premier centre de formation aux métiers du son pour l'image et le jeu vidéo) et ARTFX (école supérieure internationale des métiers du cinéma, des effets spéciaux, de l'animation et du jeu vidéo, basée à Montpellier mais aussi à Lille-Plaine Images et Enghien-les-Bains).

« Aujourd'hui plus de 50% de nos anciens étudiants travaillent à l'étranger dans des studios internationaux, déclare Simon Vanesse, directeur général d'ARTFX. En plus de nous aider à consolider notre travail pédagogique, ce plan soutient toute la chaîne de production et aidera ainsi à localiser ces emplois en France et garder le savoir-faire de nos étudiants sur le territoire. »

L'école souhaite notamment activer le développement de 24, « une école qui propose un enseignement du cinéma enrichi et renouvelé, intégrant de nouveaux formats d'écritures et les dernières avancées technologiques », sur le futur campus de Pics Studio.

Un 9e lauréat vient allonger la liste des bénéficiaires retenus par La Grande Fabrique de l'image : le studio Fortiche Production (connu pour le jeu vidéol Arcane), installé (et labellisé) à Paris mais aussi à Montpellier où l'antenne est pilotée par Alexis Wanneroy, ancien du géant américain Dreamworks.

Des emplois et des retombées économiques

Selon les chiffres donnés par le ministère de la Culture, l'année 2022 a confirmé la dynamique française de la filière du cinéma et de l'audiovisuel : « 2,4 milliards d'euros investis dans la production française, près de 600 millions d'euros de dépenses pour les tournages internationaux (+ 48 % par rapport à 2021), une croissance du marché français du jeu vidéo de 4% par an en moyenne depuis 2017 (sur un marché mondial qui atteint 170 milliards d'euros en 2022) » ou encore « 700 millions d'euros annuels de soutien par le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) à l'ensemble des maillons de la filière ».

En Occitanie, « la Région a mis 5 millions d'euros pour soutenir les ICC », rappelle Marie-Thérèse Mercier, conseillère régionale. Elle rappelle les ratios en termes de retombées économiques : « 1 euro investi dans la filière, 8 euros de retombées économiques... et de la notoriété pour les territoires où sont tournés les films ».

La filière des ICC, ce sont aussi des emplois à venir, « 2.000 en vue » selon Michaël Delafosse.

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* Les trois autres projets d'Occitanie sont le studio d'animation TAT Studio et l'école DEFI Production à Toulouse, et IDEM Formation à Perpignan.

La Grande Fabrique de l'image en chiffres

  • 68 projets soutenus : 11 studios de tournage, 12 studios d'animation, 6 studios de jeux vidéo, 5 studios d'effets spéciaux, et 34 organismes de formation.
  • Les grands objectifs : doubler la surface de plateaux de tournage pour atteindre 153.000 m2 et quasi-quadrupler la surface des décors extérieurs permanents pour atteindre 187.000 m2 à horizon 2030.
  • Un bond, si la totalité des projets vont à leur terme, qui placerait la France en tête de l'Europe continentale, et juste derrière le Royaume-Uni.

Cécile Chaigneau

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