Futura Gaïa lève 2,5 M€ pour développer ses fermes agricoles verticales

Développer l’agriculture verticale de précision en sol vivant, utilisant terreau et environnement climatique contrôlé. Futura Gaïa développe un nouveau mode de production pour le monde agricole. Le 18 mai, la start-up gardoise annonce avoir bouclé une première levée de fonds de 2,5 M€. Sa première ferme-pilote sera installée cet automne à Tarascon.
Cécile Chaigneau
Dans ses fermes-verticales, Futura Gaïa fait pousser des cultures installées sur des roues.
Dans ses fermes-verticales, Futura Gaïa fait pousser des cultures installées sur des roues. (Crédits : Futura Gaia)

Futura Gaïa est née en avril 2019 à Rodilhan (30) dans un vieux mas agricole. A l'origine, Pascal Thomas et Nicolas Ceccaldi. Le premier est un Nîmois formé en école d'ingénieurs en tech dont le parcours l'a mené de chez Orange au Pages Jaunes. Le second a un profil de commercial et d'entrepreneur, ayant notamment passé dix ans chez Apple.

C'est en observant la culture de fraises en biostimulation au Canada, où sa fille travaille, que Pascal Thomas s'intéresse au modèle de culture consistant à faire pousser des plantes en intérieur et en lumière artificielle, sans pesticides. Ce qui, assure-t-il, « donne des produits avec de très bonnes qualités gustatives et nutritives ».

Sur d'anciennes friches industrielles

Les deux hommes embarquent dans l'aventure la fille de Pascal Thomas, ingénieur en biotechnologie, ainsi qu'un docteur en agronomie. Ils mettent au point un système d'agriculture verticale de précision, en sol vivant utilisant du terreau, et en environnement climatique contrôlé, se traduisant par des fermes agricoles verticales périurbaines.

« L'humanité aura à traiter la surface disponible pour à la fois loger les gens et assurer une production agricole à même de les nourrir, déclare Pascal Thomas. Notre projet prévoit donc de récupérer des bâtiments d'anciennes friches industrielles pour y installer nos fermes. Les plantes sont sur une roue de 48 bacs remplis de terreau et troués au fond. Une ligne d'arrosage en haut de la roue permet d'arroser la plante quand elle a la tête en bas, ce qui permet au système racinaire de facilement se développer. On calcule par ordinateur la quantité de nutriments et d'eau nécessaire à chaque plante et on crée artificiellement du stress pour la plante fabrique des protéines ou des caractéristiques mécaniques et gustatives intéressantes. C'est un dispositif économe en eau puisqu'on ne met que ce que la plante va consommer. Par exemple, pour faire 1 kg de salade, on utilise 9,6 l. au lieu de 150 à 250 l. en terre, soit 90 à 95 % d'économie d'eau. Et on n'utilise ni pesticides ni fongicides. »

Un mode de production qui convient aussi bien aux fraises, aux salades, à la plupart des herbes aromatiques ou encore aux fleurs, et qui permet la même productivité qu'en pleine terre, assure Pascal Thomas : « Ce système permet d'enchaîner les cycles de culture toute l'année, sans aléas climatique ».

Complémentaires de l'agriculture de plein champ

Cette solution fait-elle frontalement concurrence au monde agricole ?

« Nous sommes complémentaires de l'agriculture de plein champ, répond le cofondateur. Nous discutons beaucoup avec le monde agricole. Ils ont envie d'innover... Notre objectif est de proposer aux agriculteurs des systèmes alternatifs, qui leur permettraient notamment de réserver les terres aux productions qui nécessitent une culture en pleine terre. Le modèle, c'est que des investisseurs financent l'installation des fermes verticales, nous fournissons aux agriculteurs la technologie pour qu'ils les exploitent, ainsi que les débouchés commerciaux... Le responsable de la filière plantes à parfum de la région PACA va venir nous voir et nous avons aussi entamé des discussions avec une dizaine d'agriculteurs du côté d'Amiens, où le projet pourrait être d'installer des fermes verticales dans d'anciens locaux comme ceux de Goodyear ou de Whirlpool. »

Les débouchés commerciaux visés sont les grandes surfaces alimentaires via des circuits courts, la restauration hors domicile (entreprises, hôpitaux, écoles, pour lesquels les appels d'offres imposent des circuits courts et une sécurisation de la chaîne d'approvisionnement), mais aussi le secteur cosmétique qui a lui aussi besoin de sécuriser ses volumes et la qualité des plantes.

« Cette crise a renforcé la conviction des investisseurs »

Démarrée en septembre 2019, la première levée de fonds opérée par Futura Gaïa n'aura pas été empêchée par la crise du coronavirus, puisqu'elle a abouti le 27 mars dernier : 2,5 M€ auprès de Sofimac Innovation (société de gestion indépendante dédiée à l'investissement technologique et innovant), SOFILARO (société d'investissement filiale des Caisses régionales de Crédit Agricole du Languedoc et de Sud Méditerranée), Région Sud Investissement (fonds de co-investissement créé́ par la Région Sud), Caap Création (filiale du Crédit Agricole Alpes Provence), Occipac (holding d'investissement pour les PME de croissance de la région Sud), un family office (qui ne veut pas être cité) et l'investisseur Alain-François Raymond.

« Cette crise sanitaire n'a fait que renforcer les convictions de nos investisseurs, souligne Pascal Thomas. Notre projet est une réponse aux enjeux de santé publique, d'environnement et d'adaptation aux bouleversements climatiques auxquels le monde agricole est confronté, proposant un moyen de faire face à une demande croissante en produits sans pesticides, accessibles en circuit court au plus grand nombre. »

Conserver les cueillettes par des humains

Objectif de la levée de fonds : déployer une ferme-pilote de 50 systèmes de culture (50 roues) à Tarascon (30) dans d'anciens entrepôt logistiques loués. Futura Gaïa y fera pousser des fraises, des salades et des herbes aromatiques, et prévoit de passer progressivement à 200 machines.

« Cela nous permettra d'avoir des éléments de prix de revient et de vérifier l'automatisation du processus, car nous voulons robotiser le déplacement des machines mais conserver les cueillettes ou récoltes par des humains », ajoute le dirigeant.

Les fonds serviront également à étendre la capacité du laboratoire de R&D : « Nous disposons aujourd'hui de 2 zones climatiques et nous allons en créer 4 nouvelles, afin de faire des recherches plus poussées en agronomie. Ces prestations de recherche nous sont très demandées ».

L'entreprise, qui emploie aujourd'hui dix personnes, prévoit de recruter deux ingénieurs agronomes (en cours), mais aussi des compétences en tech et en automatisation.

Cécile Chaigneau

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Commentaire 1
à écrit le 18/05/2020 à 19:50
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Ah le bonheur ultralibéral : des fermes sans agriculteurs (des vrais, qui se lèvent tôt) !

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