L’inquiétude des vignerons du Languedoc-Roussillon qui exportent en Russie et en Ukraine

ENQUÊTE (1/2) - Les volumes de vins exportés en Russie et en Ukraine sont très faibles à l’échelle de la région Languedoc-Roussillon. Mais certains vignerons travaillaient ces marchés émergents dans l’espoir d’y développer leur activité. Ils sont inquiets.
Françoise Antech et son fils Baptise, qui dirigent la Maison Antech-Limoux dans l'Aude, voient leur développement en Russie et en Ukraine interrompu par le conflit en Ukraine.
Françoise Antech et son fils Baptise, qui dirigent la Maison Antech-Limoux dans l'Aude, voient leur développement en Russie et en Ukraine interrompu par le conflit en Ukraine. (Crédits : DR)

Si on s'en tient aux statistiques douanières, la Russie et l'Ukraine pèsent peu dans les exportations de vins régionaux : 13.000 hl de vins tranquilles ont été exportés en 2021 dans ces deux pays pour un chiffre d'affaires de 3,5 millions d'euros. C'est à peine 0,5% des exportations de vins du Languedoc-Roussillon... Les vins effervescents sont un peu plus présents sur ces marchés.

« La Russie est en plein développement : en trois ans, nos exportations ont progressé de 30% pour atteindre 300.000 cols en 2021, soit 5% du volume total de nos exportations », indique Marlène Tisseire, directrice du syndicat des vins AOC Limoux.

Des marchés qui commençaient à décoller

Françoise Antech, qui dirige la maison éponyme à Limoux, élaborateur historique de Crémant et Blanquette de Limoux, confirme l'émergence des marchés russe et ukrainien : « Pour le moment, nous n'exportons pas des volumes énormes : environ 30.000 cols par an, soit 4% de notre chiffre d'affaires. Mais nos ventes étaient en progression de 30% sur la Russie et en plein développement sur l'Ukraine puisque nous avions démarré en 2021. Nos importateurs ukrainiens sont passés nous voir à Wine Paris, juste avant le début du conflit, ils étaient préoccupés mais sans plus... Depuis, malgré nos mails, nous n'avons plus de nouvelles. Je suis très inquiète. Nous avons également reçu des messages de désespoir de certains prospects. Nous devions aller en Russie en avril. Pour le moment toute activité a cessé, nous avons envoyé un mot de soutien aux équipes qui travaillent avec nous depuis plusieurs années. Nos clients biélorusse vont aussi souffrir de cette situation puisque leur couverture financière a été bloquée ».

Autre gros opérateur à Limoux, Sieur d'Arques exporte près de 300.000 cols par an en Russie, selon les années.

« La Russie est notre 5ème client export. L'an dernier, nous avions fortement progressé. Pour cette année, cela semble compromis », confie Gabi Van Dael, chef de zone export.

25.000 cols par an pour la Russie, en stand-by

Producteur de vins tranquilles à Pennautier dans l'Aude, le château Auzias subit aussi les conséquences de cette crise ukrainienne.

« Nous étions sur le point de finaliser un énorme marché avec la Russie, confie Bastien Perrenoud, directeur général de la propriété, qui commercialise 800.000 bouteilles par an. Depuis quatre ans, nous recherchons activement des importateurs dans ce pays. Il y a un an, nous étions sur le point de concrétiser avec un partenaire mais avec la crise du Covid, ce projet a été mis en stand-by. Nous avons relancé ce partenariat le 10 février dernier, lors d'un salon sur place et avons décroché une très belle commande 25.000 cols par mois pendant un an. Le premier container devait partir fin mars ou début avril. Cette guerre douche à nouveau nos espoirs de nous implanter en Russie. »

L'Ukraine, un marché très qualitatif

A plus petite échelle, le Château Coupe-Roses, en Minervois, va également pâtir de cette crise ukrainienne. Le domaine héraultais, qui exporte 70% de sa production (85% avant le Covid), expédie depuis dix ans ses vins en Ukraine.

« Nous avons démarré par une palette et peu à peu les volumes ont progressé, témoigne Françoise Frissant, la vigneronne. C'est un marché très qualitatif, nous y vendons nos hauts de gamme. Aujourd'hui, c'est notre troisième client export derrière le Canada et les USA. Il représente 6% de notre chiffre d'affaires. J'ai rencontré mes deux importatrices à Wine Paris, elles ne croyaient pas à la guerre. J'avais pris mon billet pour aller à Kiev le 27 février pour ma visite annuelle. C'est tombé à l'eau bien sûr... »

 Après la Taxe Trump, le Brexit, la crise Covid, une fois encore, les vignerons doivent composer avec le très mouvant contexte géopolitique mondial.

Lire le volet 2 de cette série ici : Guerre en Ukraine : dans les Corbières, le désarroi du Château Saint-Louis, propriété d'un Russe

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