Promotion immobilière : pourquoi l’offre s’éloigne de la demande à Montpellier

A quelques semaines des élections municipales, le bilan 2019 du marché immobilier régional se regarde à la loupe. Certains points noirs continuent de scléroser le marché du logement neuf à Montpellier : des mises en vente qui se raréfient et font chuter le niveau de stock théorique toujours plus bas, et des prix qui grimpent de manière inversement proportionnelle. L’offre s’éloigne ainsi dangereusement de la demande…
Cécile Chaigneau
Le quartier des Grisettes, à Montpellier.
Le quartier des Grisettes, à Montpellier. (Crédits : Christine Caville)

En France métropolitaine, 2019 se place en 3e position des meilleures années enregistrées sur les 25 dernières années pour l'activité de la promotion immobilière, malgré des indicateurs tous à la baisse (- 7 % sur les ventes au détail, - 21 % sur les mises en ventes, - 12 % sur l'offre, soit un stock théorique de 9,9 mois). Le cabinet Adéquation, qui compile chaque année les chiffres de l'immobilier neuf sur l'ex-Languedoc-Roussillon, y voit les fruits d'une bonne tenue du marché francilien et de l'appétence de la demande sur les marchés métropolitains.

Évidemment, les situations sont contrastées. La Métropole de Montpellier est toutefois celle où l'offre commerciale est tombée le plus bas, à 1 672 logements, soit 7,6 mois de stock théorique (- 17 % vs 2018 et même - 29 % vs 2017). Viennent ensuite la métropole de Lyon (7,8 mois), Rennes Métropole (8 mois), Nantes Métropole (8,3 mois) ou l'aire urbaine de Toulouse (9,3 mois). C'est à Strasbourg que l'offre commerciale reste la plus important, avec 13,8 mois de perspectives...

Course à l'échalote sur les valeurs foncières

Si les promoteurs immobiliers avaient connu une parenthèse de soulagement au 3e trimestre 2019 grâce à un rééquilibrage de la baisse des mises en vente, elle aura été de courte durée : le bilan de l'année entière révèle un effondrement des mises en vente pour la 2e année consécutive, soit une baisse cumulée de près de 40 %. En un an, le marché de la métropole montpelliéraine a été alimenté par 2 465 logements neufs (dont 32 % en secteur aménagé), contre 3 141 en 2018 et 4 000 en 2017.

« On est sur un marché de pénurie depuis deux ans maintenant, ce qui génère une frustration chez les promoteurs, mais surtout une hausse des prix et des difficultés à répondre à la demande en logements abordables notamment, commente Yohan Breuil, directeur associé chez Adéquation. Les seuls à qui cela profite, ce sont les propriétaires fonciers. Ils sont harcelés par les opérateurs, ils en jouent et c'est la course à l'échalote sur les valeurs ! »

Sonnette d'alarme sur le foncier solidaire

Le marché est toutefois sauvé par la bonne dynamique de la demande. Malgré une baisse de 16 % par rapport à 2018, les 2 626 ventes au détail réalisées en 2019 sont « satisfaisantes » et résultent notamment « des taux bas, de l'attractivité du dispositif Pinel, d'indicateurs économiques encourageants et du fait que la pierre, ancrée culturellement, reste intéressante par rapport à d'autres placements financiers ».

« Cette baisse des ventes est-elle si grave ?, interroge alors Yohan Breuil. Si on s'en réfère au PLH (programme local de l'habitat, ndlr), qui indique que la promotion immobilière doit produire 2 900 à 3 000 logements libres par an, on répond aux attentes. Sauf que les besoins nécessitent d'avoir une quote-part importante en logements abordables, de l'ordre de 900 par an. Or on ne fait que 379 ventes en accession aidée en 2019, soit 2,5 fois moins qu'attendu... Cela pose donc question, surtout sur un marché où les prix sont très élevés. Il y a une urgence sur le dispositif PSLA (prêt social location-accession, ndlr), sur lequel on a fait dix fois moins que ce qui était envisagé ! »

L'analyste tire la sonnette d'alarme sur l'absence, à Montpellier, du dispositif d'office foncier solidaire (OFS) : « Le bail solidaire peut être une voie de sortie, or Montpellier, qui était la première à mettre en place des dispositifs d'aide à l'accession abordable, risque d'être la dernière à se doter d'un OFS en France ».

4 600 €/m2 attendus en 2020

Car les prix du marché métropolitain restent l'autre point noir de ce bilan. A 4 405 €/m2 (en collectif avec parking), Adéquation annonce une hausse de 7 % en deux ans, et de 12 % en cinq ans.

« Les prix montent sur tous les territoires métropolitains en France, souligne Yohan Breuil. Et il n'y a aucune raison que ça baisse en 2020... Suivant les projections que l'on fait compte tenu des dernières mises en vente, des acquisitions foncières des six derniers mois et des coûts de construction qui augmentent, on devrait atteindre les 4 600 €/m2 sur la Métropole montpelliéraine, soit 200 € supplémentaires par m2... »

Parce que ce niveau de prix entraîne une perte de rentabilité des investissements locatifs et une baisse de solvabilité des acquéreurs, mais aussi parce que l'offre se raréfie, ces investisseurs ont marqué le pas en 2019. Les ventes dans cette catégorie restent majoritaires (65 %, avec 1 713 ventes), mais diminuent de 17 % par rapport à 2018.

Bonne surprise à Nîmes et Perpignan

Les marchés secondaires peuvent-ils constituer des relais de croissance ? En 2019, ils ont représenté 42 % des ventes en 2019, soit plus de 2 000 ventes.

« On a fini d'enterrer les zones B2 sur Narbonne et Béziers (154 et 197 ventes au détail, soit une baisse de 44 et 75 %, NDLR), regrette Yohan Breuil. Deux marchés intéressants se structurent : Perpignan et Nîmes, qui font respectivement 658 et 636 ventes. Nous préconisons un point de vigilance : ne pas tuer ces marchés dans l'œuf car les niveaux de prix auraient tendance à augmenter. Avec aujourd'hui plus de 1 000 € d'écart avec les prix à Montpellier, cela permet de servir la demande. A Sète, c'est la déception (372 ventes, - 34 %, ndlr) : le marché est peu alimenté, on ne sait pas pourquoi... »

L'année 2020 pourrait être sans surprise et le marché continuer de se contracter, à l'exception de Perpignan et Nîmes. Reste que 2020 est une année d'élections, qui plus est municipales. Or, comme le rappelle Yohan Breuil, « les années électorales ne sont jamais bonnes ».

Cécile Chaigneau

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