Logements sociaux : quelles sont les communes encore carencées dans l’Hérault et la Haute-Garonne ?

Le logement, comme le pouvoir d’achat, est une thématique de campagne des présidentielles. En Occitanie, c’est historiquement le Languedoc-Roussillon qui porte les plus gros enjeux en matière de logements sociaux. La Tribune a récupéré les derniers chiffres connus des deux départements locomotives de la région, l’Hérault et la Haute-Garonne. Etat des lieux.
Cécile Chaigneau
Les communes de l'Hérault et de la Haute-Garonne défaillantes en logements sociaux se sont vues imputer des pénalités respectives de 5,8 et 1,05 millions d'euros au titre de l'année 2020.
Les communes de l'Hérault et de la Haute-Garonne défaillantes en logements sociaux se sont vues imputer des pénalités respectives de 5,8 et 1,05 millions d'euros au titre de l'année 2020. (Crédits : DR)

La question du logement, et notamment du logement social, aura sa place dans la campagne présidentielle. La Fondation Abbé Pierre a déjà mis le sujet sur la table lors de son rapport annuel sur le mal-logement fin janvier, dénonçant plus de quatre millions de mal-logés et quatorze millions de personnes fragilisées par la crise du logement. Le 8 février, c'est un collectif de 59 élus locaux, issus de la gauche, qui venait dire, dans une tribune au journal Le Monde, son indignation face à l'aggravation de la crise du logement. L'entrée de cette thématique dans le débat, ce sont aussi les propos du candidat Eric Zemmour sur les logements sociaux qui ont déclenché la colère (et un dépôt de plainte) du mouvement HLM en France.

La loi SRU (loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain, votée en 2000) impose un quota de 20 à 25% logements sociaux dans les villes de plus de 3.500 habitants d'une unité urbaine de plus de 50.000 habitants. Les communes SRU déficitaires sont soumises à des objectifs de rattrapage évalués tous les trois ans par l'État. En 2017, au titre du bilan triennal 2014-2016 de la loi SRU, 649 des 1.152 communes françaises soumises au dispositif n'avaient pas atteint le niveau de production fixé par la loi, et 269 étaient in fine considérées comme carencées. Sur ces 269 communes, 33 se trouvaient en Occitanie, dont 30 sur l'ex-Languedoc-Roussillon.

Alors qu'on ne connait pas encore les chiffres du bilan triennal 2020-2022, où en était-on en Occitanie en 2020, au titre du bilan 2017-2019 ?

« Il existe encore plus d'une centaine de communes déficitaires en logements sociaux en Occitanie et certaines l'assument et paient l'amende », regrettait il y a quelques jours Michel Calvo, président d'Occitanie Méditerranée Habitat (29 organismes d'habitat social, 126.500 logements sociaux qui hébergent 400.000 personnes sur le périmètre de l'ex-Languedoc-Roussillon) et président de l'association régionale Habitat Social en Occitanie (qui est en train de rassembler des deux associations HLM préexistantes sur les territoires des ex-régions Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées), interviewé par La Tribune.

La Tribune a récupéré les chiffres des deux départements locomotives de la région, l'Hérault et la Haute-Garonne.

25.979 logements sociaux manquants

Selon les dernières données publiées par la DDTM (direction départementale des territoires et de la mer) en 2020, le baromètre de la mixité sociale dans l'Hérault fait état de 69.380 logements locatifs sociaux (LLS, 60.777 en 2017). Soit un taux de 18,15% de LLS (16,8% en 2017) et 25.979 LLS manquants (29.695 en 2017).

La DDTM souligne ainsi que « malgré une croissance annuelle du parc de LLS de 4,6% sur dix ans, le nombre de LLS manquants augmente du fait de la hausse des obligations SRU (obligation de 20% de LLS avant 2013 puis 25% sur l'ensemble des communes SRU de l'Hérault en 2017) et du nombre plus important de communes entrant dans le dispositif (en raison de leur croissance démographique, NDLR) ».

Dans ce département, 46 communes sont soumises à l'obligation d'atteindre 25% de logements sociaux parmi les résidences principales, l'Hérault étant le seul département d'Occitanie à avoir un taux aussi élevé (avec une partie du Gard).

Parmi les bons élèves (plus de 20% de logements sociaux) : Montpellier (où il manque quand même encore 1.165 logements), Sète (1.205) et Béziers (1.270). La ville de Montpellier est la plus avancée, avec un taux de 24%, les services de la DDTM 34 annonçant qu'elle devrait dépasser les 25% en 2025.

Dans l'Hérault, 5,8 millions d'euros de pénalités

Agde, qui figure parmi les communes ayant seulement de 5 à 10% de logements sociaux, affiche une carence de 2.822 logements. D'autres points noirs figurent sur la carte des communes soumise à la loi SRU pour des communes ayant moins de 5% de logements sociaux. Contactée par La Tribune, la DDTM précise les commentaires suivants : « Montferrier-sur-Lez et Villeveyrac sont rentrées récemment dans le dispositif SRU, Poussan a un gros retard à rattraper mais une nouvelle municipalité plus ouverte au logement social, Villeneuve-les-Béziers a 36% de son territoire soumis à une interdiction de construire en raison du risque inondation et des contraintes LGV qui stérilisent une grande partie du territoire, et Valras-Plage est exempté car plus de 50% de son territoire est affecté par le risque inondation ».

La DDTM 34 indique que sur les 42 communes héraultaises par le bilan triennal 2017-2019, 21 ont bien atteint leurs objectifs de rattrapage et 21 sont défaillantes, parmi lesquelles 13 ont été déclarées en carence pour la période 2020-2022 : Saint-Gely-du-Fesc, Saint-Georges-d'Orques, Lattes, Fabrègues, Villeveyrac, Frontignan, Balaruc-les-Bains, Florensac, Marseillan, Agde, Vias, Servian et Sauvian.

« Certaines n'ont pas vu venir le boulet et sont rentrées dans le dispositif SRU alors qu'elles n'avaient rien fait en matière de logements sociaux, commentent les services de la DDTM 34. C'est le cas de Saint-Gely-du-Fesc par exemple. »

Les communes SRU déficitaires en logements sociaux sont redevables d'un prélèvement annuel net (prélèvement brut auquel sont soustraits les dépenses réalisées par la commune en faveur du logement social) : il était de 5,8 millions d'euros en 2020 (prélevé en 2021), contre 5,2 millions d'euros l'année précédente.

En Haute-Garonne, (seulement) 1,05 millions d'euros de pénalités

Côté Haute-Garonne, la préfecture rappelle que « pour toutes les communes SRU de la Haute-Garonne et pour la période 2020-2022, un objectif unique est fixé à 20% de logements locatifs sociaux ».

Le périmètre de l'unité urbaine de Toulouse a été modifié en 2020 et de nouvelles communes SRU ont été intégrées en 2021. Selon la préfecture, le périmètre SRU fera donc l'objet d'une nouvelle carte en 2022.

L'inventaire 2020 du parc de logements locatifs sociaux de Haute-Garonne faisait état de dix communes sur les 45 concernées qui atteignaient le seuil légal de 20% de logements sociaux : Toulouse (21,31%), Balma (20,72%), Blagnac (22,02%), Colombiers (27,1%), Beauzelle (21,62%), Saint-Jory (21,39%), Ramonville-Saint-Agne (22,02%), Labège (25,43%), Auzeville-Tolosane (34,35%) et Muret (22,93%). Deux communes sont dans le rouge (en-dessous de 10% de logements sociaux) : L'Union (9,85%) et Castelmaurou (6,66%).

Le montant global net des pénalités appliquées à 31 communes de Haute-Garonne au titre de l'année 2020 était de 1,05 millions d'euros. Soit bien moins que l'Hérault.

« La Haute-Garonne a moins de communes en retard que l'Hérault mais il faut surtout rappeler que le taux de logements sociaux à atteindre est de 20% contre 25% dans l'Hérault, souligne la DDTM 34. Mais il est vrai que le Languedoc-Roussillon a un retard historique, qui s'explique par des spécificités territoriales : peu de ressources avec des populations pauvres donc de forts besoins en logements sociaux. Par ailleurs, grâce à l'activité aéronautique en Haute-Garonne, les collectivités locales perçoivent plus d'argent public qu'elles peuvent réinjecter dans le logement social. Mais aujourd'hui, les communes de l'Hérault sont plutôt à la manœuvre pour rattrapage. »

Cécile Chaigneau

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