Aéroports de Paris, Renault : comment Nino Robotics change de modèle économique

Avec ses "transporteurs personnels assis", fauteuils roulants innovants pour personnes handicapées, Nino Robotics prend un virage. L’entreprise héraultaise veut s'affranchir des vendeurs de matériel médical et vise le prometteur marché de la mobilité pour tous. Il cherche de nouveaux partenaires industriels et en mise sur d'autres voies de distribution.
Cécile Chaigneau
Le Nino 4, avec trois roues et de l'intelligence artificielle embarquée, devrait être prêt pour la fin 2019.
Le Nino 4, avec trois roues et de l'intelligence artificielle embarquée, devrait être prêt pour la fin 2019. (Crédits : Nino Robotics)

L'entreprise héraultaise Nino Robotics conçoit et fabrique des fauteuils électriques deux-roues innovants - que son dirigeant, Pierre Bardina, préfère appeler des « transporteurs personnels assis » - utilisant la technologie SegWay de l'auto-balancement et assez éloignés des traditionnels fauteuils roulants pour personnes handicapées.

Après avoir rapatrié son unité de fabrication de l'Aquitaine à Clermont-l'Hérault (34) en juillet 2017, l'entreprise a acheté des locaux (400 m2) à Soubès, près de Lodève (34), pour y déménager l'ensemble de ses activités durant l'été 2018.

Mais le vrai changement est à venir... Alors que la PME adressait jusqu'alors essentiellement les marchés de matériels médicaux, son dirigeant annonce un changement de modèle économique à la faveur de nouveaux partenariats commerciaux en cours de finalisation.

IA embarquée et fonction « follow-me »

« Nous allons sortir le Nino 4, avec trois roues et de l'intelligence artificielle embarquée, déclare Pierre Bardina. Il sera destiné plutôt à des fonctions d'assistance et transformable pour transporter des bagages par exemple, avec une fonction "follow-me", qui fonctionnera avec un smartphone et l'intelligence artificielle. Le Nino 4 devrait être prêt pour la fin de l'année 2019... Nous discutons actuellement avec Aéroports de Paris (ADP, ndlr), qui gère les aéroports de Roissy-Charles de Gaulle et d'Orly, mais aussi 26 autres aéroports en France. Leur marché de l'assistance va changer en 2020 et comme nous avons été primés au Paris Air Forum l'an dernier, on nous a demandé de travailler sur le concept d'assistance pour les personnes handicapées, les séniors, etc. Nous allons procéder à une expérimentation. C'est sûr, nous ferons partie de l'aventure. »

Le Nino 4 fait aussi l'objet d'un autre intérêt : alors que l'entreprise avait initialement envisagé de collaborer avec Peugeot, c'est finalement avec Renault et Mobilize Invest (société d'investissement qui finance des projets innovants à fort impact social dans le domaine de la mobilité, dotée par Renault d'un capital de 5 M€) que Nino Robotics s'apprête à signer une convention.

« Ils sont intéressés par le concept de la mobilité pour tous, observe Pierre Bardina. Sur le marché des gens qui déclarent un problème de mobilité, 15 à 18 % ne se projettent ni sur une trottinette, ni sur un vélo, ni sur du matériel médical. Avec ce partenariat, nous aurons accès au Renault Lab ou à un mentor chez Renault. »

D'autres mobilités

C'est ainsi que l'entreprise s'apprête à sortir des enseignes de matériels médicaux, où ses produits sont majoritairement commercialisés, pour d'autres modes de distribution.

« Nous souhaitons développer d'autres moyens de commercialisation ou de location, précise Pierre Bardina. Ma vision, c'est qu'il faudra rapidement proposer d'autres modes de mobilité que les voitures. Nous étudions donc d'autres pistes, comme les grands opérateurs du vélo partagé, les magasins de sport, les parcs de véhicules à disposition. Il faut que ce soit une mobilité partagée organisée, comme le Velib, et non comme les trottinettes actuellement à Paris, car c'est l'anarchie totaleNous voulons nous ouvrir aux grands comptes, à la location, ce qui signifie faire rentrer la notion de service et de datas de nos utilisateurs mais aussi fabriquer plus de produits. On ne continuera donc peut-être pas à faire l'assemblage nous-mêmes... D'autres entreprises, comme la SNCF ou la RATP, ou de grandes marques de la mobilité seront sûrement intéressés par notre concept. Notre crédibilité passera par des partenariats industriels comme avec ADP ou Renault. »

Le dirigeant précise toutefois que « lorsque le Nino 4 sera prêt, nous le présenterons à la Haute autorité de la santé pour avoir une version médicalisée ».

Le Nino au cinéma et sur Netflix

Pour accompagner ce changement de modèle, l'entreprise lancera une 2e levée de fonds, « dès que nous aurons signé la convention avec Renault et finalisé un pré-accord avec ADP », précise Pierre Bardina. D'un montant de 1,5 M€, elle devrait être clôturée à la fin de l'année.

Dans cette perspective, le dirigeant prévoit d'avoir doublé ou triplé ses effectifs (aujourd'hui de six personnes) à horizon 2020. Et dans ce nouveau modèle économique, le produit-phare actuel, le Nino, commercialisé par un réseau de revendeurs pour 75 à 80 % à l'export, devrait « s'éteindre à la fin 2019 ».

« La technologie est bluffante, mais en termes de coût et de fabrication, ce n'est pas un matériel suffisamment grand public », déclare Pierre Bardina.

En attendant, les fauteuils de Nino Robotics ont été remarqués et ont intéressé le secteur de l'audiovisuel : l'entreprise a dessiné et fabriqué un fauteuil pour le film de Hirokazu Kore-eda La Vérité (avec Catherine Deneuve et Juliette Binoche, date de sortie non précisée), ainsi qu'un fauteuil futuriste pour la série Warrior Nun, produite par Netflix.

Cécile Chaigneau

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