La (nouvelle) stratégie de diversification chez Rochette Industrie pour faire face à la crise

Le groupe biterrois Rochette industrie, équipementier des secteurs pétrolier et aéronautique, accélère sa stratégie de diversification à la lumière de crise sanitaire du Covid. Fragilisée sur le segment aéronautique, l’entreprise va investir dans la modernisation de son outil de production pour l’adapter à de nouvelles ambitions dans les énergies renouvelables, notamment l’hydrogène.
Cécile Chaigneau
Rochette Industrie entame un nouveau cycle de diversification et vise le secteur des énergies renouvelables.
Rochette Industrie entame un nouveau cycle de diversification et vise le secteur des énergies renouvelables. (Crédits : Rochette Industrie)

Producteur d'ensembles mécaniques spécialisés (des pièces complexes et des sous-ensembles mécaniques et hydrauliques), le groupe Rochette Industrie, dont le siège se situe à Villeneuve-lès-Béziers (34), est directement touché par la crise sanitaire du Covid. Historiquement équipementier du secteur pétrolier, l'entreprise avait déjà amorcé un premier virage en 2016 pour se diversifier dans l'aéronautique.

En 2019, le groupe, qui emploie 170 salariés sur quatre sites (deux dans le biterrois, un à Maureilhan dans l'Hérault, et un à Roche-la-Molière dans la Loire), réalisait 21 M€ de chiffre d'affaires consolidé.

« Il y a 3 ans, nous étions à 90 % dépendants du pétrole, rappelle Pierre-Damien Rochette, le directeur général de Rochette Industrie. Mais le secteur est très cyclique, avec des crises tous les 5 à 8 ans, ce qui avait déclenché notre ambition de diversification. Nous sommes passés à 65 % de dépendance au pétrole. Avec ce qui se passe aujourd'hui, nous allons revenir sur nos ratios historiques... »

Car évidemment, la crise sanitaire, et notamment le fort impact qu'elle a fait subir au secteur aéronautique, a modifié la donne : le dirigeant annonce une chute de 40 % de l'activité du groupe, tous secteurs confondus, et une projection de 15 M€ de chiffre d'affaires sur l'année 2020, soit une baisse de 28 %,

« Le trafic a chuté de 80 % sur l'aviation civile et de 40 % sur l'aviation d'affaires, ce qui est plus acceptable, précise-t-il. On s'attend à un retour à la normale sur l'aéronautique en 2023 seulement, pas avant. »

« L'aviation d'affaires se tient mieux »

Conséquence directe : « Avant le Covid, on faisait le même chiffre d'affaires aéronautique à Mecanic Sud Industrie Béziers pour 35 références actives dans l'aviation civile, qu'à Mecanic Centre Aeroptic à Roche-la-Molière pour 800 références actives dans l'aviation d'affaires, soit 1,6 M€ de part et d'autre. Avec le Covid, parce que le trafic aérien se tient mieux dans l'aviation d'affaires, nous ferons 400 000 € à Béziers et 1,9 M€ à Roche-la-Molière, dont 1,4 M€ sur l'aéronautique ».

Le groupe a dû faire preuve d'agilité sur son activité verrerie, dans sa filiale Mecanic Sud Services (22 salariés) à Maureilhan. Alors qu'il fabrique essentiellement des moules pour les bouteilles de vin, il a vu la demande fortement ralentie (près de 20 %) par la baisse d'activité chez les restaurateurs. Baisse qu'il a compensée à hauteur de 10 % par la fabrication de moules pour des bouteilles de bière.

« L'an prochain, nous n'aurons pas de croissance mais pas de baisse non plus, ce qui nous conforte dans l'idée d'accentuer encore cette diversification dans la verrerie. Mecanic Sud Services est installée sur le site de Owens-Illinois (entreprise américaine spécialisée dans l'emballage verrier, NDLR) mais nous produisons désormais aussi pour d'autres sites comme Perrier à Vergèze. »

Plan social évité

Avec ce coup de frein mis par la crise, le dirigeant a dû revoir à la baisse le périmètre de ses effectifs : « Nous avons heureusement évité le plan social (l'entreprise avait dû opérer un PSE il y a 3 ans et portant sur 30 personnes, NDLR). Sans le chômage partiel, il aurait fallu licencier 30 personnes. Mais grâce à ce dispositif, nous avons pu descendre à 15. Trois salariés sont partis à la retraite, nous avons réalisé sept ruptures conventionnelles, et 5 personnes ont été licenciées économiques. On limite la casse ».

Par ailleurs, sur son site de Roche-la-Molière, « pour éviter de licencier », le groupe a signé un accord de performance collective actant le passage de 39 heures à 35 heures, a cessé le recours aux intérimaires, et a supprimé trois postes en services support.

« Nous avons pris le PGE à hauteur de 3,5 M€, qu'on n'utilise pas pour le moment, ajoute Pierre-Damien Rochette. C'est une sécurité, et dans l'incertitude, le PGE a été un outil pour mieux dormir ! Nous l'utiliserons peut-être l'an prochain. Ceux qui ne l'auront pas utilisé pourront le transformer en prêt amortissable de 5 à 7 ans. »

« Cette crise nous a fait travailler sur trois temps »

En attendant, Rochette Industrie, qui a gelé pour l'heure ses investissements - « 800 000 à 1 M€ par an en général » - par manque de visibilité, travaille déjà à un nouveau pivot qui viendra diversifier ses activités et trouver d'autres relais de croissance le temps de traverser le « trou d'air » que connaît le secteur aéronautique.

« Bpifrance a lancé un fonds de revitalisation du secteur aéronautique mais il faut que l'entreprise fasse au moins faire 15 % de son chiffre d'affaires sur l'aéronautique, ce qui est notre cas, explique Pierre-Damien Rochette. Nous avons donc fait la demande pour transformer notre site et surfer sur la vague de l'hydrogène. L'objectif est de moderniser notre outil de production de Béziers de manière à proposer des composants destinés à la fabrication de systèmes pour produire de l'hydrogène. Notre projet a passé la 1e étape et nous attendons l'accord de Bpifrance. Cela représenterait un investissement de 1,6 M€. Le Covid nous force à accélérer cette transformation. »

A la question de ce que cette crise a de différent des crises qu'il connait régulièrement dans le secteur pétrolier, le dirigeant répond : « Sur le marché pétrolier, on voit la ligne d'arrivée et comme on a de la visibilité sur nos carnets de commande, ça nous donne le temps de se réorganiser, on sait faire ! Alors que cette crise-là nous a fait travailler sur trois temps : le temps court, celui pour protéger nos collaborateurs et communiquer avec le CSE ; le moyen terme pour trouver des financements et protéger la trésorerie ; et le temps long pour adapter les effectifs au business ».

Cécile Chaigneau

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