Granulés de bois : Cogra double presque son chiffre d’affaires sur un marché (très) porteur

Avec l'augmentation de l’électricité et du gaz, beaucoup de ménages se tournent vers les poêles et chaudières à granulés de bois. La demande en granulés se faisant croissante sur un marché sous tension, les prix ont explosé et la pénurie menace. En Lozère, l’entreprise Cogra, qui produit quelque 200.000 tonnes de granulés de bois par an dans ses trois usines, publie des résultats en forte progression.
Cécile Chaigneau
L'entreprise lozérienne Cogra produit 200.000 tonnes de granulés de bois par an.
L'entreprise lozérienne Cogra produit 200.000 tonnes de granulés de bois par an. (Crédits : Cogra)

Le 12 septembre, l'entreprise lozérienne Cogra, spécialisée dans la production de granulés de bois pour poêles et chaudières et cotée sur Euronext Growth (depuis novembre 2011), annonce ses résultats annuels de son exercice 2021-2022, clos le 30 juin dernier.

Le siège social de Cogra est basé à Mende, et l'entreprise compte à ce jour trois usines de production de granulés de bois : une à Séverac-le-Château (Aveyron) et deux en Haute-Loire, dont une récemment construite et opérationnelle depuis janvier 2021. Soit une production annuelle de 200.000 tonnes.

L'une des deux usines de Cogra (granulés de bois) en Haute-Loire, à Craponne-susr-Arzon.

L'une des deux usines de Cogra en Haute-Loire, à Craponne-susr-Arzon (© Cogra).

L'entreprise développe également une activité commerciale (environ 15% de son chiffre d'affaires), avec la vente et l'installation de poêles et chaudières à granulés de bois, des marques américaine (Harman) et autrichienne (Froling).

Chiffre d'affaires doublé

Cogra termine cet exercice sur un chiffre d'affaires de 42,1 millions d'euros, soit une progression de + 51% par rapport à l'exercice précédent (27,8 millions d'euros), avec un Ebitda de 6,6 millions d'euros (15,7% du chiffre d'affaires, soit une progression de +73%). Des résultats qui sont le fruit de la première année d'exploitation du 3e site de production mais qui s'inscrivent également dans un marché très porteur qui s'emballe...

Avant même la crise énergétique découlant du contexte géopolitique autour du conflit russo-ukrainien, les ventes de poêle et de chaudières à granulés avait progressé en France (+41% et +120% entre 2020 et 2021), boostées par les dispositif d'aide de l'État. Mathématiquement, la demande en granulés a suivi, affichant une croissance fulgurante.

« La demande est très importante et même relativement agressive de la part du public qui n'est pas toujours bien informé, analyse aussi Bernard Chapon, le fondateur (il y a 40 ans) et dirigeant de Cogra. La capacité de production en France est inférieure à la demande des poêles et de chaudières à granulés. Le problème, c'est qu'on n'a jamais corrélé le nombre de chaudières à la capacité de production en granulés bois du pays. Or nous sommes des petits faiseurs. Avant le conflit en Ukraine, la filière importait des granulés de Russie, d'Ukraine et de Biélorussie. L'interruption de ces importations a créé un manque qui a provoqué des tensions sur le marché. Pour se prémunir, les gens ont commandé des granulés plus tôt, ce qui a contribué à alimenter une forme de pénurie et fait augmenter les prix, avec parfois des pratiques commerciales spéculatives que je ne cautionne pas... »

« Garder la tête froide »

Les prix ont quasiment doublé en un an : fin août dernier, la tonne de granulés coûtait environ 600 euros, contre 400 euros en janvier 2022, et 300 euros en août 2021...

Pour expliquer cette hausse des prix, Propellet, l'association nationale des professionnels du chauffage au granulés de bois, évoque la hausse du prix de revient, notamment l'augmentation des matières premières, des emballages, de l'électricité pour la production de granulé et du carburant pour le transport.

« Dans un marché sous pression, complexifié par une combinaison de facteurs, les partenariats à long terme établis avec les scieurs (approvisionnements) ont permis de limiter la hausse des prix sur l'exercice 2021/2022 », annonce pourtant Cogra dans son communiqué.

Bernard Chapon, qui revendique une approche qualitative et durable de son métier et se défend de telles pratiques, s'explique : « Qu'on augmente les prix parce que les scieurs augmentent le prix des plaquettes, d'accord, mais cela ne justifie pas d'en arriver à de tels niveaux de prix. Chez Cogra, nous augmentons nos prix mais nous cherchons juste à maintenir nos marges, à garder la tête froide et à pondérer tout cet emballement lié au risque de manquer ».

Circuit court

Cogra a une stratégie de distribution multi-canaux : elle fait de la vente directe aux particuliers sur ses sites (et sur son magasin à Rodez), vend par le biais des revendeurs de poêles, ainsi que dans les jardineries, magasins de bricolage et hypermarchés.

« Nous proposons aussi de la livraison pour des clients sur notre zone d'influence, c'est à dire la Lozère, l'Aveyron et la Haute-Loire, ajoute Bernard Chapon, qui prône depuis le début le modèle du circuit court, même s'il alimente aujourd'hui la moitié de la France en-dessous d'une diagonale Alsace-Pays basque. Notre rayon de vente va se réduire pour servir d'abord une clientèle locale, conformément à nos engagements historiques. »

Cogra annonce d'ailleurs avoir, cette année, privilégié le marché français avec une croissance plus soutenue en France (+54 %) qu'à l'export (+34 %).

Le dirigeant craint-il de ne pas pouvoir répondre à la demande dans les prochains mois ?

« Si je tiens mon périmètre, je peux suivre le marché encore plusieurs années mais nous sommes confrontés à une demande extérieure forte, par certaines enseignes notamment, répond-il. Même si nous avons encore un peu de marges de manœuvre, nous serions partants pour augmenter notre production mais nous sommes confrontés à des difficultés d'approvisionnement en matières premières. Nous n'utilisons que des produits issus de la première transformation du bois, en provenant de scieries. Certains confères achètent des rondins, ce qui accentue pression sur les forêts mais je suis contre : c'est un gouffre d'énergie, c'est aussi se mettre en concurrence avec les scieurs, l'écorçage est complexe à faire, et il est primordial de préserver des sources d'approvisionnements responsables. Bref, ça ne peut être que du court terme. Nous gardons un œil sur les usines qui seraient à vendre... »

« Notre endettement ne nous pèse pas »

De 63 salariés en juin 2021, Cogra a recruté et est montée à 73, notamment pour faire tourner sa nouvelle unité de production.

« Nous avons du mal à trouver des chauffagistes qualifiés pour les installations de poêles ou de chaudières, donc on débauche, on n'a pas le choix, observe Bernard Chapon. Pour la production, où les emplois sont moins qualifiés, il y a un turn-over vertigineux... »

Le dirigeant indique ne pas avoir besoin de nouveaux financements. Il faut dire qu'il vient d'investir 13 millions d'euros pour son 3e site de production.

« Notre endettement ne nous pèse pas, affirme-t-il aujourd'hui.

Cogra annonce en effet « absorber largement la hausse de 46% des dotations aux amortissements, en lien avec la finalisation de la nouvelle usine » et « dégager un résultat d'exploitation de 4 millions d'euros (9,3% du CA) en croissance de +94 % ».

« Conformément au modèle historique de Cogra qui privilégie un désendettement rapide, le niveau d'endettement financier baisse de 1,2 million d'euros, à 11,7 millions d'euros, annonce le communiqué financier. Avec une trésorerie de 6 millions d'euros, la dette nette ressort à 5,7 millions d'euros. »

Cécile Chaigneau

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Commentaires 2
à écrit le 12/09/2022 à 19:14
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"Le marché est également bouleversé en Europe où des centrales électriques fonctionnant aux granulés représentent une consommation de 17 millions de tonnes. C'est autant que pour le chauffage à granulés des particuliers. L’interruption des livraisons...

à écrit le 12/09/2022 à 18:19
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Bonjour, voilà un exemple des profiteurs de guerre .... Rien ne justifie le doublement du prix de la tonne de pellet... Ensuite, ses circuit cours pour certaines ressources réduire toute concurrence.... La France est un pays les plus boisé d'Europ...

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