« Aujourd’hui, le court terme prend le pas sur le stratégique » (Pierre-Damien Rochette, UIMM)

ENTRETIEN - L’Union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM) Méditerranée Ouest a réélu, le 20 septembre, son président Pierre-Damien Rochette, directeur général de l’entreprise biterroise Groupe Rochette Industrie. Le dirigeant évoque ses priorités dans un contexte compliqué où, dans les entreprises, les défis de court terme prennent le pas sur la stratégie car ils conditionnent le long terme.
Cécile Chaigneau
Pierre-Damien Rochette, directeur général du Groupe Rochette Industrie à Béziers, a été réélu le 20 septembre à la présidence de l'UIMM Méditerranée Ouest pour un second mandat de deux ans.
Pierre-Damien Rochette, directeur général du Groupe Rochette Industrie à Béziers, a été réélu le 20 septembre à la présidence de l'UIMM Méditerranée Ouest pour un second mandat de deux ans. (Crédits : DR)

Pierre-Damien Rochette, directeur général du Groupe Rochette Industrie (150 salariés) à Béziers (Hérault), a été réélu le 20 septembre à la présidence de l'UIMM Méditerranée Ouest pour un second mandat de deux ans. Il annonce un nombre d'adhérents en croissance, aujourd'hui de 180.

LA TRIBUNE - Vous venez d'être réélu pour deux années supplémentaires. Quelles sont vos priorités ?

Pierre-Damien ROCHETTE - La première priorité, c'est le défensif. Aujourd'hui, en raison du contexte, le court terme prend le pas sur le stratégique. Il y a plein de défis à adresser : la décarbonation, les difficultés de recrutement, la formation, le remboursement des PGE, la récession avec la hausse des taux d'intérêt,... Nous devons donc adresser cet environnement très ambigu et complexe. Dans mon entreprise, nous avons réduit les projets stratégiques pour répondre à ces défis de court terme qui conditionnent le long terme. L'UIMM doit défendre ses adhérents en essayant de jouer collectif, et c'est par exemple ce que nous venons de faire sur la question du coût de l'énergie : c'est la bonne nouvelle du jour, nous avons une offre très intéressante d'EDF, à un prix moyen de 187 euros le MWh hors écrêtement. Cela dépendra évidemment des volumes de KWh que chacun consomme ou de chaque situation financière, mais j'invite vivement nos adhérents à se rapprocher d'EDF rapidement... Mais le marché est tellement volatile qu'on ne peut pas garantir ce prix... L'autre priorité, c'est d'avoir quelques sujets offensifs : la décarbonation et la RSE. L'UIMM va bientôt proposer un programme de décarbonation avec un diagnostic et des aides pour développer des projets énergies renouvelables, par exemple des panneaux photovoltaïque en toiture et sur les parkings pour permettre aux entreprises de réduire leur facture d'électricité. Concernant la RSE, je rappelle aux adhérents qu'il est urgent qu'ils s'y intéressent car il y aura bientôt, de la part des banques, des prêts bonifiés pour les entreprises qui auront un dispositif RSE. Et au niveau humain, on a vu des entreprises mettre en place des démarches QVT (qualité de vie au travail, NDLR), ce qui signifie un vecteur différenciant si on veut attirer des talents et garder nos collaborateurs.

Quels dispositifs spécifiques allez-vous proposer à vos adhérents dans les prochains mois ?

Nous avons travaillé avec l'UIMM Midi-Pyrénées, qui, avec Airbus, a une frappe plus importante que nous, sur un projet de régionalisation. Nous nous sommes greffés à leur commission Industrie, qui étudie les dossiers industrie, notamment via Rebond Industrie (fruit d'un partenariat entre l'UIMM Occitanie et Bpifrance, ce programme de douze mois permet aux PME industrielles de la région de s'inscrire sur une trajectoire de croissance pérenne et de partager entre pairs leurs problématiques et défis au sein d'un écosystème dynamique, NDLR). Nous allons aussi lancer le programme SURF : beaucoup d'entreprises vont devoir rembourser leur PGE alors qu'elles l'ont utilisé, et l'idée de cette journée d'accompagnement, c'est de les aider à trouver des solutions pour faire du refinancement de haut de bilan pour qu'elles n'aient pas à fermer.

La nouvelle convention collective de la métallurgie est en renégociation...

Il y a une grosse attente des dirigeants. Si on obtient un accord global, il faudra ensuite le négocier au niveau de chaque entreprise, ce qui représente un gros travail en plus des autres défis qu'on a à relever... Nous accompagnerons les entreprises sur ce sujet. Nous avons besoin de travailler collectif et l'UIMM est là pour ça aussi. Nous avons un rôle à jouer encore plus cette année que par le passé...

Les entreprises adhérentes de l'UIMM Méditerranée Ouest sont-elles positionnées sur le plan France 2030 ?

Non, pas suffisamment... Nous avons quand même, en région, Genvia qui a bénéficié de France 2030, mais nous avons un tissu de petites entreprises qui ont besoin d'être sensibilisées à ce sujet. Elles ont l'opportunité de produire plus sur leurs territoires en s'emparant de France 2030.

Vous avez placé votre soirée post-assemblée générale sous le signe de l'entreprise libérée. Pourquoi ?

L'entreprise ESII (PME héraultaise de 130 salariés, conceptrice de solutions de gestion de l'accueil client et de prise de rendez-vous en ligne, NDLR) est très avancée sur le sujet et c'était une façon de rendre hommage à son dirigeant, Jean-Pierre Richard (dont les obsèques avaient lieu ce 20 septembre, NDLR ). Mais c'est aussi parce que l'entrepreneur n'a pas la main sur tous les défis qu'il doit relever aujourd'hui : l'électricité, l'inflation, les ruptures d'approvisionnement... En revanche, il a la main sur l'organisation du travail, sur l'entreprise libérée, il peut changer les choses. Nous voulions donc démontrer, par des témoignages, ce qu'il est possible de faire, de la RSE à l'entreprise à mission, en passant par la QVT.

Les entreprises de la métallurgie, comme dans de nombreux secteurs, peinent à recruter. Que leur dites-vous ?

Aujourd'hui, on ne peut plus recruter des talents comme on le faisait avant, il faut s'appuyer sur de nouveaux éléments d'attractivité. Le modèle de l'entreprise libérée, par exemple, peut les aider à attirer des candidats... Je rappelle qu'avec les éoliennes en mer qui vont être assemblées à Port-la-Nouvelle (dans l'Aude, pour les fermes-pilotes d'éolien offshore flottant d'abord puis pour la ferme commerciale, NDLR), il faudra embaucher 100 soudeurs l'année prochaine. Il y a une forte demande, à nous de créer des clusters ou GIE pour venir adresser ce marché.

Cécile Chaigneau

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