Avec son boîtier de conversion au bioéthanol, Biomotors vise la vignette Crit’Air 1 dans les territoires ZFE

Onze ans après sa création, la PME héraultaise Biomotors, qui conçoit des boîtiers de conversion permettant à des véhicules essence de rouler au bioéthanol, voit la demande exploser. Le contexte inflationniste et énergétique est favorable à ces conversions. Reste un enjeu majeur pour le fondateur et directeur général, Alexis Landrieu : faire obtenir aux véhicules convertis la précieuse vignette Crit’Air 1, sésame de circulation dans les zones à faible émissions (ZFE).
Cécile Chaigneau
En 2022, Biomotors annonçait 5.000 boîtiers de conversion au bioéthanol installés par mois, soit 60.000 véhicules essence équipés.
En 2022, Biomotors annonçait 5.000 boîtiers de conversion au bioéthanol installés par mois, soit 60.000 véhicules essence équipés. (Crédits : Biomotors)

Le système de conversion E-85 BIOFleX Connect, conçu par l'entreprise héraultaise Biomotors, permet de convertir les véhicules essence à injection directe ou indirecte au superéthanol E85 (ou bioéthanol). Créée en 2011 par Alexis Landrieu, la PME assure voir la demande de conversions exploser.

« Le fait qu'on ait dépassé le seuil psychologique des 2 euros à la pompe à essence a poussé les automobilistes à s'interroger, rapporte le dirigeant. L'écart de prix entre l'essence et le superéthanol était très important en 2022 car ce dernier n'a été réactualisé qu'en fin d'année, et même si ce prix du superéthanol a augmenté (en 12 derniers mois, il aura bondi à la pompe de 39,18% en moyenne en France métropolitaine, NDLR), il est encore à 1,10 euro contre 1,80 euros pour l'essence, donc il y a toujours 0,70 euros d'économie par litre de carburant à faire ! »

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Biomotors se présente comme « le premier fabricant homologué » avec neuf homologations dont une supplémentaire obtenue en 2022, permettant aux automobilistes d'avoir une carte grise conforme et de disposer de garanties. L'entreprise emploie aujourd'hui 70 personnes et compte deux agences commerciales - à Vendargues (Hérault) où se trouve aussi son siège social, et à Bordeaux -, bientôt trois puisqu'elle va en ouvrir une d'ici fin janvier « à proximité de Paris ». Alexis Landrieu reste discret sur la localisation mais motive ce choix par le fait que « les Régions Ile-de-France et Hauts-de-France maintiennent leurs aides pour la conversion au bioéthanol, tout comme les Régions PACA et Grand Est d'ailleurs ».

800 installateurs en France

Aujourd'hui, les boîtiers de Biomotors sont fabriqués pour 1/3 à Montpellier et 2/3 en Asie pour les composants. Le boîtier BIOFleX Connect est livré avec un capteur de carburant permettant notamment de suivre la consommation du véhicule (via une application adossée au boîtier), mais aussi « de mesurer les économies réalisées ou de trouver la station la plus proche », précise Alexis Landrieu.

Biomotors vient de lancer, lors du Mondial de l'automobile fin octobre, un boîtier spécifique pour les motorisations 1,3L TCe, qui concernent notamment la quasi-totalité de la gamme Renault/Dacia/Nissan en thermique essence.

L'entreprise s'appuie sur un réseau de 800 installateurs habilités en France, « dont 70% de garagistes indépendants », souligne le dirigeant, qui ambitionne de « monter ce réseau à 1.300 pour couvrir toute la France ». Il ajoute avoir d'ailleurs signé de nouveaux partenariats, en 2022, avec Midas, Nexus Auto, L'Auto Leclerc « ou encore American Car City, le plus grand importateur français de véhicules américains ».

Les véhicules du quotidien

« En 2022, nous étions sur un rythme de 5.000 systèmes installés par mois, soit 60.000 véhicules équipés, précise l'entrepreneur. Sur les dix dernières années, les conversions que nous observions portaient surtout sur des berlines, des routières et de gros rouleurs, alors qu'en 2022, le top 5 étaient des citadines, et les modèles les plus convertis des Clio, Fiesta et Sandero. Ce qui indique qu'aujourd'hui, ce sont les véhicules du quotidien, ceux qu'on utilise pour aller travailler, que les particuliers viennent convertir. Chez les professionnels, ce sont pour beaucoup des taxis, notamment parce que dans les appels d'offres des hôpitaux pour les prestations de transport, le critère RSE est de plus en plus souvent exigé. »

Sur le segment des particuliers, Biomotors annonce avoir enregistré
 une augmentation de 59% d'installations sur les véhicules injection indirecte et de 41% d'installations sur véhicules à injection directe, « ce qui signifie que nous adressons aujourd'hui pour moitié des véhicules récents », souligne Alexis Landrieu.

En 2022, Biomotors a mis un pied sur le marché de la course automobile afin d'apporter là aussi une réponse aux enjeux techniques, environnementaux et économiques du secteur. L'entreprise a ainsi lancé la première course 100% superéthanol au Grand prix de Pau avec la catégorie Twincup, une première autorisée par la Fédération française du sport automobile (FFSA).

ZFE : une solution mais pas encore de reconnaissance

Si Biomotors promet la réalisation de « plus de 800 euros d'économie sur l'année pour 13.000 km parcourus » (estimation selon le prix moyen de l'E-85 en 2022), elle promet aussi la réduction de moitié des émissions de CO2 et de la quasi-totalité des particules fines (90%) par rapport aux véhicules essence. Les véhicules convertis au bioéthanol ne sont pour autant pas encore bénéficiaires de la vignette Crit'Air 1, celle qui permet une libre circulation dans les zones à faibles émissions (ZFE) qui sont en train de se déployer dans les grandes métropoles. C'est l'un des gros sujets d'Alexis Landrieu pour 2023.

« Cela fait partie de mon travail de cette année : faire en sorte que la vignette Crit'Air prenne en compte la conversion au bioéthanol, déclare-t-il à La Tribune en ce début 2023. A Montpellier et Reims, une dérogation peut être accordée aux véhicules qui sont équipés, ce qui leur offre trois ans de sursis... Je mise sur les difficultés d'acceptabilité sociale des ZFE. Et il y a par ailleurs beaucoup d'oreilles attentives sur le sujet, par exemple  l'association 40 millions d'automobilistes ou les producteurs de bioéthanols eux-mêmes. Les prix carburants s'envolent, on s'attend à un retour du mouvement des gilets jaunes, les gens s'équipent de vignettes Crit'air : c'est le moment d'agir pour faire reconnaître la conversion au bioéthanol. D'autant que le GPL bénéficie déjà de la vignette Crit'Air 1... »

Booster le chiffre d'affaires

Le coût d'un boîtier varie selon le type de véhicule et peut aller de 719 à 1.100 euros, installation comprise (en 72 heures maximum). La PME annonce un chiffre d'affaires de 22 millions d'euros en 2022, contre... 5,2 millions l'année précédente.

« Nous prévoyons de conserver le même régime en 2023 mais d'augmenter le chiffre d'affaires de 30% », annonce Alexis Landrieu.

Alors que la PME emploie aujourd'hui 70 salariés en France, le dirigeant estime à 100 les effectifs nécessaires pour soutenir le volume d'activité actuel. Il prévoit donc une trentaine de recrutements dans les prochains mois, « dont quatre en R&D pour adapter nos systèmes à toutes les motorisations ».

Pour accueillir cette croissance, Biomotors a lancé la construction d'une extension de 600 m2 à Vendargues, où se situe son siège social.

Cécile Chaigneau

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