Après le gel du soutien aux compagnies low cost à Montpellier, l’APFTE réagit

Le conseil de la Métropole montpelliéraine a voté, le 31 mars, le gel de la subvention annuelle versée à l’association chargée de promouvoir les flux touristiques (APFTE) auprès des compagnies low-cost et valoriser la destination de Montpellier. Son président Jean-Yves Labattut réagit, alors que l'APFTE attend près de 2 M€ sur 2015.
Cécile Chaigneau

C'est sur la base d'un rapport de la Chambre régionale des comptes du Languedoc-Roussillon du 17 avril 2013 qu'Anticor 34, qui lutte pour une meilleure éthique en politique, a lancé l'alerte : et si les subventions versées  à l'Association de promotion des flux touristiques et économiques (APFTE) par cinq collectivités locales (la Région LR, le Conseil départemental de l'Hérault, Montpellier Méditerranée Métropole, la Ville de Montpellier, Pays de l'Or Agglomération) et la CCI de Montpellier n'étaient pas conforme au droit ?

Ces subventions sont utilisées par l'association pour assurer la promotion des vols low-cost sur l'aéroport de Montpellier en procédant à l'achat de publicité on line sur les sites des compagnies aériennes pour inciter une clientèle nouvelle à venir découvrir la région.

Entre 2010 et 2013, l'APFTE a perçu quelque 7,5 M€ de subventions et a annoncé 7,34 M€ de dépenses publicitaires.

Alerté par Anticor 34, le président de Montpellier Méditerranée Métropole, Philippe Saurel, a préféré suspendre, le 31 mars dernier en conseil, ladite subvention (550 000 € pour 2015), en attendant des explications complémentaires de la Chambre régionale des comptes.

« Deux Chambres régionales des comptes (celle de Bourgogne a également pointé du doigt une problématique similaire, NDLR) ont annoncé que cette subvention pouvait être contestable, déclare Philippe Saurel. Il est de mon devoir de vérifier l'opportunité de la verser. »

"Le plus traçable, c'est l'avion"

« Les collectivités ne pouvant pas signer de contrat de marketing avec des compagnies aériennes, le moyen qui avait été trouvé était de passer par une association, se défend Jean-Yves Labattut, président de l'APFTE. Sur les lignes des collectivités, cela passe en subventions, et l'association signe des contrats de marketing on line. Je ne vois pas où le contribuable se fait avoir ! L'APFTE a été créée par la CCI en accord avec les services de l'État, et notamment du préfet Claude Baland. Le dossier vient d'être remis aux services de la Métropole. »

 Et d'expliquer que « l'avion est le vecteur le plus traçable en termes de flux touristiques, car on peut facilement compter les gens qui viennent en région. »

Un rapport du Conseil régional Languedoc-Roussillon établi en 2013 sur les données 2012, a démontré le poids des retombées économiques :  261 M€ dépensés en région par les passagers de l'aéroport de Montpellier. Soit 30 M€ pour les 150 000 passagers low-cost (sur 300 000) soutenus par les contrats de marketing.

Redevable d'impôts commerciaux ?

Parmi les points qui interrogent : 80 % (5,9 M€) des subventions ont été attribuées à la seule compagnie low-cost irlandaise Ryanair via sa filiale spécialisée dans le marketing aérien Airport Marketing Services.

« On s'interroge sur la qualification juridique de "subvention", souligne Laurent Dublet, juriste pour Anticor 34, membre d'Anticor et référent du groupe local pour le Gard. Les collectivités membres de l'association sont les mêmes qui lui versent des subventions... Cela pose la question de l'indépendance de l'association, avec le risque que cette subvention soit considérée comme une aide détournée à destination des compagnies low-cost et une violation flagrante de la libre concurrence au sens européen du droit. D'autant que le siège d'Airport Marketing Services est basé sur l'île de Man, qui est un paradis fiscal ! »

Le juriste pose également la question de la légitimité du statut d'association loi 1901 : « À partir du moment où elle intervient pour le compte d'une entreprise privée, l'association acquiert immédiatement statut d'association commerciale et est donc redevable d'un certain nombre d'impôts commerciaux ».

« L'association n'est pas redevable d'impôt car elle ne fait pas de bénéfice, plaide Jean-Yves Labattut. Si on ne dépense pas toutes les subventions perçues, on les reverse aux collectivités au prorata de leur engagement initial. »

Une condition non recevable pour le juriste d'Anticor.

L'APFTE affiche sa sérénité

Autre point controversé : la non publication des comptes de l'APFTE depuis 2010.

« C'est la seule chose sur laquelle Anticor a à dire, réplique Jean-Yves Labattut. La situation a été réglée il y a une quinzaine de jours. »

À ce jour, les autres financeurs de l'APFTE ne se sont pas manifestées.

« On lance l'alerte, mais on n'est pas procureur, on ne souhaite pas en arriver à une procédure contentieux, affirme Laurent Dublet chez Anticor 34, qui confirme qu'une rencontre avec Jean-Yves Labattut devrait être fixée prochainement.

« Maintenant, je laisse les collectivités à leurs responsabilités, conclut Jean-Yves Labattut. Si elles décident que ce n'est plus possible, on arrêtera. Mais il faut avoir en tête qu'on risque de perdre 180 000 à 200 000 visiteurs... Je fais confiance au discernement de Philippe Saurel. Je suis serein. »

En 2015, l'APFTE mise sur 1,7 à 2 M€ de subventions. Et le président d'ajouter : « Sur la dernière assemblée générale, on a lancé les premiers contrats pour le 1er semestre, les collectivités devront assumer ».

Le trafic de l'aéroport Montpellier Méditerranée a atteint les 1 445 000 passagers en 2014, en hausse de 1,6 % par rapport à 2013. Les compagnies dites traditionnelles pèsent pour 67,5 % du trafic, et les compagnies low-cost pour 32,1 %, en hausse d'un point par rapport à 2013.

Cécile Chaigneau

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Commentaire 1
à écrit le 09/04/2015 à 10:09
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On fait des montages obscurs pour échapper aux contrôles et aux impôts, soit, si c'est pour le bon développement économique de notre région... Mais alors qu'on nous dise, entre la subvention de pseudo communication, et le manque à gagner fiscal (ile ...

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