
Au départ, Christophe Ribot, ingénieur de formation, avait créé en 2019 à Beaucaire la société Agropesage, un cabinet de conseil en ingénierie sur la mise en place de lignes de conditionnement pour l'agroalimentaire. C'est lui qui a décelé un besoin précis dans l'univers du vrac. Ainsi est née la startup Woodland Garden en 2021 à Beaucaire (Gard), créée par trois associés : Christophe Ribot, Laurent Odinot et Morgan Hinque. Pour des raisons personnelles, le siège social a été transféré à Marseille mais l'usine est restée à Beaucaire.
« Ce qui existe déjà en termes de distributeurs de vrac alimentaire, ce sont des tubes en plastique dans lesquels les magasins déversent les produits, explique Laurent Odinot à La Tribune. Il en existe un million en France. Mais ce standard du marché présente plusieurs irritants. Les enseignes de distribution, Biocoop en tête, prônent de plus en plus le zéro plastique. Les trémies actuelles sont difficiles à entretenir et présentent une complexité opérationnelle. Les consommateurs sont méfiants sur l'hygiène de ces distributeurs, notamment sur la propreté mais aussi sur le fait qu'il puisse rester des traces d'autres produits possiblement allergènes. Par ailleurs, ils aiment bien avoir des informations sur les produits qu'ils achètent et retrouver leurs marques favorites. Les marques elles-mêmes, sentant la tendance du vrac s'accélérer, souhaitent le développer mais n'ont pas les conditions pour y aller : elles veulent pouvoir être identifiées et que l'approvisionnement d'une trémie avec leurs propres produits soit garantie. »
En réponse à la loi Climat
Woodland Garden a donc conçu, et fait breveter, une trémie en bois, fabriqué à Beaucaire à partir de bois issus de forêts françaises de proximité et gérées durablement. Les aliments sont présentés dans le sachet du fabricant inséré dans le distributeur vrac. Un principe qui évite la manipulation de gros et lourds sachets de produits, mais aussi les contenants plastiques et leur entretien gourmand en eau et en détergent. Enfin, il garantit au consommateur l'origine du produit, et à la marque sa visibilité.
« Le produit n'est jamais touché ni transvasé, ajoute Laurent Odinot. Notre solution arrive au bon moment sur le marché : la loi Climat va imposer à la grande distribution de dédier au moins 20% de leur surface de vente au vrac, contre 1 à 3% aujourd'hui. Les grandes surfaces ont donc la volonté de promouvoir le vrac et se mettent déjà en ordre de bataille. La trémie Woodland Garden est universelle, les fabricants de vrac ayant des ensacheteuses verticales qui peuvent être facilement réglées pour correspondre au format qu'on propose, lequel est très proche de ce que font déjà les fabricants de vrac. »
Les trois cofondateurs de Woodland Garden.
Depuis l'automne, Woodland Garden déploie son distributeur écoresponsable de vrac dans les magasins bio spécialisés et les grandes surfaces. Il est actuellement présent dans sept magasins : « Chez Spar à Puyricard, Leclerc à Montauban, Leclerc à Gaillac, Leclerc à Graulhet, dans un Marché Léopold et dans un Biocoop en test en partenariat avec la centrale nationale. Et nous allons le tester chez Auchan, Intermarché, etc », précise Laurent Odinot.
Objectif : essaimer partout en France dans un premier temps, puis à l'international via des distributeurs : « La France est un marché très mature sur le vrac, mais il y a aussi la Suisse, le Benelux ou la Scandinavie, ou encore l'Allemagne ».
« Un pari osé »
C'est pour poursuivre son développement et donc financer son besoin en fonds de roulement, que Woodland Garden vient de lever 1 million d'euros auprès des réseaux Provence Angels et Melies Business Angels, de leurs partenaires bancaires, de Région Sud Investissement et d'un pool d'entreprises, dont Ulterïa, la maison-mère de Bulk and Co, un distributeur d'équipements vrac pour magasins, épiceries vrac et zéro déchets, partenaire de Woodland Garden. L'opération s'est faite en deux tranches : l'une a été bouclée en juin et la seconde en décembre.
Ces fonds vont surtout lui permettre de finaliser son outil industriel dans son usine de Beaucaire, qui présente aujourd'hui une surface de 1.200 m2 dont 1.000 m2 d'ateliers et de stockage : « Nous avons démarré avec un entrepôt vide qu'on a équipé sur fonds propres, aidés par la banque en leasing pour le gros outillage industriel, tout en co-développant notre solution avec des clients. C'était un pari osé et on a brûlé du cash », souligne Laurent Odinot.
La levée de fonds a aussi vocation à financer le stock de bois et à recruter. La jeune pousse va aussi investir dans son développement commercial et dans la R&D.
« Nous réfléchissons déjà à des versions de trémies plus élaborées et connectées, annonces le dirigeant. Aujourd'hui, ce sont des produits simples et low-tech qui conviennent au marché spécialisé bio, mais on sait que la grande distribution est friande de datas... »
Woodland Garden ambitionne de fabriquer 10.000 trémies en 2023 et plus de 100.000 par an d'ici cinq ans, avec l'objectif de « dépasser les 15% de parts de marché ».
Actuellement, la startup tourne avec les trois cofondateurs et deux salariés en production. Elle prévoit de recruter une dizaine de salariés en 2023, « pour la production essentiellement, à Beaucaire ».
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