Fin du suspense : Numa Hambursin prend la direction du MO.CO. à Montpellier

C’est la tête d’un navire amiral culturel sous tension qui vient d’être désignée ce 23 mars. Numa Hambursin, qui avait déjà piloté le Carré Saint-Anne à Montpellier, revient sur la scène culturelle locale en prenant la tête du MO.CO., un écosystème artistique singulier réunissant l’École Supérieure des Beaux-Arts de Montpellier et deux lieux d’exposition.
Cécile Chaigneau
Numa Hambursin est le nouveau directeur général du MO.CO. à Montpellier.
Numa Hambursin est le nouveau directeur général du MO.CO. à Montpellier. (Crédits : DR)

Le 23 mars, le conseil d'administration du MO.CO. (pour Montpellier Contemporain) se réunissait pour décider du nouveau directeur général de cet écosystème artistique singulier, réunissant l'École Supérieure des Beaux-Arts de Montpellier et deux lieux d'exposition, la Panacée (centre d'art contemporain) et l'Hôtel des collections. Ce dernier a été inauguré en juin 2019 au sein de l'ancien Hôtel Montcalm. Sans collection permanente, il est dédié à l'exposition de collections publiques ou privées, provenant du monde entier.

Depuis des mois (et surtout ces derniers jours), la succession de Nicolas Bourriaud, préfigurateur du MO.CO et qui en avait pris les rênes en février 2016, agitait le landernau local. Une agitation à la hauteur de sa notoriété mais aussi du scepticisme autour du projet, qui a toujours été exprimé par une partie des politiques et acteurs culturels locaux ?

La nomination de Nicolas Bourriaud par Philippe Saurel, alors maire de Montpellier et président de la Métropole, avait à l'époque fait sensation. Illustre critique d'art contemporain et commissaire d'exposition, ex-directeur de l'école des Beaux-Arts de Paris, co-fondateur et co-directeur du Palais de Tokyo, Nicolas Bourriaud avait fait figure de véritable prise de guerre pour l'élu, qui confiait ainsi à une éminence culturelle le sort du futur centre d'art contemporain, projet-phare de sa mandature.

Nicolas Bourriaud quittera ses fonctions le 31 mars prochain.

« Une approche curieuse, ouverte et généreuse »

Lors du conseil d'administration de ce 23 mars, c'est le projet proposé par Numa Hambursin « qui a recueilli 12 voix sur les 19 exprimées, dont celles de l'ensemble des représentants de l'État, de la Ville et de la Métropole », précise le conseil d'administration du MO.CO. dans un communiqué.

Un jury s'était au préalable tenu le 4 mars dernier, « composé de Christopher Miles, directeur général de la création artistique (Ministère de la Culture), Michel Roussel, directeur régional des affaires culturelles, Olivier Kaeppelin, personnalité qualifiée, ancien directeur des Arts Plastiques du Ministère de la Culture et ancien directeur de la Fondation Maeght, Agnès Robin, adjointe à la culture de la Ville de Montpellier, Éric Penso, vice-président culture de la Métropole et Président du MO.CO. et Fabrice Manuel, DGA Culture Ville et Métropole », précise la Métropole. Il avait retenu trois candidats : Ashok Adicéam, Numa Hambursin et Céline Kopp.

« Numa Hambursin a séduit le jury et emporté l'adhésion de la majorité des membres du conseil d'administration par la singularité et de son approche de l'art contemporain, curieuse, ouverte et généreuse, et par sa capacité à s'affranchir des dogmes et des modes », annonce le conseil d'administration.

Un processus de désignation qui a fait l'objet de critiques, notamment de la liste d'opposition citoyenne #NousSommes Montpellier qui parle de « non-concertation » et « d'opacité ». Avec des étudiants de l'école des beaux-arts inquiets du projet retenu.

« Il y a eu totale transparence, se défend Eric Penso, qui tient à rappeler le processus de désignation. Comme c'était statutairement prévu, le mandat de Nicolas Bourriaud a été relancé. Je souligne que c'est difficile de parler d'opacité quand on compte parmi le jury des personnes aussi incontestables que Christopher Miles, Michel Roussel et Olivier Kaeppelin... Nous avons recensé les candidatures, dont celle de Nicolas Bourriaud, puis nous nous sommes réunis le 7 janvier et nous avons retenu trois hommes et deux femmes, dont Nicolas Bourriaud. J'ai fait envoyer les cinq projets aux autres membres du conseil d'administration. Les cinq candidats retenus ont rédigé un projet et été auditionnés le 4 mars. A l'issue, j'ai fait voter à bulletin secret - et j'en ai la preuve - et Nicolas Bourriaud a été classé 4e à l'unanimité. Aujourd'hui, j'ai soumis les trois candidatures sur lesquelles il n'y avait pas eu d'unanimité. Il n'y a eu aucune opacité ! »

L'élu se défend également de toute intention du conseil d'administration de "réduire la voilure de l'école des beaux-arts" : « L'école ne sera pas sacrifiée ! », nous assure-t-il.

D'ailleurs, le communiqué de la Métropole le précise bien : « Une attention toute particulière sera portée par le conseil d'administration et les tutelles publiques au développement de l'École, à la réussite de ses étudiantes et étudiants, à son rayonnement ».

De Cannes à la Fondation GGL Helenis

Ancien galeriste (à Avignon et Montpellier), critique d'art et commissaire d'exposition, Numa Hambursin, 41 ans, a assuré de 2010 à 2017 la direction artistique du Carré Sainte-Anne de Montpellier.

Prix AICA France de la critique d'art 2018 pour un texte depuis publié aux éditions Sometimes (Marlène Mocquet et la critique d'art) en 2020, Numa Hambursin assurait la direction artistique de la Fondation GGL HELENIS pour l'art contemporain, à Montpellier, accompagnant notamment la création d'œuvres artistiques au sein de l'Hôtel Richer de Belleval, hôtel particulier du XVIIe siècle en plein cœur de l'Écusson et qui ouvrira ses portes cet été.

Son CV rappelle que « nommé à Cannes en 2018, il a créé et développé le Pôle Art Moderne et Contemporain de la ville de Cannes (PAMoCC), au sein duquel il a structuré et mis en cohérence différents lieux d'expositions et l'ensemble des actions d'art contemporain portées par la municipalité, rappelle son CV. Sous l'impulsion du Maire de Cannes, il a finalisé en début d'année le projet ambitieux de transformation de la Malmaison en centre d'art sur la Croisette (ouverture prévue en 2024) ».

 « La diversité des aventures artistiques relatées ici et la cohérence d'un parcours tout entier dédié à l'art ont séduit la Ville et la Métropole de Montpellier tout autant que la rigueur avec laquelle Numa Hambursin aborde ses missions professionnelles, indique le conseil d'administration. En décidant de lui confier pour trois ans la direction générale du MO.CO., elles décident de faire confiance à un Montpelliérain qui a su acquérir une importante expérience et mener ailleurs d'ambitieux projets. »

Question budget...

Numa Hambursin prend donc pour les trois prochaines années la direction de ce navire culturel, avec la mission de lui offrir un avenir. Car sa naissance avait démarré de manière chaotique : inauguré un an avant le début de la crise sanitaire du Covid-19, il n'a pas pris son envol dans de bonnes conditions.

A son arrivée aux manettes municipales et métropolitaines, Michaël Delafosse (PS) a pointé son budget de plus de 6 millions d'euros annuels et 22 millions d'euros pour la restauration du bâtiment, évoquant également des dépenses de communication « pharaoniques, disproportionnées, pas transparentes » se chiffrant à 1,5 million d'euros et « un déficit de 200.000 euros pour l'année d'ouverture »...

« 4 ans fabuleux de travail d'équipe, Montpellier désormais sur la carte de l'art contemporain. Merci aux personnels, aux profs, aux étudiant/es. On a fait du bon travail, on a fait vibrer la ville, personne ne nous l'enlèvera », tweetait pourtant Nicolas Bourriaud ce mardi 23 mars, alors que le conseil d'administration désignait son successeur...

Tweet de Nicolas Bourriaud sur le MOCO à Montpellier, le 23 mars 2021

« Avec le MO.CO. doit s'inventer aujourd'hui une nouvelle façon d'envisager la place de l'art contemporain sur nos territoires : résolument ouvert au monde et à la diversité de ses cultures et de ses manières d'être et de penser, résolument ouvert sur sa ville et son territoire, inclusif et hospitalier, commente Éric Penso. Et cela, ensemble. Un lieu dédié aux artistes et au public, un lieu joueur et familier, capable d'aller à la conquête de celles et ceux qui n'auraient jamais pensé pousser les portes d'un centre d'art contemporain. Un lieu où se formeront et s'épanouiront les artistes de demain, étudiants des Beaux-Arts, et où les plus jeunes éveilleront leur regard et leur sensibilité. Un lieu d'exigence intellectuelle et pas d'intimidation. Un lieu où s'inventeront enfin de nouvelles formes d'accès à la culture et à l'art, participatives et accueillantes. »

Cécile Chaigneau

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