Jean-Pierre Grand : « En politique, on n’est jamais réélu par hasard »

Le maire de Castelnau-le-Lez tire sa révérence. À compter du 30 septembre, il ne sera plus le premier magistrat de cette ville mitoyenne de Montpellier, et ne gardera que son mandat de sénateur, comme lui impose la loi. Le coup d’œil dans le rétroviseur des années écoulées n’empêche pas l’élu de garder un œil sur la politique locale actuelle et future…
Cécile Chaigneau
Jean-Pierre Grand, sénateur-maire de Castelnau-le-Lez (34).

Jean-Pierre Grand, encore maire (Les Républicains) de Castelnau-le-Lez pour un mois, scrute le rétroviseur et exhume les archives qu'il va compiler dans un livre, publié par la Ville en mémoire des trente-quatre années qu'il a passées dans le fauteuil de maire.

En effet, conformément à ce qu'il avait annoncé, et afin de se mettre en conformité avec la loi de non-cumul des mandats à compter du 1er octobre 2017, l'élu abandonne son mandat de maire pour ne conserver que celui de sénateur (depuis octobre 2014).

Ses motivations ?

« Je ne finasse jamais avec la loi, qui veut qu'on abandonne le dernier mandat acquis, répond-il. J'ai une longue carrière d'élu. La première fois où je l'ai été, c'était en mars 1977, comme conseiller municipal... Cela fait donc un peu plus de 40 ans que je n'ai pas passé sans une seule journée sans être élu ! De toute façon, je ne me serai pas représenté en 2020. »

Une vision à 30 ans

Âgé de 66 ans, cet ancien collaborateur de Jacques Chaban-Delmas, qui fut son mentor en politique, est maire de Castelnau-le-Lez (20 000 habitants) depuis mars 1983.

« Le mandat de maire est le plus beau mandat de la République, celui où on se réalise, on est à la barre du navire... Cette commune, je l'ai façonnée avec une vision à trente ans ! J'avais comme axes de gestion la politique scolaire et la politique sociale. Ma 1ère réalisation était, en 1986, l'école Jean Moulin avec des équipements sportifs intégrés. Ensuite, j'ai donné un budget autonome au CCAS et j'ai créé pour les Castelnauviens, dès mon 1e mandat, une allocation différentielle de revenu minimal, qui a duré jusqu'à l'instauration du RMI. »

Au titre de cette « vision à trente ans », l'édile rappelle qu'il a commencé par réserver tout le foncier qui permet encore aujourd'hui de développer la ville, en scandant « ce sera notre puits de pétrole pour l'an 2000 ! ». Il évoque également l'articulation de la ville et de ses équipements autour de l'axe qui allait plus tard accueillir le tramway.

« J'ai pu le faire grâce à une entente et une vision communes avec Georges Frêche, ajoute-t-il. Et j'ai pu mettre en œuvre cette vision grâce à la durée de mon mandat. J'ai aussi bénéficié de ma position nationale (il fut aussi député durant dix ans, entre 2002 et 2012, NDLR). Avec la loi de non-cumul des mandats, on rétrécit la démocratie locale, on enlève aux gens une possibilité de choix. »

Transmettre le flambeau

L'élu raconte volontiers la visite à Castelnau-le-Lez de François Mitterrand, alors Président de la République : « Il avait souligné qu'il était venu dans notre commune car il savait que "des réalisations pouvaient être montrées parce qu'elles avaient une valeur exemplaire", ajoutant "Je ne suis pas venu voir seulement le maire et la population de Castelnau-le-Lez, je suis venu approcher de plus près une certaine façon de gérer le pays" ». La phrase, gravée sur un panneau de verre, figure en bonne place sur les murs de la salle du conseil municipal...

Le 14 septembre prochain sera son dernier conseil municipal, et le 30 septembre, celui de l'élection de son successeur, Frédéric Lafforgue, actuel adjoint en charge de l'urbanisme.

« Le dernier service que je puisse rendre comme maire, c'est de transmettre le flambeau à quelqu'un de qualité. Je connais Frédéric Lafforgue depuis longtemps. Il a l'expérience de la gestion municipale et les qualités personnelles pour être un bon maire. Il a une autorité tranquille... »

Paralysie invisible

Mais l'élu n'a pas dit son dernier mot. Il restera conseiller municipal afin de  demeurer conseiller métropolitain « le temps qu'il faudra », et donc de siéger au Conseil métropolitain de Montpellier.

Les deux derniers mois n'y ont pas été tout à fait tranquilles, et même si Jean-Pierre Grand dit ne pas en garder d'amertume, il affiche néanmoins une colère sourde à l'encontre du maire de Montpellier et président de la Métropole, Philippe Saurel.

Le 5 juillet dernier, ce dernier a remanié l'exécutif de la collectivité et démis sept vice-présidents, parmi lesquels Catherine Dardé, déléguée à la cohésion sociale et adjointe au maire de Castelnau-le-Lez.

« Le président a décidé, pour des raisons politiques, de rompre le pacte de confiance avec certains maires, dont ceux des communes les plus importantes, regrette Jean-Pierre Grand. C'est dommage car la construction d'une Métropole n'est pas simple. Ce n'est pas uniquement une évolution statutaire, il faut une vision et un comportement adapté. Et il faut donc préserver comme la prunelle de ses yeux l'unité du conseil métropolitain, sinon on va vers une paralysie invisible. Comme le président Saurel n'aura plus la pleine main, il ne se lancera pas dans de beaux projets, mais restera dans petites communications quotidiennes sans intérêt ! Une Métropole est portée par l'ensemble des maires et non par un seul homme. »

L'élu est lapidaire : « Je vais seulement rappeler à Philippe Saurel qu'en politique, on peut être élu par hasard mais on n'est jamais réélu par hasard... ».

Ce 30 août, il intègrera le groupe apolitique qu'il qualifie de « gestion intercommunale », et qui va être constitué au sein du Conseil métropolitain où « chaque maire représente sa commune et non un parti politique ! », martèle-t-il.

« J'ai la faiblesse de penser qu'on peut toujours rectifier le tir... »

LR : ni division, ni morcellement

L'élu est aussi actif sur le vaste chantier qui va occuper son parti Les Républicains d'ici la fin de l'année.

« Localement, et dans l'Hérault en particulier, la droite doit être restructurée à partir d'un constat simple : nous avons perdu les élections mais nous n'avons pas perdu les électeurs. Il faut renouer avec ces électeurs, grâce à une stratégie et un discours de confiance. Il va falloir nous atteler à nous réunir, à réfléchir et à influer pour qu'il n'y ait pas de division ni de morcellement de notre famille politique. J'aurai mon rôle à jouer, d'autant que je reste le seul parlementaire Les Républicains du département... »

Cécile Chaigneau

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