Res publica montpelliéraine : Olivier Nys, "le projet, la méthode et l’état d’esprit"

Olivier Nys est le nouveau directeur général des services mutualisés de la Ville et de la Métropole de Montpellier. En provenance de Lyon, où il était DGS de la Métropole de Lyon, il a pris ses fonctions à la mi-septembre aux côtés du nouveau maire et président de la Métropole, Michaël Delafosse, pour travailler à la mise en œuvre des politiques publiques et à la bonne administration des deux collectivités. Quel regard (neuf) pose-t-il sur Montpellier ? Dans quel état d’esprit arrive-t-il ? Quelle est sa méthode de travail ? Rencontre.
Cécile Chaigneau
Olivier Nys est le DGS Ville et Métropole de Montpellier depuis la mi-septembre
Olivier Nys est le DGS Ville et Métropole de Montpellier depuis la mi-septembre (Crédits : DR)

Ce diplômé de Sciences Po et de l'Institut d'administration des entreprises d'Aix-en-Provence, originaire de Marseille et âgé de 53 ans, est un passionné de la res publica. Après avoir travaillé une dizaine d'années dans le conseil en finances publiques au sein du Cabinet Klopfer puis chez Finance Active, Olivier Nys a rejoint la fonction publique territoriale (voir son parcours ici). Depuis février 2016, il était le directeur général des services de la Métropole de Lyon, où il pilotait une collectivité de 9 200 agents disposant d'un budget annuel de 3,5 Mds €, et où il a géré l'atterrissage de la délicate fusion entre le Département du Rhône et la Communauté urbaine de Lyon. Nommé directeur général des services mutualisés de la Ville et de la Métropole de Montpellier, il s'est attelé, mi-septembre, à la prise en main de ces deux vastes administrations territoriales, soit 6 500 agents et des budgets annuels de 526 M€ (Ville) et 1,135 Mds € (Métropole).

Michaël Delafosse, le maire de Montpellier, et président de Montpellier Méditerranée Métropole, définit ainsi la feuille de route donnée à Olivier Nys : « Mettre en œuvre nos engagements de campagne et le programme pour lequel nous avons été élus, proposer une organisation de l'administration qui traduise ces engagements, redonner aux agents le sens de l'action publique et, enfin renouer avec l'innovation qui doit redevenir un marqueur de la Ville et de la Métropole de Montpellier ».

LA TRIBUNE - Quel souvenir vous gardez de votre collaboration avec Gérard Collomb à Lyon ?

OLIVIER NYS : « J'ai commencé à travailler à Lyon en 2002, c'est un marqueur fort dans une vie professionnelle. Gérard Collomb avait la vision de ce que devait être un grand territoire urbain. Il avait été élu en 2001 car, dans cette ville conservatrice, la droite était alors divisée. Aller contre le cours de l'histoire donne une énergie décuplée. J'ai appris à ses côté la force d'avoir une vision, de vite cibler ce qu'il faut faire, et en même temps l'énergie du challenger qui gagne. En 2008, il était élu dès le 1er tour. »

Vous avez essentiellement œuvré dans des villes de gauche. Cela a-t-il une importance pour vous ?

« Reims était dirigée par un élu de droite, et depuis oui, il s'agissait plutôt de villes pilotées par la gauche. Dans notre métier, on est dans une injonction paradoxale. On incarne l'administration dans sa plus grande neutralité pour assurer une continuité de service public - c'est la grandeur de notre métier - mais on travaille dans l'ombre, et en même temps, on fait ce métier car on est en phase avec le projet, la méthode et l'état d'esprit. C'est la raison pour laquelle je ne veux pas réduire la fonction au seul projet politique. On manage des troupes, on met en œuvre des politiques publiques et on développe des investissements, on impulse une méthode de management. »

Comment êtes-vous arrivé à Montpellier et quel regard portez-vous sur la ville ?

« C'est le fruit d'une rencontre. La parfaite harmonie, c'est quand on coche projet, méthode et état d'esprit. Ce qui m'a plu dans la rencontre avec Michaël Delafosse, c'est bien ça. Il a un programme sain, équilibré sur les 4 piliers que je juge essentiels : la cohésion sociale, la transition environnementale, l'attractivité et le développement économique, et enfin la qualité du service public et l'attention à la proximité... En arrivant, j'ai été frappé par la cohabitation de la diversité. Montpellier est une ville très jeune, on sent ici une sorte de movida ! Qu'on aime ou pas ce qui a été fait, on ne peut qu'être admiratif de cette dynamique créée par l'action publique. C'est le territoire français le plus dynamique des 30 dernières années ! Georges Frêche avait une vision du développement de la ville, et ça n'a pas trop mal marché : il existe aujourd'hui un niveau remarquable d'infrastructures et d'équipements publics, avec une importante vie culturelle et un territoire qui compte un grand nombre d'équipes professionnelles de sport, ce qui a contribué à l'image de la ville. Mais il ne faut pas minorer les enjeux de cohésion sociale... Ici, et c'est un des marqueurs de Montpellier, il existe une rupture dans les classes sociales. Le développement a été tel qu'on a une locomotive mais aussi des personnes qu'on a laissées au bord de la route... Ce qui m'a frappé chez Michaël Delafosse, c'est son attention à la sécurité, à la propreté de la ville, au quotidien des gens. Il veut s'inscrire dans une rupture par rapport au passé, faire différemment. Or je suis un convaincu qu'il n'y a pas de fatalisme, l'action publique est là pour tout essayer. Michaël Delafosse ne se sent dépositaire de rien et réinterroge tout. »

Vous avez pris vos fonctions à la mi-septembre, et vous êtes désormais, selon les propos de Michaël Delafosse, "l'homme-orchestre du projet politique". Comment abordez-vous votre mission ?

« J'ai d'abord bien sûr été dans une posture de diagnostic. Ma mission, c'est de faire atterrir le programme politique et de tracer le mandat, c'est-à-dire d'organiser une planification en matière d'investissements mais aussi de fonctionnement courant pour que toutes les directions aient leur feuille de route. Par exemple sur l'éducation, c'est 1 500 agents, il faut organiser le soutien scolaire, le temps périscolaire, arborer les cours d'école, etc. La commune est propriétaire de 1 millions de m2, ce qui en fait sûrement l'un des plus gros propriétaires de Montpellier, il y a donc un important volet de maintenance... L'objectif, c'est évidemment que l'administration soit la plus efficace possible. Un mandat passe très vite et beaucoup de choses se jouent dans les 18 premiers mois. »

On vous attribue une forte culture de la mutualisation des services. Vous avez géré la mutualisation des services à Reims entre la Ville et l'Agglomération, puis à la Métropole de Lyon issue de la fusion entre le Département du Rhône et la Communauté urbaine. Quels sont les enseignements qui pourraient vous servir aujourd'hui à Montpellier ?

« Manager des administrations est la sédimentation de plusieurs expériences. A Montpellier, il subsiste encore différents statuts entre les agents de la Métropole et ceux de la Ville. C'est un sujet qu'il faudra ouvrir car c'est vécu comme une iniquité. Je connais bien ce sujet, que j'ai en effet observé à Reims et à Lyon. A Lyon, ce que j'ai appris, c'est qu'une fois qu'on est dans la même collectivité, on peut hybrider des politiques publiques qui peuvent s'enrichir entre elles. Par exemple, l'insertion professionnelle et le développement économique offre une fertilité intéressante... A Montpellier, la mutualisation est déjà faite sur les finances et les ressources humaines, et elle est en cours pour les fonctions support. Il faut aussi ouvrir la mutualisation entre la Métropole et les communes volontaires sur certaines fonctions ressources, comme les services informatiques ou juridiques. Mais je ne le ferai qu'à la carte, à la demande des communes. »

Michaël Delafosse vous reconnait « un savoir-faire en matière de management, de dialogue social et d'expertise financière ». Vous allez manager 6 500 agents : dans quel type de management vous inscrivez-vous ?

« Un management humain, collectif, partenarial, transversal. C'est ce qui m'a séduit chez Michaël Delafosse, et c'est important car si on travaille avec un élu autocrate qui pratique un management vertical, ça casse tout. Michaël Delafosse et moi sommes en phase sur cette méthode-là. Les deux collectivités comptent entre 400 et 500 cadres, il faut leur faire confiance et leur accorder le droit à l'initiative. Je serai résolument porteur de ça. »

En 2014, la Ville avait été pointée du doigt pour un taux important d'absentéisme des agents. Où en est cette question ?

« Pour commencer, il faut établir un diagnostic. Le fait est qu'on a conservé, notamment à la direction de l'éducation, un fort taux d'absentéisme des agents. Le symptôme reste là. Il faut aller voir pourquoi il y a un tel absentéisme et en traiter la cause. Sur ce sujet, il n'y a pas de fatalisme, il ne faut pas se résigner. Nous avons une obligation de moyens. »

L'attractivité économique de la ville est un enjeu majeur. Comment voyez-vous la question du marketing territorial ?

« Montpelier a toujours su se marketer. On a connu "Montpellier la surdouée" (slogan lancé en 1985 par le maire Georges Frêche, NDLR) ou Montpellier Unlimited (lancé en 2012 par Jean-Pierre Moure, président de l'Agglomération, NDLR). Mais l'image, ça s'entretient car on est dans une concurrence mondiale compte tenu de l'ADN économique de la ville, capitale digitale. La stratégie économique doit être une stratégie de diversification, d'où l'idée de Michaël Delafosse de créer la Med Vallée, en surfant sur l'histoire de la ville. Le territoire a des forces mais il faut toujours aller chercher de nouveau espaces. »

Être DGS de deux collectivités de cette envergure impose en effet la gestion de nombreux et importants enjeux. Comment gérez-vous ça ?

« On ne peut pas faire ce métier si on est stressé. C'est un métier d'ascèse, qu'on fait par passion pour l'action publique, dans lequel on trouve du sens. Il faut trouver un équilibre de vie. Je pratique le footing le week-end et j'aime bien me détendre en allant voir des matches et des spectacles. »

Cécile Chaigneau

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