Produire et consommer local, un enjeu pour les communes : l’exemple de Montpellier et Castelnaudary

Certaines communes n’ont pas attendu la crise sanitaire pour se préoccuper de l’alimentation de leurs habitants. Mais la pandémie donne encore plus de sens aux politiques alimentaires qu’elles développent. Illustration avec l’exemple de la Métropole de Montpellier dans l’Hérault et de la ville de Castelnaudary dans l’Aude.
La Métropole de Montpellier a entrepris de cartographier tout le foncier public inexploité qui pourrait être remis en culture pour permettre l'installation d'agriculteurs en zone péri-urbaine.
La Métropole de Montpellier a entrepris de cartographier tout le foncier public inexploité qui pourrait être remis en culture pour permettre l'installation d'agriculteurs en zone péri-urbaine. (Crédits : iStock)

« Il ne faut pas rêver, l'autonomie alimentaire de Montpellier Métropole, on n'y arrivera pas. La production locale n'est pas suffisante pour approvisionner l'ensemble de la population. Ce que nous visons, c'est la souveraineté alimentaire, c'est à la dire la maîtrise de l'origine de notre alimentation ».

Vice-présidente de Montpellier Méditerranée Métropole, déléguée à la Transition écologique, l'Agroécologie et à l'Alimentation, Isabelle Touzard a pris à bras le corps cette délégation et met en place tous les leviers, dans le cadre de la Politique Agroécologique et Alimentaire (P2A) de Montpellier, élaborée avec l'ensemble des 31 communes de la métropole, pour offrir une alimentaire saine et locale au plus grand nombre. Une thématique dont la crise sanitaire a renforcé l'urgence.

Reconquête du foncier agricole

Le 19 mai dernier, à quelques jours du début de l'examen du projet de loi « Climat et Résilience », la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable et la commission des affaires économiques du Sénat ont d'ailleurs publié un rapport d'information commun « afin de dessiner les grandes lignes d'un modèle alimentaire français encore plus durable et encore plus local ». Il comprend 25 recommandations pour une alimentation durable et locale, avec l'ambition de « renforcer la souveraineté alimentaire et de consolider les initiatives locales en matière alimentaire ».

« Il faut changer de braquet et accélérer dans la reconquête de foncier agricole sur le territoire de la Métropole, préconise tout d'abord Isabelle Touzard. Nous sommes en train de cartographier tout le foncier public, aujourd'hui inexploité, qui pourrait être remis en culture et permettre l'installation d'agriculteurs en zone péri-urbaine. Cela représente environ 500 ha. Nous allons créer deux AFA (Association Foncière Agricole, NDLR), l'une au nord, l'autre au nord-ouest, qui auront pour mission de gérer ce foncier en le donnant en fermage à des agriculteurs. Les propriétaires privés qui le souhaitent pourront être associés à cette démarche. »

Des Maisons de solidarité alimentaire

Autre volet à l'étude dans ce programme pour un meilleur approvisionnement de la métropole en produits locaux : la structuration des filières agricoles.

« Pour certains produits comme la salade verte, les melons et tomates, nous n'avons aucun mal à nous approvisionner localement, les productions locales couvrent nos besoins et peuvent fournir la restauration collective, observe l'élue montpelliéraine. Pour les céréales et légumineuses, ça coince du fait d'un manque d'équipement pour trier et stocker ces productions. Pour les volailles, c'est encore plus compliqué : 80% des poulets servis dans les cantines scolaires en France sont importés. Nous passons en revue toutes les filières pour identifier les points de blocage et trouver des solutions. ».

Un travail de longue haleine...

L'accès à une alimentation saine et choisie pour les populations précaires est une autre ambition de la stratégie métropolitaine : « La crise sanitaire a aggravé la situation. Plus d'un million d'équivalents repas ont été distribués en 2020. Pendant le confinement, la mise en contact entre le MIN et le Secours Populaire a permis de proposer des produits locaux aux plus démunis. Nous voulons aller plus loin avec de nouveaux dispositifs alimentaires, comme des Maisons de solidarité alimentaire où les plus démunis pourraient s'approvisionner en produits locaux à des tarifs modulés ».

Mettre tous les acteurs autour de la table

Dans l'Aude, la commune de Castelnaudary s'est engagée de longue date en faveur d'une relocalisation de l'alimentation et du développement de filières locales. Dès 2018, elle a été l'une des toutes premières communes françaises à décrocher la labellisation de son Plan Alimentaire Territorial (PAT) et planche aujourd'hui sur une nouvelle version étendue à la communauté de communes (43 communes, 26.000 habitants).

Le développement d'une agriculture saine et locale, capable de satisfaire les besoins de la population locale est un des objectifs de ce plan, qui englobe également un volet éducation à l'alimentation et justice alimentaire.

« L'intérêt principal de cette démarche, c'est de mettre autour d'une table des acteurs qui n'avaient pas l'habitude de se rencontrer, défend Evelyne Guilhem, adjointe en charge du développement durable, de l'environnement et de l'agriculture à la mairie de Castelnaudary. Rapprocher des producteurs de volailles des ateliers de transformation, mettre en relation les éleveurs de la haute vallée de l'Aude avec les céréaliers du Lauragais, accompagner les installations d'agriculteurs et les conversions bio par des dégrèvements de taxe, encourager les groupements de producteurs pour la commercialisation en circuits courts, sensibiliser les scolaires au gaspillage alimentaire, éduquer à une alimentation saine .... Le PAT est transversal et concerne de multiples secteurs : foncier, restauration, gestion des déchets, action sociale, développement économique qui doivent être partie prenante de ce plan. »

82% des Français préfèrent les produits d'origine française

Cette ambition des communes de relocaliser les productions alimentaires sur leur territoire répond à une forte attente des Français, sans doute encore confortée par la crise sanitaire.

Selon un sondage Ipsos, entre 2014 et 2019, le nombre de Français privilégiant l'achat de produits locaux a bondi de 36% : ils étaient 41% en 2014 à acheter régulièrement des produits locaux, et cinq ans plus tard, ils sont 82% à préférer des produits d'origine française et 77% à s'approvisionner chez des producteurs locaux.

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