Privatisation de l'aéroport de Toulouse : Jean-Luc Moudenc a-t-il changé d'avis ?

Lors du dernier conseil municipal, le 10 avril, les élus de la ville de Toulouse ont voté à l'unanimité un vœu proposé par le groupe communiste qui demande à ce que l'aéroport de Toulouse-Blagnac reste sous maîtrise publique. Le maire UMP Jean-Luc Moudenc ne s'était jusqu'alors pas prononcé clairement contre la privatisation, et semblait même y voir des avantages. "Le maire n'a pas changé de position", martèlent ses proches. Décryptage.
Les proches de Jean-Luc Moudenc assurent que sa position "n'a pas changé"

Lors du conseil municipal marathon du vendredi 10 avril dernier (une journée entière de débats qui a notamment abouti à la hausse des impôts locaux), les élus de la Ville de Toulouse, dans leur ensemble, se sont prononcés contre la privatisation de l'aéroport de Toulouse. Plus précisément, le conseil municipal a voté un vœu déposé par le groupe communiste, qui demande que la gestion de l'Aéroport de Toulouse-Blagnac "reste sous maîtrise publique et que la cession des parts de l'État soit stoppée dans les plus brefs délais". Par ce vote, la Ville de Toulouse affirme également son soutien et sa participation dans la durée "à toute initiative coordonnant usagers et collectivités pour le refus de l'augmentation des vols de nuit, pour la baisse des nuisances aériennes, le soutien à l'emploi dans l'aéroport et le respect de son activité industrielle".

Le maire de Toulouse se positionne contre la "privatisation"

C'est la première fois que le maire UMP de Toulouse Jean-Luc Moudenc prend une position claire sur ce dossier. "Il n'avait jamais dit avant qu'il était contre. Mais il n'avait non plus jamais dit qu'il était pour", souligne le communiste Pierre Lacaze, à l'origine du vœu voté vendredi dernier. En effet, contrairement aux maires UMP de Nice ou de Bordeaux (Christian Estrosi et Alain Juppé), également concernés par la privatisation de leurs aéroports, Jean-Luc Moudenc ne s'était encore jamais affiché contre le projet du gouvernement.

"Il était le seul à ne pas s'exprimer. Sa position était intenable vis-à-vis de sa famille politique", analyse ainsi Pierre Lacaze.

Une non-position assumée par le maire et son entourage. Selon un proche de Jean-Luc Moudenc :

"Il n'a jamais pris position pour ou contre mais a toujours dit que, s'il était le ministre en charge du dossier, il n'aurait pas pris une telle décision. Néanmoins, la décision relève de l'État et a été prise avant que Jean-Luc Moudenc n'arrive au pouvoir au Capitole. Il a décidé d'être pragmatique et de faire en sorte que les conditions de la cession soit acceptables, puisque la cession elle-même était inéluctable."

Ainsi, plusieurs fois, devant les médias, le maire de Toulouse s'était montré confiant, assurant que les collectivités avaient obtenu des garanties, notamment pour l'avenir d'Airbus, mais aussi sur le financement par le nouvel actionnaire du Parc des expositions.

Contacté, le maire de Toulouse, en vacances, n'a pas répondu à nos sollicitations. Son adjoint aux Finances Sacha Briand, "accaparé par le budget", affirme "ne pas avoir vraiment suivi le débat sur l'aéroport" et renvoie vers un autre adjoint, François Chollet. Selon ce dernier, "la promesse faite par le futur acquéreur de financer le Parc des expos n'est pas remise en cause". Pour rappel, le futur acquéreur, Symbiose, se serait engagé à financer l'infrastructure à hauteur de plusieurs dizaines de millions d'euros.

Par ailleurs, un autre élément serait à prendre en compte, selon le communiste Pierre Lacaze : les départementales.

"Il ne faut pas oublier que les candidats de droite, soutenus par Jean-Luc Moudenc, ont fait campagne sur le thème de l'opposition à la privatisation. Il devait clarifier sa position."

Pour l'élu EE-LV Antoine Maurice,

"Ce vote peut contribuer à redorer l'image de centriste de Jean-Luc Moudenc, largement écornée pendant les départementales, mais l'a-t-il vraiment pensé comme cela ? Je n'en suis pas sûr. D'ailleurs, je me demande parfois si Jean-Luc Moudenc a bien réalisé la portée de son vote."

En effet, le vœu sera transmis au Premier ministre. "C'est un signe fort. Jusqu'alors, Jean-Luc Moudenc avait refusé de voir le changement d'actionnaire comme un problème", analyse l'écologiste.

Le "pragmatisme" du maire

Le maire n'a pas changé d'avis, entend-on dans les couloirs du Capitole, il est "pragmatique".

"Preuve de ce pragmatisme, nous avons fait enlever du vœu le mot inexact de 'privatisation' et, pour l'essentiel, ce texte s'attache à préserver l'intérêt du territoire et des riverains, ce à quoi nous avons toujours été attachés, d'où notre vote. Le vœu demandait également que l'exploitation reste sous maîtrise publique, ce qui a été l'un des buts recherchés et atteint par les collectivités locales", précise un collaborateur de Jean-Luc Moudenc.

"Jean-Luc Moudenc a fait changer le mot privatisation pour le remplacer par 'cession des parts de l'État', ce qui n'est pas faux", confirme Pierre Lacaze.

Pour François Chollet, la position de Jean-Luc Moudenc a toujours été claire et lisible :

"Jean-Luc Moudenc n'a pas changé d'avis, sa position a toujours été claire et c'est la suivante : l'aéroport doit rester sous maîtrise publique, et c'est le cas, car les collectivités et l'État sont majoritaires. Le vœu permet d'affirmer cela et nous sommes d'accord avec les communistes sur ce point. Par ailleurs, la vente de 49,9 % des parts de l'État étant actée, autant faire en sorte que cela se passe le mieux possible."

Pour rappel, jeudi 9 avril, Jean-Luc Moudenc avait voté, en conseil métropolitain, contre un recours en justice qui attaquerait le pacte d'actionnaires (qui lie l'État au futur acquéreur Symbiose). Une action juridique jugée inutile, et qui aurait eu "peu de chances d'aboutir". C'est finalement le Collectif contre la privatisation de l'aéroport, mené par l'avocat Christophe Lèguevaques, qui porte ce recours devant le tribunal administratif de Toulouse.

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