Pour ou contre Occitanie ? Les réactions mitigées des acteurs économiques

Par objectif-languedoc-roussillon.fr  |   |  1083  mots
Après les résultats de la consultation populaire, dévoilés le 16 juin, le monde économique réagit au choix plébiscité par les 203 000 votants. Le nom Occitanie interpelle les professionnels de l'agroalimentaire, du tourisme ou de l'industrie, en bien ou en mal, et ne laisse personne indifférent.

Les presque 204 000 personnes ayant participé à la consultation ouverte par le Conseil régional, le 9 mai dernier, ont donc placé le nom Occitanie en tête des 5 choix possibles pour baptiser Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées (44,9 % des votes). Un résultat dont la présidente Carole Delga a pris acte, le 17 juin, tout en rappelant une nouvelle fois qu'il ne lierait pas le vote final des conseillers régionaux, prévu lors de l'assemblée plénière du Vendredi 24 juin 2016.

En attendant, les réactions du monde économique pleuvent depuis cette annonce. La rédaction d'Objectif Languedoc-Roussillon en a collecté quelques unes au sein de secteurs intéressés au premier chef par ce nouveau nom, les valeurs qu'il est censé incarner, l'image qu'il doit porter, etc.

Bénédicte Laurent, fondatrice de Namae Concept : « Proportionnellement au nombre d'habitants dans la grande région, 203 000 participations, ça reste limité. Comme dans beaucoup de tentatives de démocratie participative, ce sont les plus engagés qui prennent plus facilement la parole car ils y voient un enjeu que les autres ne voient pas encore. Dans ces résultats, je vois deux problématiques : un manque de représentativité, notamment des Catalans qui sont exclus avec le nom Occitanie, et le revers de la médaille de la consultation citoyenne. On risque le sentiment de déni de démocratie : la consultation a été très médiatisée pour déclencher un maximum de participation mais, en réalité, elle fait partie d'une plus large consultation entreprise pour trouver un nom. La Région a consulté plusieurs profils. Il faut tenir compte de cet avis citoyen mais il est à croiser avec d'autres éléments. »

Jalil Benabdillah, P-dg de SD Tech : « Occitanie n'était pas mon choix. Je préfèrerais quelque chose qui évoque la Méditerranée. On voit bien la volonté de se référer à l'histoire du territoire qui amène à ce choix, mais on est loin d'une ouverture et d'un marketing territorial intéressant. Je suis un international convaincu. Or aux Etats-Unis, en Australie ou en Suède, Occitanie ne dira rien à personne... Les choix proposés étaient limités. Parmi eux, j'aime bien Pyrénées-Méditerranée : tout le monde connaît ces deux noms. C'est intéressant pour le territoire français mais aussi à l'international en terme d'attractivité. Et cela ne trahirait pas notre identité. »

André Deljarry, président de la CCI de Montpellier : « Occitanie n'est pas un bon choix. C'est une notion plus large que la région LRMP, donc veut-on faire croire que nous pourrions aller au-delà ? On peut se demander si Carole Delga en tiendra compte vu le faible nombre de votants : à peine 3 % de la population régionale a pris part à ce vote. Par ailleurs, j'observe que Pyrénées-Méditerranée avait été mis en 3e position par le comité d'experts, et que ce nom arrive aussi en 3e position après cette consultation. Je me dis qu'il reste une chance qu'il soit repêché. »

Jean-Yves Labattut, président de l'Association pour la promotion des flux touristiques (APFTE) à Montpellier : « Je suis horrifié de voir qu'Occitanie arrive en tête. Quand j'étais élève au cours élémentaire, j'ai appris que Montpellier et Toulouse étaient les capitales du Languedoc, et pas d'autre chose. »

Emmanuelle Darras, fondatrice de l'association Racines Sud : « Je viens de faire un sondage auprès d'un millier d'expatriés dans le cadre de ma dernière newsletter, et le nom d'Occitanie est arrivé largement en tête devant les autres propositions. Cela me convient car c'est plus large, c'est ancré dans une culture de langue. Prononcé par des étrangers, c'est même le nom le plus sexy. »

Jérôme Villaret, délégué général du Conseil interprofessionnel des vins du Languedoc (CIVL) : « L'interprofession des vins AOP du Languedoc et IGP Sud de France étaient favorable au nom Languedoc-Pyrénées. Néanmoins, le choix d'Occitanie ne pose pas de grandes difficultés pour les AOC et IGP. Dans de nombreux cas en France, le nom des vignobles n'est sont pas associé au nom de la région. C'est le cas en Vallée du Rhône ou pour le vignoble du Sud-Ouest. Il faudra simplement qu'on explique que le Languedoc est en Occitanie. Après, nous avons la bannière Sud de France, c'est ce qui est important. »

Christophe Musset, président du groupe Médias du Sud : « Le nom d'Occitanie ne me dérange pas. Ma seule crainte, c'est qu'il réveille des envies de « guerre civile » chez les populations qui n'appartiennent pas à cette culture, comme on l'a vu à l'époque des très fortes tensions autour du nom Septimanie. »

Ils ont dit, lors des 2e Rencontres de la Nouvelle Région organisées par La Tribune Toulouse et Objectif Languedoc-Roussillon, le 24 mai 2016 à Narbonne :

Jean-Paul Labadie, directeur régional d'Air France KLM : « De part mon expertise sur les marchés extérieurs à l'étranger, je pense qu'il ne faut pas chercher quelque chose de très compliqué. Je ne suis pas pour deux noms. Attention aussi aux noms composés qui finissent en sigles. Je suis très attaché au territoire et aux marques. Étant du Pays Basque, je parle et comprends l'Occitan, pourtant j'ai voté pour Languedoc car Occitanie est une marque qu'il faudra placer, ce qui prendrait énormément de temps et d'argent. »

Pierre Mestre, P-dg d'Orchestra : « J'ai une préférence pour Occitanie et Languedoc. Occitanie, ce serait l'occasion de prendre une revanche sur les gens qui, à une époque, nous ont empêché de parler l'Occitan... Je ne suis pas sûr qu'on puisse complètement s'affranchir de notre histoire. Mais l'Occitanie est une très vaste région. Faut-il rajouter Méditerranée ? Je finis par douter ! »

Jacques Gravegeal, président du Syndicat des producteurs de l'IGP Pays d'Oc : « Je suis dubitatif mais je préfère Occitanie qui va très bien avec Pays d'Oc. Mais quel que soit le nom, il faudra beaucoup de moyens pour que cela serve l'économie régionale. »

Jean-Paul Laborie, géographe, professeur émérite à l'Université de Toulouse Jean Jaurès : « Dans cette nouvelle région marquée par un dynamisme démographique et une accumulation de nouveaux arrivants (50 000 annuels), 45 % des gens qui vivent ici n'y habitaient pas auparavant. Quand on parle du nom Occitanie, il faut leur faire un cours, ils ne mettent pas forcément derrière ce mot le contenu que nous y associons culturellement. »