L’Occitanie, une union contre-nature ?

Par Marie Corbel  |   |  728  mots
Les réseaux de Toulouse et Montpellier, selon l'Insee, sont respectivement tournés vers Bordeaux et Aix-Marseille
Le tropisme de Midi-Pyrénées vers la Nouvelle-Aquitaine et celui du Languedoc-Roussillon vers Paca ne prédisposaient pas ces deux anciennes régions à fusionner : c’est l’un des enseignements d’une étude de l’Insee Occitanie et de l’AUA Toulouse, présentée le 14 février.

Saint-Valentin ou pas, en matière d'affinité, Toulouse et Montpellier partent de loin et la relation entre leur deux régions respectives est, à ce jour, tout sauf fusionnelle. C'est ce que révèle une étude menée conjointement par l'Insee Occitanie et l'Agence d'urbanisme et d'aménagement Toulouse aire métropolitaine (AUA/T), le 14 février, dans les deux métropoles.

L'étude analyse l'ensemble des aires urbaines d'Occitanie (au nombre de 24) et les relations qu'elles entretiennent ensemble ou avec des aires urbaines des régions limitrophes. L'intensité des « relations » est appréciée au regard des flux de personnes et d'entreprises. Les déplacements domicile-travail, les déménagements, les migrations résidentielles des étudiants ou encore les transferts d'établissements sont autant de données utilisées pour déterminer des réseaux de territoires.

Première étude à « grande échelle »

« Il s'agit du premier exercice de ce genre à une telle échelle,  déclare Jean-Marc Mesquida, le directeur de l'AUA/T. C'est un apport de connaissance sur l'ensemble du territoire de la région Occitanie dans lequel se dégage clairement un certain nombre de flux. »

Premier constat des deux auteurs de cette étude, Bernard Nozières de l'Insee Occitanie et Sylvain Alasset de l'AUA/T : impossible de se cantonner aux limites administratives de l'Occitanie car, en matière de flux, « les frontières entre les territoires sont particulièrement poreuses ». Résultat : l'étude porte sur « la moitié sud de la France continentale », soit 92 aires urbaines.

Deux grands réseaux urbains

Le second résultat du travail était « attendu » : il s'agit de l'existence de deux principaux réseaux d'aires urbaines en région, l'un dit de Toulouse et l'autre de Montpellier. Il en existe un troisième, « plus petit », avec Perpignan.

« Plus étendu » que celui de Montpellier, le réseau de Toulouse compte deux millions d'habitants répartis sur treize aires urbaines dont Agen et Villeneuve-sur-Lot, en Nouvelle-Aquitaine. Côté ex Languedoc-Roussillon, le réseau de Montpellier est composé de sept aires urbaines qui concentrent 1,4 million d'habitants. Celui-ci se caractérise par « des liens importants en son sein plus intenses que ceux du système toulousain ».

« Relativement autonome, le réseau articulé autour de l'aire urbaine de Montpellier  est essentiellement languedocien, indique Sylvain Alasset. Il s'étire jusqu'à Perpignan et s'accroche de manière privilégiée à celui de Marseille-Aix. »

Peu de relations entre les deux réseaux

« Plus adossés qu'entrelacés », ces deux grands réseaux régionaux entretiennent peu de relations. Ainsi, en matière de déplacement domicile-travail, seuls 2 % des flux étudiés s'effectuent entre Toulouse et Montpellier.

La proportion des flux réalisés entre le réseau de Toulouse et celui de Montpellier s'accroit lorsqu'il s'agit des déménagements : elle est de 13,2 % pour les étudiants et de 16 % pour l'ensemble des personnes.

« Quel que soit le flux étudié, les aires de Toulouse et Montpellier appartiennent toujours à des réseaux territoriaux différents, note Sylvain Alasset. Ces deux réseaux ne sont pas encore agrégés. L'aire urbaine de Toulouse se raccroche à l'aire urbaine de Bordeaux tandis que l'aire de Montpellier, plus autonome, est plus orientée vers le réseau Marseille-Aix. »

Point zéro de la relation

« Nous sommes au point T zéro de la relation entre le réseau de Toulouse et celui de Montpellier, indique Jean-Marc Mesquida, le directeur de l'AUA/T. Il faudra refaire un point dans cinq à dix ans pour constater que certaines relations se développent. Toulouse va probablement aller davantage vers l'arc méditerranéen sans pour autant tourner le dos à l'Atlantique. »

Le réseau urbain de Toulouse et celui de Montpellier n'expriment pas une attirance spontanée mais cela n'augure pas de la suite, précise Jean-Philippe Grouthier, le directeur de l'Insee Occitanie :

« Les départements ont été créés en regroupant des territoires qui n'avaient aucune cohérence car l'idée était de casser les solidarités féodales, indique-t-il. Ils ont progressivement gagné en cohérence mais ça a pris du temps. »

Autre lot de consolation : l'hétérogénéité mise en évidence en Occitanie se retrouve également dans d'autres nouvelles régions telles que la région Grand Est avec « la partie Alsace qui reste assez autonome » ou encore la région Auvergne-Rhône-Alpes avec des réseaux urbains qui sont également « loin de s'agréger ».