Réforme de l'apprentissage et business schools : "un coup d'arrêt pour les classes moyennes"

Par Matthias Bauland  |   |  449  mots
Matthias Bauland, directeur général adjoint au développement de Montpellier Business School (Crédits : MBS)
Alors que les décrets d'application de la loi « Pour la liberté de choisir son avenir professionnel » ne sont pas encore parus, les business schools alertent sur le risque de la fixation des niveaux de prise en charge des contrats d’apprentissage en-deçà des couts réels de formation. Elle menace directement l’accès des classes moyennes aux Grandes Ecoles de Management selon Matthias Bauland, directeur général adjoint de Montpellier Business School, où 90 % des étudiants en Programme Grande École passent, actuellement, par l'alternance.

Comme l'a déclaré Anne-Lucie Wack, la présidente de la Conférence des Grandes Ecoles (CGE), « l'apprentissage est un nouveau modèle pédagogique, un modèle d'excellence et un levier d'ouverture sociale ». L'apprentissage développe en effet l'employabilité des diplômés via la professionnalisation par l'expérience concrète de l'entreprise et la socialisation professionnelle ; mais il favorise également l'ouverture sociale de ces formations d'excellence par le financement partiel ou total des études par l'entreprise.

Ainsi, dans le système actuel, l'étudiant en alternance est salarié et ne paye pas de droits de scolarité, qui sont intégralement pris en charge par son entreprise d'accueil via la mobilisation de la taxe d'apprentissage. Ce principe fondamental réduit de manière drastique la barrière sociale que peut constituer le coût des études en Grande École de Management.

Un puissant véhicule en faveur de l'égalité des chances

L'alternance (apprentissage ou contrat de professionnalisation) représente ainsi, pour des Grandes Écoles de Management désormais soumises à un impératif d'auto-financement, le plus puissant véhicule d'une politique de diversité et d'égalité des chances efficace et impactante.

À Montpellier Business School, l'alternance permet aujourd'hui à l'école d'accueillir dans ses programmes d'enseignement supérieur les meilleurs talents, issus de toutes les strates de la société, selon le seul critère de sélection valable : celui de la qualité académique. L'école présente ainsi une répartition par CSP et un taux de boursiers comparable aux universités, et contribue ainsi pleinement à sa mission d'enseignement d'intérêt général.

Cela est possible uniquement grâce aux entreprises d'accueil qui prennent aujourd'hui en charge le coût réel de la formation, c'est-à-dire l'ensemble des charges concourant à la réalisation du programme et de l'accompagnement organisationnel et humain de l'alternance. Ces financements sont assurés au travers de la taxe d'apprentissage (part « quota » et part « barème »).

Une réduction mécanique du nombre d'apprentis

Dans le cadre de la réforme, la fixation d'un montant unique par contrat inférieur au coût réel de formation déboucherait mécaniquement sur une réduction du nombre d'apprentis dans les Grandes Écoles, excluant de fait les talents socialement moins favorisés de la filière d'excellence et du formidable sésame socio-économique que constitue un diplôme de Grande École de Management.

Développer au sein des Grandes École de Management une politique d'ouverture, de diversité et d'égalité des chances d'ampleur significative et non simplement symbolique, passe donc impérativement par le maintien d'un financement minimal des contrats d'alternance au niveau du coût réel complet de formation.