Little Marcel et Sonia Rykiel, le pot de terre contre le pot de fer ?

Par Cécile Chaigneau  |   |  562  mots
La marque Little Marcel, qui décline ses collections pour femmes, hommes et enfants, s'est fait une identité avec les rayures multicolores sur fond noir.
La marque aux rayures multicolores, née sur les bords de la Méditerranée dans le Gard, est en prise depuis quelques années à des démêlés judiciaires avec la société de Sonia Rykiel dans une affaire de concurrence déloyale. Ses fondateurs espèrent la fin prochaine de cet épisode.

C'est une histoire de rayures multicolores sur fond noir. L'identité, qui a fait le succès de la marque Little Marcel (basée à Aigues-Mortes - 30), a subi une attaque en règle de l'entreprise de Sonia Rykiel qui poursuit l'entreprise gardoise devant les tribunaux pour concurrence déloyale depuis janvier 2009.

En septembre 2011, la sentence tombe : la marque Little Marcel est condamnée par le Tribunal de commerce de Paris à verser 250 000 € à la société de Sonia Rykiel.

L'affaire ne s'arrête pas là : assignée à nouveau car elle poursuit « des actes de concurrence déloyale et de parasitisme économique* », l'entreprise gardoise est à nouveau condamnée en mai 2012 à verser 300 000 €.

Guerre judiciaire

À Aigues-Mortes, Éric Schieven, co-fondateur de l'entreprise avec Lynda Leseigneur, fait état d'une certaine incompréhension. Et réfute avoir jamais employé l'expression « look rykielien » qu'on lui attribue : « Ce n'est pas moi, ce sont des journalistes qui ont employé cette expression ! »

« On a essayé de déposer les rayures à l'INPI mais cela nous a été refusé, à nous et à d'autres, se défend-il, rappelant au passage que les rayures de Sonia Rykiel ne sont pas non plus protégées. Changer les couleurs des rayures, ce n'est pas protégeables. Alors on est partis du principe que rien n'est déposable, on s'est renseigné auprès de nos avocats qui nous ont dit qu'il n'y aurait pas de problème. »

Mais fin 2014, la cour d'appel confirme pourtant les deux jugements de première instance.

« Sonia Rykiel s'approprie des rayures qu'elle n'a pas déposées. Elle nous a pris dans le viseur sans plus nous lâcher, en faisant de tout ceci une affaire de principe. C'était le pot de terre conte le pot de fer... Sur les conseils de nos avocats, nous avons payé les sommes dues, mais on ne nous a pas interdit d'utiliser les rayures, c'est là tout le paradoxe ! Ce sont des sommes importantes, forcément, cela a fragilisé notre trésorerie, mais nous n'avions pas le choix. »

Éric Schieven annonce que Little Marcel continuera à utiliser les rayures, identitaires de la marque.

« C'est notre ADN, répond Éric Schieven. D'autres marques nous ont copiés nous aussi, que je ne peux pas attaquer. On s'y perd... La logique serait que la rayure appartienne à quelqu'un pour pouvoir attaquer les autres qui feraient pareil. Beaucoup de marques se sont engouffrées dans le créneau de la rayure et ne sont pas embêtées. »

Bientôt de nouveaux marchés

Mais, même s'il s'en défend, la nouvelle collection semble pourtant signer un changement d'orientation. Un coup d'œil sur le site internet révèle des rayures sur fond noir retravaillées et stylisées différemment, voire même des rayures sur fond blanc, ou encore d'autres motifs.

L'entreprise gardoise annonce aujourd'hui 175 salariés. Son réseau compte 33 boutiques en propre, et elle vend ses produits dans environ 500 boutiques multimarques. En avril, elle révélait la mise en place d'un réseau de vente à domicile. Et ne communique toujours pas sur son chiffre d'affaires.

« Nous allons travailler sur la décoration intérieure maintenant, et développer l'Europe et même l'international par le biais de licences », annonce Éric Schieven.

*: Le fait pour un tiers de vivre en parasite dans le sillage d'un autre en profitant sans rien dépenser de ses efforts et de son savoir-faire.