A Montpellier, l’Ecole Simplon lance des formations inclusives pour le secteur du jeu vidéo

La filière du jeu vidéo, très dynamique sur le territoire montpelliérain, a besoin de talents. Pour contribuer à ces besoins, l’Ecole Simplon, connue pour ses valeurs d’inclusion, lance sur son campus de Montpellier un parcours de formations dédiées.
Cécile Chaigneau
Dans le cadre du dispositif « La Grande Fabrique de l’Image » de France 2030, ISART digital et Simplon se sont associés pour créer des formations jeux vidéo accessibles.
Dans le cadre du dispositif « La Grande Fabrique de l’Image » de France 2030, ISART digital et Simplon se sont associés pour créer des formations jeux vidéo accessibles. (Crédits : DR)

L'industrie française du jeu vidéo, volet d'envergure des industries culturelles et créatives (ICC), connaît une forte croissance au niveau mondial ces dernières années. Dans ce secteur en constante mutation, l'enjeu des compétences est central et stratégique. Pour préserver cette croissance, les studios doivent pouvoir recruter des talents, et la filière s'assurer d'avoir des formations adaptées à ses besoins actuels et futurs.

En 2023, un consortium regroupant huit associations professionnelles régionales de la filière jeu vidéo (dont Push Start, association des professionnels de l'industrie du jeu vidéo en Occitanie) et le syndicat national du jeu vidéo (SNJV) ont publié un diagnostic des compétences et des métiers de la filière jeu vidéo en France (voir encadré). Objectif : actualiser l'identification des besoins en compétences des studios de la filière et de l'offre de formation pour le jeu vidéo proposée en France, afin, à terme, de proposer des pistes de travail pour améliorer l'offre de formations. Car aujourd'hui, 91% de ces formations sont proposées par des établissements privés et coûtent plusieurs dizaines de milliers d'euros par an.

« Ce diagnostic a mis en exergue un manque énorme de formations publiques, ce qui génère une discrimination par les finances, un manque de profils séniors et expérimentés, un manque flagrant de formation professionnelles continue, et un manque de cohérence parfois entre l'offre de formation et les besoins réels des studios », résume Gaetan Theyssier, administrateur chez Push Start.

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Former 250 personnes

A Montpellier, l'Ecole Simplon, acteur de formation de l'économie sociale et solidaire (100 campus dans le monde, dont 79 en France) formant aux métiers du numérique, lance un parcours de formations dédiées aux métiers du jeu vidéo. Une initiative qui fait sens dans un écosystème du jeu vidéo très dynamique, emmené par la locomotive Ubisoft.

« Nous adressons plutôt des profils de demandeurs d'emploi ou de personnes éloignées de l'emploi, pour lesquels le numérique est devenu un facteur de possibilité d'avenir, rappelle Christelle Boudet, directrice régionale Simplon Grand Sud-Ouest (Occitanie et Nouvelle-Aquitaine), le 16 mai lors du lancement des formation jeux vidéo à Montpellier. A ce jour, 30.000 personnes ont été formées chez Simplon, avec 93% de réussite au passage des certifications et titres professionnels, et 70% de sorties positives vers un emploi durable. »

A l'origine de ces formations dédiées au jeu vidéo, l'appel à projet de la Grande Fabrique de l'image dont a été lauréate l'Ecole Simplon en mai 2023.

« L'objectif, c'est d'appareiller l'outil industriel français dans les ICC car il y a des tensions sur le marché de l'emploi, en formant, sur les trois prochaines années, 250 personnes grâce à des parcours 100% pris en charge pour garantir inclusion et diversité, précise Emmanuel Primard, responsable projet Gaming chez Simplon, basé à Montpellier mais qui agit à l'échelle nationale puisqu'il existe par ailleurs déjà des formations jeux vidéo sur les autres places fortes françaises de la filière, à Lyon, Bordeaux et Paris. Dès le départ, nous nous sommes inscrits dans une logique partenariale avec Ubisoft, ISART Digital, Push Start, Meta, Women in Games France, le Syndicat national du jeu vidéo ou Afrogameuses. Nous nous appuyons également sur des prescripteurs comme France Travail ou les Missions locales. »

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Des studios pourtant peu friands d'alternance

A compter de septembre 2024, l'Ecole Simplon de Montpellier ouvre donc ce nouveau parcours comprenant une première formation courte (6 semaines) de testeur jeu vidéo en Q/A (contrôle qualité), sorte de porte d'entrée permettant d'accéder à deux formations : technicien support spécialisation studio jeux vidéo sur trois mois (octobre, novembre décembre 2024), suivie d'une alternance de 18 mois qui démarrera en janvier 2025 pour obtenir un titre de diplôme niveau bac+2 de technicien supérieur systèmes et réseaux (TSSR). Plus tard, des formations de développeurs/programmeurs de jeux vidéo devraient ouvrir.

Quinze personnes seront sélectionnées pour la première promotion, et l'Ecole Simplon annonce deux job-dating pour candidater, les 9 juillet et 3 septembre. Mais pour ça, il faut aussi (et surtout) trouver des studios qui accepteront de prendre les personnes en alternance, condition sine qua none de France Travail pour financer les formations. D'autant que les studios de développement de jeux vidéo ne sont guère friands du principe de l'alternance, collant mal à leurs cycles de production...

« Ça fait partie du challenge, mais nous avons déjà pris des contacts avec des studios montpelliérains, répond Emmanuel Primard. Les formations que nous proposons impactent moins le cycle de production d'un studio de jeu vidéo car il ne s'agit pas de développement. D'autant que ce type de formations qui n'existent pas donc les studios sont plutôt preneurs de ces compétences. »

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Une première expérimentation avec Ubisoft

Chez Ubisoft Montpellier, la DRH Sandra Vernus semble avoir trouvé la méthode : « Il faut convaincre les managers que c'est avant tout une question d'organisation. Et rappelons que l'alternant n'a pas vocation prendre le travail d'un salarié titulaire... ».

La DRH indique qu' « Ubisoft a connu une croissance de 30 à 40% sur les trois dernières années, et aujourd'hui, le site de Montpellier compte 500 salariés ». Si le studio montpelliérain a calmé sa dynamique de recrutement, Sandra Vernus se dit partante pour prendre quelques alternants de l'Ecole Simplon avec laquelle Ubisoft a déjà travaillé. Une sorte d'expérimentation préfigurant les formations lancées aujourd'hui...

« Notre partenariat avec Simplon remonte à 2021 pour la formation débouchant sur le titre professionnel de TSSR, raconte Jennifer Mestre, manager RH Ubisoft Montpellier. A l'époque, nous avons dû aller démarcher d'autres studios et entreprises montpelliéraines pour sourcer d'autres besoins en alternance et monter la formation. »

En témoignent Morgane Grau-Bannino, ancienne technico-commerciale dans le mobilier urbain, aujourd'hui Tools support spécialist chez Ubisoft, ou Théo Bihan, formé initialement à l'audiovisuel et désormais junior Q/A chez Ubisoft.

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« Portes fermées » pour de nombreux jeunes

L'initiative est saluée par Hind Emad, la vice-présidente de Montpellier Méditerranée Métropole en charge de l'économie : « La thématique est importante, que ce soit en matière d'inclusion ou de jeu vidéo. Car la feuille de route du développement économique de Montpellier fait une part belle aux ICC. Aujourd'hui, beaucoup de petits studios peinent à recruter des talents, l'initiative de Simplon est une bonne nouvelle pour le territoire ».

Une représentante des Missions locales se réjouit également : « Nous voyons de nombreux jeunes qui sont en demande et aimeraient travailler dans le jeu vidéo mais sont empêchés par discrimination financière... Les portes sont souvent fermées alors que beaucoup ont du talent ! ».

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L'industrie du jeu vidéo en France en chiffres

Selon les chiffres fournis par le SELL (Syndicat des Editeurs de Logiciels de Loisirs) en 2021 et 2022, 73% des Français jouent aux jeux vidéo au moins occasionnellement (soit 38,29 millions de joueurs et joueuses) dont la moyenne d'âge est de 39 ans.

En 2021, le chiffre d'affaires du marché mondial du jeu vidéo était de 192,7 milliards de dollars, soit 4 fois celui de la musique (25,9 milliards de dollars) et du cinéma (21,3 milliards de dollars, contre 42,3 milliards de dollars en 2019) réunis.

Le nombre d'entreprises de développement et d'édition de jeux vidéo s'est démultiplié en France ces dix dernières années pour atteindre aujourd'hui près de 1.200 sociétés en activité, dont 700 studios de développement de jeux vidéo.

Selon l'AFJV, propriétaire du site de recrutement le plus utilisé en France par les professionnels de l'industrie du jeu vidéo, le nombre d'offres d'emploi déposées pour des postes basés en France a augmenté de 41% entre 2020 et 2021, passant de 1.855 à 2.612 offres référencées.

Cécile Chaigneau

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