Collecte de dons : « L'inflation impacte les moyens du "petit" donateur et Cause à Effet fait face à une pénurie de recruteurs »

Recruter des donateurs dans la rue au profit d’associations humanitaires ou de solidarité internationale, c’est ce que font chaque jour les salariés de l’entreprise montpelliéraine Cause à Effet. Dans le contexte actuel, la tâche se révèle un peu plus ardue.
L'entreprise montpelliéraine Cause à Effet est spécialisée dans la collecte de fonds en face à face pour des associations humanitaires et environnementales, ici pour la Croix-Rouge.
L'entreprise montpelliéraine Cause à Effet est spécialisée dans la collecte de fonds en face à face pour des associations humanitaires et environnementales, ici pour la Croix-Rouge. (Crédits : Cause à Effet)

On les croise régulièrement dans les cœurs de villes, vêtus d'un tee-shirt aux couleurs d'une association humanitaire ou environnementale et sollicitant les passants pour les encourager à verser un don mensuel en faveur d'une cause qui leur serait chère... Ces collecteurs de dons sont peut-être des salariés de l'entreprise montpelliéraine Cause à Effet, fondée par Julien Bosch en 2009 et spécialisée dans la collecte de fonds en face à face dans la rue. Parmi les associations qui sollicitent ses services figurent Médecins dans frontière, Amnesty International, Action contre la faim, la Croix rouge française, etc.

« Nous sommes de plus en plus sollicités : d'un côté, il y a un désengagement de l'État avec une baisse des subventions et de l'autre, les besoins de ces associations augmentent avec de plus en plus de personnes qui se retrouvent dans le besoin en raison du contexte économique mais aussi des conflits et des catastrophes qui se multiplient dans le monde », explique Julien Bosch.

Selon le Baromètre de la générosité réalisé par Novos et France Générosité, en 2023, la collecte a progressé de 2,1% en euros courants par rapport à 2022 (hors dons sur appel d'urgence médiatisée). L'étude précise que dans une année encore marquée par une forte inflation, « en prenant comme référence le coût de la vie en décembre 2023 et en réévaluant les montants des dons à l'aide de l'indice des prix mensuel fourni par l'Insee, la générosité baisse de 2,4% en euros constants en 2023 par rapport à 2022 ». Le baromètre note d'ailleurs « une poursuite de la baisse des dons ponctuels inférieurs à 150 euros, avec notamment un net recul des dons inférieurs à 50 euros ».

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« Plus de 40 millions d'euros versés aux associations »

L'entreprise Cause à Effet recrute en moyenne près de 60.000 donateurs réguliers par an, qui s'engagent à verser par prélèvement automatique en moyenne 12,5 euros par mois et cela pendant une durée de quatre à cinq années. Pas de profil type chez ces donateurs, même si la méthode de collecte - en face à face dans la rue - opère davantage auprès des jeunes âgés de 25-26 ans.

« L'argent ne transite absolument pas par nous, précise Julien Bosch. Les versements se font directement auprès de l'association en question. Au total, une année de collecte par nos soins représente plus de 40 millions d'euros versés aux associations. »

Dans ce contexte instable, aussi bien au niveau politique qu'économique, la générosité des Français est-elle au mieux de sa forme ? Le dirigeant livre son observation : « Le donateur ne donne que lorsqu'on lui demande, il faut donc le solliciter, et en l'occurrence, on sent une légère baisse depuis le début de l'année. L'inflation impacte nécessairement les moyens du "petit" donateur et de notre côté, nous faisons face à une pénurie de main d'œuvre. Rien d'alarmant à ce stade mais nous sommes vigilants ».

Les équipes de Cause à Effet sont présentes dans les principales grandes villes françaises. En 2023, 60.000 candidatures pour devenir recruteurs ont été traitées par l'entreprise pour 220 missions de collecte. Parmi elles, 5.000 personnes ont été reçues et 1.200 ont été finalement embauchées, en CDI ou en CDD d'usage.

« Les CDI sont pour l'instant proposés aux personnes qui travaillent à Paris, Lyon ou Toulouse, et bientôt à Montpellier, précise Julien Bosch. Les CDD, de cinq à six semaines à plein temps, sont des CDD d'usage qui peuvent être renouvelés et durer jusqu'à 18 mois. »

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Une rémunération fixe

Si chaque recruteur a pour objectif de trouver trois donateurs par jour en moyenne, sa rémunération est quant à elle fixe, sans part variable affectée au résultat.

« Cela laisse le donateur complètement libre d'adhérer ou pas à l'offre qui lui est proposée », signale Julien Bosch qui insiste sur les méthodes volontairement peu insistantes de prise de contact par les recruteurs.

La rémunération de base est de 12 euros/heure, auxquels s'ajoutent des primes. Au bout de deux missions, le tarif passe à 13 euros/heure et ensuite, selon certains critères, cela peut monter : « Il est possible de progresser rapidement et devenir, par exemple, chef d'équipe au bout de deux à trois mois ».

Les recruteurs sont plutôt jeunes, 27 ans en moyenne, car « le métier est perçu comme physique et plutôt comme un job d'été, donc cela intéresse des étudiants qui veulent financer leurs vacances et qui finalement restent, ou ce sont parfois des personnes en reconversion professionnelle ou encore des retraités qui sont encore jeunes et qui conjuguent travail associatif tout en étant rémunéré ». Parmi les critères de recrutement, le dirigeant requiert principalement « du dynamisme et une sensibilité au milieu associatif », la formation étant ensuite assurée en interne.

Après une forte croissance ces quatre dernières années, Julien Bosch vise la stabilité en 2025.

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Diffuser des messages auprès du grand public

L'association Aides, dédiée à la lutte contre le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) et à l'accompagnement des personnes qui y sont exposées, fait partie des ONG faisant appel à des recruteurs, dont ceux de Cause à effet. Ses autres moyens de collecte sont  les appels à dons par email ou via les réseaux sociaux, par courrier, par téléphone ainsi que les legs et les assurances-vie désignant Aides bénéficiaire en cas de décès.

« 41% du budget de Aides provient des dons collectés auprès du grand public et des entreprises. Collecter auprès du grand public nous offre une liberté d'actions et finance les innovations et projets qui ne bénéficient pas de financements publics. Cette collecte en face à face s'inscrit également dans la démarche du "aller-vers" qui nous caractérise. Les messages de prévention et de l'information autour des épidémies de VIH/sida et des hépatites sont ainsi diffusés auprès du grand public », indique un porte-parole de l'association.

L'association souligne que « les chiffres du baromètre France Générosité restent à nuancer car la croissance observée reste parmi les plus faibles observées sur les vingt dernières années ».

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Commentaire 1
à écrit le 24/07/2024 à 11:25
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Il faudrait quand même demander pourquoi notre classe dirigeante nous a imposé cette méga crise économique... seulement à cause de Davos ? Quand même...

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