Immobilier : « On fait le dos rond, on arbitre, on essaie d’être imaginatifs » (T. Iacazio, FPI)

ENTRETIEN - C’est son premier mandat à la tête de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI) Occitanie Méditerranée. Thierry Iacazio, directeur territorial Languedoc chez Vinci Immobilier, a été élu le 1er juillet dernier, succédant à Laurent Villaret après deux mandats. Il arrive en pleine crise sévère de l’immobilier, en particulier pour le logement neuf et la promotion immobilière.
Cécile Chaigneau
Thierry Iacazio, directeur territorial Languedoc chez Vinci Immobilier et nouveau président de la FPI Occitanie Méditerranée.
Thierry Iacazio, directeur territorial Languedoc chez Vinci Immobilier et nouveau président de la FPI Occitanie Méditerranée. (Crédits : DR)

LA TRIBUNE - Vous prenez la présidence de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI) Occitanie Méditerranée, qui compte 55 adhérents, dans un contexte de crise sévère pour le logement, et en particulier pour le logement neuf, mais aussi dans un contexte politique tendu suite à la dissolution de l'Assemblée nationale. Quelle est votre perception de la situation ?

Thierry IACAZIO, directeur territorial Languedoc chez Vinci Immobilier et président de la FPI Occitanie Méditerranée - Les élections législatives ont coupé court à la dynamique qui commençait à poindre dans notre secteur d'activité car on avait enfin, avec Guillaume Kasbarian, un ministre du Logement qui avait collecté beaucoup de données auprès des acteurs, compris les enjeux et prévu une loi de simplification, même si notre priorité aujourd'hui est plutôt sur le financement. On se rapprochait d'une évolution positive... Désormais, le président national de la FPI (Pascal Boulanger, NDLR) attend la mise en place d'un nouveau gouvernement pour reprendre son bâton de pèlerin et aller arracher des décisions. Parmi les questions auxquelles on attend des réponses : quel modèle envisagé post-dispositif Pinel en fin d'année, quel système de défiscalisation, quel encouragement pour les maires-bâtisseurs, quel modèle de logements intermédiaires ?

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La situation sur la Métropole de Montpellier est-elle plus positive que sur d'autres territoires tendus ?

A Montpellier, nous avons la chance d'avoir eu un choc de l'offre sur le périmètre des ZAC (8.000 logements en deux ans, annoncés par la Métropole début 2022, NDLR) mais il s'est pris la crise en plein vol... Heureusement, nous avons été soutenus par les dispositifs de ventes en bloc et nous avons un dialogue constructif avec l'aménageur public (Altemed, NDLR) pour débloquer les opérations, qui nous a récemment amené à trouver des solutions de sortie de crise, notamment grâce à la « clause d'intéressement » (aussi appelée « clause de retour à meilleure fortune », NDLR). C'est un axe transitoire de déblocage des opérations. Quant aux autres zones du territoire, nous travaillons plus sur la défiscalisation donc avec les réseaux de vente, et les rythmes se sont beaucoup calmés... L'équation, c'est de re-solvabiliser nos opérations à venir, quitte à les abandonner si elles ne sont pas viables, et sur les opérations en cours ou très avancées, il faut concrétiser les démarches.

Toute erreur de casting ou de programmation peut empêcher une opération de se vendre.

La Métropole a lancé les 
« Ateliers du Logement » avec l'objectif de mener un travail de recherche de solutions et de définir 200 mesures à destination des maires de la Métropole : qu'en attendez-vous ?

L'ambition est de dégager des idées  sur un pas de temps d'un an. La FPI a notamment proposé plus de dix territoires de projets de foncier remembrés où positionner des projets immobiliers...

Quelle sera votre feuille de route dans ce contexte ?

J'ai souhaité mettre en place une gouvernance adaptée, avec des délégations pilotées par des vice-présidences, afin que l'on soit présents sur tous les sujets et enjeux métiers : « Foncier-Prospective Territoire-Immobilier d'entreprise », « Production-Commercialisation-Innovation » et « Communication-Evénementiel-Données marché » (avec comme vice-présidents respectivement Pierre Raymond chez Sogeprom-Pragma, et Antonin Jossinet chez Groupe Spag ; Cédric Lebeau chez Les Villégiales ; Sandrine Peythieu, chez Urbis, NDLR). Il faut réussir à globaliser notre réflexion car les promoteurs ne font pas que du logement, avoir une vision des enjeux spécifiques de chaque collectivité pour être force de proposition et trouver des consensus. La production de logements en Languedoc-Roussillon a pu monter entre 4.000 et 6.000 par an, et aujourd'hui, elle s'écroule (autour de 2.300 en 2023, NDLR). Quand tout se vend, on peut se concentrer sur des axes macro mais aujourd'hui, toute erreur de casting ou de programmation peut empêcher une opération de se vendre. On doit revenir en expert ! Il faut aussi réfléchir aux nouveaux modes de commercialisation, approcher la RE2025 sans surenchérir sur les coûts de construction, travailler le volet financement...

Les promoteurs immobiliers sont dans l'effort.

La construction hors site ou la transformation de bureaux en logement sont-elles des pistes à creuser sur le territoire montpelliérain ?

La RE2025 nous impose la décarbonation du bâtiment, les fabricants travaillent sur le béton décarboné mais il existe d'autres possibilités constructibles comme la paille de riz (pour l'immeuble de bureaux Weko, 4.114 m² sur cinq niveaux, Vinci Immobilier expérimente une méthode constructive innovante grâce à une structure poteaux-poutres en béton, remplie de caissons de paille de riz et revêtue d'un enduit intérieur en terre crue et extérieur à la chaux, NDLR), mais aussi, en effet, la construction hors site avec du bois ou des ossatures mixtes, ce qui fait gagner du temps sur l'assemblage. Mais il y a une contrainte : une sorte de rythme de façade qui doit se faire sans trop de complexité, avec moins de fantaisie, plus sobre. Mais c'est plus vertueux, c'est dans l'ère du temps... Quant à la transformation de bureaux en logements, le projet de loi de Guillaume Kasbarian est intéressant mais avant tout très parisien. Mais les possibilités d'actifs de bureaux vieillissants sont plutôt dans des zones tertiaires et pas forcément mutables en logements. Mais ça fait partie de nos propositions, y compris à Montpellier.

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Que dire du moral des promoteurs immobiliers aujourd'hui ?

Ils sont dans l'effort, dans le surinvestissement pour sortir les opérations. On ne peut pas être résignés... On fait le dos rond, on arbitre, on essaie d'être imaginatifs.

Cécile Chaigneau

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