A Port Camargue, les conflits se multiplient autour de la gestion des anneaux

Directeur sur le départ, non-respect de recommandations de la chambre régionale des comptes, audit financier commandé par la présidence, et opposition de propriétaires,... Port Camargue, plus grand port de plaisance d'Europe, connaît quelques remous estivaux. Explications.
Avec ses 5.000 anneaux, Port Camargue est le plus grand port de plaisance d'Europe.
Avec ses 5.000 anneaux, Port Camargue est le plus grand port de plaisance d'Europe. (Crédits : DR)

Avis de gros grains sur la capitainerie ! Si les 5.000 anneaux de Port Camargue au Grau-du-Roi (Gard), plus grand port de plaisance d'Europe, sont chaque année pris d'assaut par les plaisanciers en quête d'une place à quai, c'est en justice et par courriers interposés que plaisanciers, personnels de la capitainerie, administrateurs de la Régie autonome en charge de la gestion du port, et élus, se livrent bataille.

Dernier épisode en date : Jean-Romain Brunet, directeur en poste à la régie autonome en charge de la gestion du port, est donné sur le départ. Il est actuellement en arrêt maladie. C'était également le cas de sa directrice adjointe il y a encore quelques semaines, et de son directeur technique. Selon nos informations, pour eux comme pour une demi-douzaine d'autres salariés sur les 46 que compte le port, c'est notamment un conflit pour des faits présumés de harcèlement reprochés à un personnel détaché d'une administration d'Etat qui serait à l'origine de leur malaise, en plus d'incompatibilités... Un conflit de personnels qui s'ajoute à deux autres, bien distincts. D'une part, depuis 2017, dix-sept personnes ont attaqué la capitainerie aux Prud'hommes (le conflit demeure pendant). D'autre part, quatre autres salariés sanctionnés, l'an dernier, par une mise à pied ont vu ces dernières semaines leur sanction levée par Robert Crauste, président de la Régie et maire (DVG) du Grau-du-Roi, qui évoque une décision « prise dans un souci d'apaisement ».

« Tout va très bien à Port Camargue, insiste-t-il. Je suis le garant du bon fonctionnement de la Régie. »

Sa gestion n'a pourtant vraisemblablement rien d'un fleuve tranquille...

Une comptabilité analytique manquante

Afin de pallier l'absence de directeur, Robert Crauste a ainsi nommé par intérim un homme de confiance, Nicolas Nadal. Celui qui était jusque-là son directeur de cabinet à la mairie du Grau-du-Roi siègera donc cette semaine à son premier conseil d'administration.

Programmée ce mercredi 24 juillet, la réunion promet d'être animée par ces questions de direction mais aussi par la présentation d'un audit financier commandé en urgence par Robert Crauste au cabinet parisien Michel Klopfer, qui se présente comme « consultant en finances locales ». Demandée depuis deux ans par la Chambre régionale des comptes, la mise en place d'une comptabilité analytique n'a toujours pas été opérée par la Régie qui, n'ayant pas vocation à générer d'importants bénéfices, engendre à peu près autant de dépenses qu'elle créé de recettes, soit environ 10 millions d'euros. Pour assurer ses services et faire face à la hausse du coût des énergies et matières premières, le Port se cherche des revenus complémentaires et notamment auprès des quelque 2.239 propriétaires de marinas qui disposent chacun d'un ponton privé... Ce qui n'est pas sans générer de tension.

Ainsi, en 2023, la Régie avait-elle décidé d'un droit de transfert de 2.000 euros, supporté par chaque nouvel acquéreur d'une marina. Contesté par l'ALPC2, une association regroupant quelque 800 propriétaires, ce nouveau « prélèvement » a finalement été abandonné en 2024. Un geste envers les plaisanciers qui ne sera pas sans conséquences sur les finances de Port Camargue puisque « il engendre une perte de recettes estimée entre 80.000 et 100.000 euros par an », selon un compte-rendu de conseil d'administration publié en mars dernier. D'autant plus fâcheux que le bénéfice après impôts de la Régie devait s'élever, selon ce même compte-rendu, à 79.206 euros...

Une histoire de taxe foncière

Une histoire d'eau parmi d'autres. Depuis plusieurs années, dans une affaire en cours d'examen au tribunal administratif de Nîmes, 740 propriétaires contestent la base de calcul de la taxe foncière qui comprend la surface d'eau destinée à accueillir leur bateau. L'affaire maritime ne manque pas de sel puisque parmi les contestataires se trouve notamment une élue de la majorité municipale... par ailleurs administratrice de la régie portuaire. Une situation duale qui, au moins en façade, ne dérange pas Robert Crauste.

« Des hommes et des femmes sont engagés dans le cadre de leur mandat. Ils ont aussi une vie privée, où ils peuvent faire ce que bon leur semble », balaie le maire gardois.

Invité par la chambre régionale des comptes à prévenir les conflits d'intérêts en ne nommant que des personnalités qualifiées n'ayant aucun lien direct de propriété ou d'exploitation du port, Robert Crauste a ainsi refusé ce système récemment mis en place au port de Sète : « Je tiens à cette gouvernance, la présence d'acteurs associatifs et professionnels est un plus pour Port Camargue », assume l'édile qui, en contrepartie, a établi une charte déontologique qu'ont signé les élus... mais par le représentant de l'ALPC2 au conseil d'administration.

« Nous ne sommes pas des élus, nous n'y sommes pas obligés », s'emporte, le président de l'association, Jean-Pierre Cherifcheikh, peu enclin à plaisanter, avant de dénoncer le fait que « la déontologue de la régie en est également salariée ».

Pompier professionnel pendant plus de vingt ans, Nicolas Nadal n'aura pas trop de cette expérience pour éteindre les départs de feu..

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