Changement climatique et risques météorologiques : l’IGN et Predict Services travaillent sur le jumeau numérique

Données spatiales, données géographiques, données météorologiques,… La donnée est l’or noir de la prédiction et de l’anticipation dans la gestion du risque météorologique. C’est le métier de Predict Services à Montpellier, dont l’expertise fait le tour de la planète. L’entreprise vient de formaliser son partenariat avec l’IGN, partenaire historique de près de vingt ans. Avec notamment un nouvel objet de travail commun : le jumeau numérique, future arme fatale de la prévention qui permettra de jouer des scenarii et de prendre des décisions éclairées, fondées sur des données fiables.
Cécile Chaigneau
Le jumeau numérique d'un territoire permet par exemple d'évaluer en temps réel les conséquences d'un épisode météorologique sévère générant des inondations.
Le jumeau numérique d'un territoire permet par exemple d'évaluer en temps réel les conséquences d'un épisode météorologique sévère générant des inondations. (Crédits : Predict Services)

Dans un contexte d'évolution climatique et de risques accrus, Predict Services refuse de se reposer sur ses lauriers et continue de placer l'innovation au cœur de ses process pour anticiper, prévenir et gérer les risques majeurs liés au risque météorologique. L'entreprise héraultaise organise une fois par an depuis sept ans une journée dédiée pour échanger avec ses partenaires et avec les utilisateurs finaux de ses outils sur leurs besoins et sur la façon dont faire évoluer les innovations pour y répondre.

Parmi les sujets évoqués lors de la dernière journée Predict Innov, le 4 juillet dernier, figuraient les nouvelles technologies, l'intelligence artificielle (IA), les jumeaux numériques, etc. Et comment les intégrer de manière à ce que les élus, y compris dans les petites communes, soient en capacité d'utiliser ces outils.

Partout sur la planète, les géants mondiaux du numérique se sont eux aussi emparés du sujet. Ainsi, Microsoft vient-il de dévoiler, début juin, Aurora, un modèle de fondation d'intelligence artificielle générative pour les prévisions météo, analysant plus d'un milliard de paramètres atmosphériques, avec l'objectif d'atténuer les dégâts provoqués par des événements météorologiques en fournissant des prévisions précises sur cinq à dix jours. Début avril, c'est Huawei qui présentait son modèle d'IA générative Zhiji, et en décembre 2023, IBM annonçait élaborer un modèle de fondation en partenariat avec la NASA.

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« La technologie peut apporter des réponses au changement climatique »

« On observe une accélération portée par la demande internationale, d'autant que les Nations Unies ont émis le souhait que tous les pays sur la planète soient dotés d'un système d'alerte précoce d'ici cinq ans, et c'est ce que Predict Services sait faire », déclare Alix Roumagnac, le président-fondateur de Predict Services.

Ces dernières semaines, des sollicitations l'ont conduit au Congrès mondial de l'eau à Bali, en Tunisie pour une conférence nationale sur l'alerte précoce, ou encore au Japon. Le 21 juin dernier, le dirigeant était en effet invité au Understanding Risk Global Forum (UR24), une conférence sur les risques organisée au Japon par la Banque mondiale, où il a animé une session sur la gestion des risques, l'utilisation des données satellites et les systèmes d'alerte précoce.

« Le point commun de ces échanges, c'est comment la technologie peut apporter des réponses au changement climatique, résume Alix Roumagnac. On accélère sur l'intérêt des données spatiales, sur les jumeaux numériques ou l'IA, pour voir comment ça peut permettre de démultiplier ces outils à l'échelle planétaire. Même si toutes ces technologies ne doivent pas se substituer à l'humain mais offrir des outils qui facilitent la prise de décision, où l'humain reste central. »

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« Des données altimétriques plus fines pour une vision plus juste »

Accélérer, c'est notamment renforcer les collaborations avec certains partenaires majeurs qui eux aussi, de leur côté, accélèrent sur les nouvelles technologies. Avec l'idée de démultiplier la pertinence des résultats. C'est ce que Predict Services, familière de l'utilisation des données spatiales (elle compte à son capital Airbus, Météo France et BRL), poursuit et renforce avec l'IGN avec qui elle vient de signer, début juin, une convention-cadre. L'Institut national de l'information géographique et forestière, établissement public produisant de l'information géographique de référence en France, travaille depuis longtemps avec Predict Services en lui fournissant des données géographiques.

« Nous avons de nouvelles données à apporter à Predict Services, notamment celles issues du programme d'acquisition de données LIDAR (LIght Detection And Ranging, NDLR) sur tout le territoire national qui permet de modéliser le terrain par exemple pour simuler une crue, car ces données altimétriques sont plus fines et leur donnent une vision plus juste, explique Lionel Gaudiot, directeur territorial adjoint de la délégation régionale PACA-Corse (qui couvre aussi les ancien départements du Languedoc-Roussillon pour la production de données géographiques) de l'IGN. Ce qui nous intéresse en retour chez Predict Services, c'est que l'entreprise est en relation avec plus de 30.000 communes et recueille de l'information de ces communes, sur l'évolution du réseau routier, les bâtiments susceptibles d'accueillir du public en cas de crise, le réseau hydrographique, le réseau électrique, etc., ce qui vient enrichir les mises à jour de nos bases de données. Nous le faisons aussi en direct mais auprès des métropoles ou des gros EPCI, pas auprès des 36.000 communes... Cette convention-cadre vient formaliser nos échanges. Et d'autres conventions d'application viendront ensuite, sur le jumeau numérique par exemple. »

Jouer des scenarii et prendre des décisions éclairées

Construire le jumeau numérique du territoire français, c'est justement le défi que proposent de relever l'IGN, le Cerema (Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement) et l'Inria (Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique). Ce projet de réplique virtuelle nationale, annoncé au printemps, répond à la nécessité de disposer d'un outil robuste de pilotage des politiques publiques à l'heure de la transition écologique, et notamment du changement climatique, ce qui suppose de pouvoir jouer des scénarii d'avenir pour prendre des décisions éclairées, fondées sur des données fiables. Dans une logique de co-construction, ce projet veut s'appuyer sur les ressources disponibles et les trois partenaires ont lancé, lors du salon VivaTech en mai dernier, un appel à communs ouvert à tous les acteurs publics et privés souhaitant s'y associer. Soutenu par France 2030 et ouvert jusqu'au 30 septembre prochain, cet appel a vocation à constituer une sorte « d'équipe de France du jumeau numérique ».

« On s'adresse aux collectivités locales, aux entreprises et startups, aux services de l'Etat, s'ils veulent tester des choses, s'ils ont déjà des jumeaux numériques ou s'ils ont des cas d'usage où le jumeau numérique pourrait servir, précise Lionel Gaudiot. Ce qui peut intéresser Predict Services mais aussi d'autres acteurs du risque, c'est que la problématique inondation est très pertinente dans un démonstrateur de jumeau numérique et pourrait être un des premiers cas d'usage. Par ailleurs, la réalité augmentée sera aussi un des cas d'usage du jumeau numérique qui sera utile aux métiers de Predict Services, par exemple pour faire des simulations de secours et d'évacuation. Plus la représentation du territoire sera fine, intégrant de multiples données, plus la réponse sera précise. »

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Croiser les données

Predict Services devrait répondre à cet appel à communs. L'entreprise a déjà développé plusieurs outils, sortes de jumeaux numériques, permettant l'analyse de la vulnérabilité territoriale et l'expertise des risques climatiques : Wiki Predict, plateforme numérique de gestion des risques, et Predict Observer, outil d'analyse des vulnérabilités croisé avec les valeurs d'intensité et de cumul de précipitations.

« Le jumeau numérique permet, avec des images 3D, de visualiser et comprendre virtuellement les territoires, de faire de la pédagogie avec les élus en amont ou en temps réel pour comprendre comment tels et tels secteurs vont être ou sont touchés par des inondations, indique Alix Roumagnac. On a déjà réussi, avec des algorithmes de big data et d'IA, à intégrer des données collectées en temps réel - précipitations, hauteurs d'eau, trajectoires cycloniques...- permettant une analyse affinée des phénomènes à risques. »

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Cécile Chaigneau

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