Réforme du Code du travail : les décideurs d'Occitanie réagissent

Au lendemain de la présentation par le gouvernement des ordonnances réformant le Code du travail, le 31 août, Objectif Languedoc-Roussillon a recueilli l'analyse des acteurs économiques et institutionnels d'Occitanie. De la barémisation des indemnités prud'homales à la fusion des instances de représentation, en passant par l'extension du CDI de chantier, les avis divergent.
E. Phlippe, le Premier ministre, et M. Pénicaud, ministre du Travail, ont présenté, le 31 août, la réforme du Code du travail

Laurent Boissonade, co-président du Medef Occitanie : « C'était une attente forte des chefs d'entreprise. Le Code du travail se caractérise par une rigidité qui gêne le retour à l'emploi. Cette réforme permettra aux salariés de sortir plus facilement d'une relation contractuelle, à des coûts moins importants que la jurisprudence qu'on connaît en matière d'indemnités prud'homales. C'est un bon signal car elle va redonner des perspectives de réembauche et de réorganisation de l'outil de travail en fonction du niveau d'activité. »

Dominique Seau, président d'Eminence (fabrication textile, Aimargues) : « Pour un groupe de 900 salariés dans le monde, cette réforme change peu de choses. Il y a des progrès : l'augmentation des indemnités légales, c'est du concret. La fusion des instances renforce le poids de ce mécanisme : elle donnera une capacité de discussion transversale à des représentants mieux formés, et cela nous simplifiera la vie. Mais les éléments de rupture avec les conventions collectives concernent moins les sociétés, comme nous, où il y a peu de turn over. Quant aux branches, où il faut encore définir les conditions d'utilisation des CDD, les cas de recours, les carences, etc. il reste beaucoup de travail à faire. »

Frédéric Salles, président de Matooma (solutions M2M, Montpellier) : « Ce n'est pas la réforme qui me poussera à embaucher, mais le carnet de commandes. Nous avons un représentant du personnel et un suppléant avec qui les choses se passent bien : ce système permet déjà d'avoir une bonne remontée du terrain. Fusionner les instances de représentation ne changera rien pour moi. Idem pour la barémisation des indemnités : tout passe par la bienveillance, la politique RH. Les PME-PMI qui souffrent des verrous du marché du travail pourront peut-être déclencher des embauches, mais les start-ups sont plus dans la problématique de trouver des gens avec le bon profil à recruter. »

André Deljarry, président de la CCI Hérault : « Cette réforme a été maniée avec beaucoup de minutie et de perspectives. Notre territoire compte 97 % d'entreprises de moins de 20 salariés, qui vont être plus libérées. On va se retrouver dans une économie plus agile. La responsabilité économique d'un chef de gouvernement, c'est de libérer l'économie pour créer de l'activité. Il faut une ligne de conduite pérenne. La modification du Code du travail, c'est l'un des paramètres de démarrage ! Il faut rassurer l'esprit des chefs d'entreprise et ces ordonnances vont dans le bon sens... La réforme attendue sur laquelle le gouvernement n'est pas allé, c'est celle des seuils sociaux, qui sont un frein au développement d'ETI en France. »

Philippe Berta, député (Modem) du Gard : « Le Modem a soutenu le gouvernement sur ce texte car nous avons la même analyse face au chômage massif et de longue durée : à part des mesurettes, rien n'a été fait sur le fond. Les indicateurs internationaux montrent une reprise, et il ne faut pas la rater. Cette réforme va assouplir l'accessibilité à l'emploi, en garantissant qu'elle se fera dans de bonnes conditions. Pour cela, il aurait été judicieux de commencer par une réforme de la formation - car beaucoup d'offres ne trouvent pas preneurs -, mais elle va suivre. Nous sommes enfin partis sur de vrais réformes qui, je l'espère, nous donneront la même dynamique qu'en Allemagne à l'époque du gouvernement Schröder. »

Olivier Bonijoly, avocat associé chez Capstan Avocats (Montpellier) : « Il n'y a pas de surprise, c'est ce qui avait été annoncé... Les mesures sont cohérentes, intéressantes et équilibrées, avec une sécurisation technique pour les entreprises sur certains points, comme la définition du périmètre de reclassement en cas de licenciement économique. Pour les TPE-PME, en matière de licenciement, enfin le fond va primer sur la forme, alors qu'avant, si l'employeur n'était pas assez précis sur les motifs, le licenciement pouvait être requalifié d'abusif. Quant à l'éviction des syndicats lors des négociations, c'est faux ! Dans les entreprises de moins de 50 salariés, le dirigeant pourra organiser un référendum, avec une majorité fixée aux 2/3. Un chef d'entreprise n'a jamais intérêt à envisager un accord déséquilibré, il le paierait tôt ou tard. »

Alain Alphon-Layre, ex-secrétaire régional CGT Languedoc-Roussillon, responsable confédéral des questions du travail à la CGT depuis huit ans : « Cela fait presque 40 ans qu'on baisse les droits des salariés soi-disant pour créer de l'emploi, il faut arrêter de promener les gens... On ne va pas non plus simplifier le Code du travail : la loi El Khomri a rajouté 124 articles et celle-ci une centaine ! On est dans la régression complète des droits. C'est en dehors de la réalité de croire que la négociation directe sans mandat syndical dans les entreprises de moins de 50 salariés sera une vraie négociation. Quant à la rupture conventionnelle collective, c'est scandaleux, c'est une façon d'éviter un PSE (plan de sauvegarde de l'emploi, NDLR) et les avantages associés qui vont avec pour les salariés ! »

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