Qu'elles soient sexuelles, physiques ou psychologiques, une femme sur dix en France, et dans une bien moindre mesure les hommes, est victime de violences conjugales. Si la Montpelliéraine Vigdis Morisse Herrera s'est lancée dans le développement de l'application Opale, c'est qu'elle a elle-même été victime d'un conjoint violent.
« Il m'a fallu trois ans pour mettre des mots sur ce que j'ai vécu et pouvoir déposer plainte, témoigne-t-elle. Cette application est l'outil dont j'aurais eu besoin à l'époque pour gagner du temps. »
Opale propose de répondre, le plus souvent par oui ou par non, à 200 questions du type « ton conjoint choisit-il tes vêtements ? » ou « insiste-t-il pour avoir des rapports sexuels avec toi ? ». Les questions ont été élaborées sur la base de travaux de chercheurs qui étudient le contrôle coercitif dans les violences conjugales, un précepte juridique très largement étudié au Canada et qui fait débat en France. A l'issue du questionnaire, un diagnostic est associé à un degré d'exposition aux violences conjugales. La majorité des répondants sont des femmes mais le questionnaire est aussi ouvert aux hommes. Le remplir prend 10 à 15 minutes environ.
« Aujourd'hui, les deux tiers des plaintes pour violences conjugales concernent des faits de violence physique, assure Vigdis Morisse Herrera. Or ces dernières ne sont pas le premier acte de violences, mais des prémices, des signaux faibles ont souvent eu lieu précédemment, qu'on identifie mal à l'heure actuelle ».
En 2022, 4% des plaintes pour violences conjugales concernaient des violences sexuelles. C'est 21% de plus que l'année précédentes.
Un coût pour l'employeur
Vigdis Morisse Herrera a choisi un modèle économique « gagnant-gagnant » selon elle : l'application est entièrement gratuite pour l'utilisatrice, sans aucune publicité, et c'est l'employeur qui achète l'outil pour le proposer ensuite à ses salarié(e)s. Quel est son intérêt ?
« Même si ces questions de violences conjugales sont d'ordre familial, elles ont un impact sur la qualité du travail et l'absentéisme qui représentent un coût pour l'employeur, argumente Vigdis Morisse Herrera. L'entreprise a de toutes façons une obligation légale à protéger ses collaboratrices. »
Entièrement paramétrable et personnalisable entreprise par entreprise, l'application affiche toutes les actions et aides personnalisées que la société met en place face en faveur de ses employées victimes de violences conjugales, comme les autoriser à aller porter plainte au commissariat sur leur temps de travail.
« Contactée par des élus et des responsables d'entreprises »
Créatrice également de « Globe Speaker » et « Les Petits Mandarins », deux applications de formation en langues étrangères, Vigdis Morisse Herrera, croit au succès de son application : « Quelques jours seulement après le lancement, j'ai été contactée par des élus et des professionnels en charge des violences intrafamiliales mais également par des responsables d'entreprises. Le sujet interpelle ! ».
Opale est par ailleurs l'une des deux finalistes, pour la région Occitanie, du concours « Coups de Cœur #FemmesduNumérique » organisé par la Poste. Le gagnant, un par région, sera connu tout début mai. Il recevra 2.000 euros de la part de la Poste et sera accompagné dans le lancement d'une campagne de financement participatif sur la plateforme KissKissBankBank. Il ira également défendre son projet lors d'un pitch au salon VivaTech à Paris fin mai, le grand rendez-vous des nouvelles technologies et des startups.
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