La French Tech Méditerranée lance une plateforme de recrutement collaboratif et d’échange de salariés

A contexte particulier, réponse particulière. Certaines entreprises, boostées par la crise sanitaire, cherchent des compétences, tandis que d’autres, impactées négativement, voient leurs salariés sous-employés. Pour préserver l'emploi, les entrepreneurs d’Occitanie proposent de faire matcher l’offre et la demande au travers d’une plateforme de recrutement collaboratif ou d’échange de salariés. Initiée par la French Tech Méditerranée à Montpellier, elle implique le cluster Digital 113, le groupement d’entreprises en croissance Leader Occitanie et la French Tech Toulouse.
Cécile Chaigneau
La French Tech Méditerranée lance une plateforme de recrutement collaboratif.
La French Tech Méditerranée lance une plateforme de recrutement collaboratif. (Crédits : DR)

Il y a d'un côté les entreprises qui, positionnées sur un marché boosté par le contexte de crise sanitaire ou conscientes de devoir accélérer leur transition digitale, ont besoin de recruter. Et il y a de l'autre côté celles qui sont encore affaiblies par la crise et, en attendant de pouvoir reprendre une activité normale, disposent de salariés sous-occupés, voire inoccupés.

Le principe des vases communicants pourrait-il fonctionner ? Les unes pourraient-elles accompagner leurs salariés en mobilité professionnelle, voire prêter des salariés (le prêt de main d'œuvre est un dispositif basé sur l'intérêt commun qui existe mais est encore peu usité) ?

Faire matcher l'offre et la demande

En Occitanie, les entrepreneurs veulent contribuer à préserver l'emploi. Le président de la French Tech Méditerranée, Clément Saad (CEO de Pradeo), a sondé différents dirigeants d'entreprises par le biais notamment du groupement d'entreprises en croissance Leader Occitanie ou du cluster numérique Digital 113, afin d'évaluer les besoins. Pour faire matcher l'offre et la demande sur le territoire régional, il a proposé de créer une plateforme de recrutement collaboratif et éventuellement d'échange de salariés.

« Du côté de Toulouse, 10.000 ingénieurs de l'aéronautique pourraient se retrouver sur le carreau », cite-t-il à titre d'exemple.

Chez Leader Occitanie, Julien Feja, vice-président en charge des relations avec les institutions et des finances, confirme l'intérêt de l'initiative : « La plateforme peut permettre de répondre à tension de longue date dans certains secteurs d'activités, comme dans le travail du bois, la restauration, l'industrie, le nucléaire, la pétrochimie ou le secteur pharmaceutique. Par exemple, un manager de ligne de produits dans l'aéronautique ou le textile peut être transféré dans d'autres secteur sur des fonctions similaires ».

La nécessité de la transition numérique

Mais c'est aussi dans le secteur du numérique que ce dispositif pourrait trouver du sens. Car la question de la transition numérique n'est plus "pourquoi", mais "quand", tant sa nécessité ne fait plus de doute...

« La crise a fait prendre conscience à des décideurs de cette nécessité, confirme Emmanuel Mouton, le président du cluster numérique régional Digital 113 (et CEO de Synox). Par exemple, en raison de la dématérialisation des documents chez les donneurs d'ordres dans le BTP, ou du télétravail qui prend de plus en plus de place dans les collectivités territoriales. Le paradigme a changé et aujourd'hui, les budgets et les enjeux sont fléchés sur cette transition numérique... Mutualiser les ressources en période de relance économique pour permettre aux acteurs locaux de faire face, c'est une bonne idée. »

Qui d'éventuels échanges de salariés pourraient-ils intéresser ? Emmanuel Mouton explique l'état du marché : « Les entreprises du numérique ne traversent pas la crise toutes de la même manière. Selon leurs activités, il y a celles qui marchent bien et sont en recherche de développeurs, de compétences en sécurité numérique ou de commerciaux, c'est à dire des métiers déjà en tension avant le Covid. Or il y a des sociétés sur le bassin toulousain qui vont licencier et donc des personnes qui vont se retrouver sur le marché de l'emploi. Sur Montpellier, on pressent qu'il y aura des allègements de personnels. Par ailleurs, parmi les sociétés de services, de formation ou de conseil, certaines ont plus de mal à trouver des contrats mais ne veulent pas se séparer de leurs collaborateurs, qu'elles doivent continuer à payer. Faciliter les prêts de salariés, par le biais de missions, est une solution pour elles. En revanche, on veut éviter que ça casse le marché et que les prestations de ces salariés soient vendues au rabais, et qu'il y ait des débauches de salariés. Nous avons donc établi une charte déontologique dans ce sens ».

Accompagner la mobilité professionnelle

La French Tech Méditerranée a sollicité le savoir-faire de la société gardoise Hydres, fondée et dirigée par Philippe Soler, pour configurer cette plateforme. L'entreprise a développé une plateforme de recrutement collaboratif, favorisant l'entraide et la solidarité entre les entreprises pour accompagner la mobilité professionnelle.

Responsable RH durant dix années dans des groupes français, Philippe Soler a observé que l'entreprise ne peut pas toujours répondre à la demande d'évolution d'un salarié en interne. C'est ainsi qu'est né cet outil, qui rapproche l'offre et la demande. Et c'est bien ce que proposera la plateforme lancée par la French Tech Méditerranée.

« Les entreprises déposent des fiches avec les profils de leurs salariés disponibles, et les entreprises qui ont des besoins de compétences consultent la plateforme qui leur permet d'identifier les profils qui les intéressent, explique Clément Saad. Deux modes sont possibles : soit le prêt d'un salarié, soit un dispositif de transfert définitif. »

Lever des verrous

La plateforme sera opérationnelle d'ici la fin janvier. Clément Saad l'officialisera lors des vœux de la French Tech Méditerranée, le 25 janvier.

« Tout se jouera dans les deux mois à venir car pour qu'il y ait rapprochement entre offre et demande, il faut un certain volume, souligne Philippe Soler. L'enjeu, c'est de rassembler toutes les initiatives d'échange de salariés de ce type sur une seule plateforme, que tous les territoires jouent sur le même outil. »

Reste en effet à voir si les entreprises vont jouer le jeu. Car des freins persistent. Il faut bien entendu que les salariés concernés, qui pourraient être amenés à aller travailler sur une zone géographie éloignée, soient volontaires.

« La plateforme étant régionale, les missions proposées resteront sur le bassin d'emploi Méditerranée, précise Emmanuel Mouton. Ces dispositifs se pratiquent déjà et qu'on veut, c'est les booster par nécessité, en levant quelques verrous dans ces usages-là. »

Cécile Chaigneau

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