Agriculture : une saison à risque pour le concombre des Pyrénées-Orientales

En toute discrétion, le concombre s’est créé une place de choix dans l’agriculture des Pyrénées-Orientales, à l’ombre des vergers de pêchers. Le département compte aujourd’hui pour près d’un tiers de la production française. Mais la saison 2023 s’ouvre dans un contexte d’incertitude, notamment en raison du manque d’eau.
Manu Ruperez et Bruno Sangerma, respectivement maraîcher et commercial du groupe coopératif Saveurs des Clos, à Ille-sur-Têt.
Manu Ruperez et Bruno Sangerma, respectivement maraîcher et commercial du groupe coopératif Saveurs des Clos, à Ille-sur-Têt. (Crédits : Yann Kerveno)

« Il y a toujours plus ou moins eu du concombre dans les Pyrénées-Orientales » explique Manu Ruperez. Pour ce maraîcher, c'est même une longue histoire : plus de quarante ans qu'il en produit, d'abord chez lui, puis pour le groupe coopératif Saveurs des Clos, à Ille-sur-Têt.

Commercial du groupe, Bruno Sangerma détaille les forces en présence : « Trois entreprises se sont emparées de cette production : la coopérative Ille Fruits et son bras commercial Saveurs des Clos, Ille Roussillon à Thuir, et Rougeline à Saint-Cyprien ».

L'an dernier, avec une douzaine de milliers de tonnes, Saveurs des Clos s'est hissé à la deuxième place des metteurs en marché français. Le fruit d'un développement des surfaces entamé depuis une dizaine d'années et de la crise de la sharka, une maladie qui contrarie la production de pêches et de nectarines et incite les producteurs à se diversifier.

Manque d'eau et inconnu marché

La saison 2023 - les premières plantations en abris froids ont eu lieu début mars - s'ouvre dans un contexte d'incertitudes. Avec d'abord la question de l'eau, absente du département depuis un an maintenant...

« Le concombre, c'est 99 % d'eau, précise Manu Ruperez. Alors même si la plupart de nos productions sont en lutte intégrée et en irrigation de précision, il faut quand même un peu d'eau pour les faire pousser. »

L'an passé, il y avait de l'eau mais les fortes chaleurs étaient venues entamer significativement le potentiel de production en diminuant la récolte de 10% en moyenne. Le monde agricole est désormais suspendu aux prochaines décisions de la commission Ressources en eau alors que tout le département des Pyrénées-Orientales est en alerte renforcée, dernier stade avant l'état de crise qui limite la consommation d'eau à la consommation humaine.

Par ailleurs, ce segment agricole doit faire face à l'inconnu du marché : le prix de l'énergie a chamboulé les équilibres habituels, et aux Pays-Bas notamment, les serristes ont décalé les productions pour ne pas avoir à chauffer les serres au cœur de l'hiver. Les Espagnols, de leur côté, ont subi une vague de froid qui a décalé les productions habituellement très précoces. Le risque est donc un afflux simultané de production sur le marché européen.

La réassurance "origine France"

Pour autant, Bruno Sangerma se montre confiant : « Le marché français est abondé à 80% par des concombres français et nous ne rencontrons de problèmes que lorsque le différentiel de prix s'accroît avec les concombres venus d'ailleurs. Mais nous savons que la période qui va de mi-avril jusqu'à fin juin risque d'être compliquée ».

« Nous bénéficions d'une bonne image auprès des distributeurs qui ont encore en tête l'épisode e-coli de 2011 » ajoute Manu Ruperez.

Cette année-là, le concombre espagnol avait été accusé, à tort - on déterminera plus tard son origine dans des graines bios germées - d'avoir provoqué une épidémie de gastro-entérite et de syndrome hémolytique et urémique causant la mort de 53 personnes en Europe. Et provoquait une panique chez les consommateurs.

« C'est pour cela que l'origine France reste une réassurance », assure Manu Ruperez.

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