Régionales : pourquoi l'entrepreneur Jalil Benabdillah rejoint la liste de Carole Delga

Le fondateur et dirigeant de l’entreprise SDTech Jalil Benabdillah, également élu à la Ville et à l'Agglomération d’Alès, démissionne de ses mandats alésiens pour s’engager aux côtés de la présidente de la Région Occitanie, Carole Delga, dans la bataille des régionales. Un engagement qui risque de l’amener à affronter Christophe Rivenq, son allié politique au sein de l’agglomération alésienne, qui pourrait bien conduire la liste Les Républicains aux mêmes élections...
Cécile Chaigneau
Le dirigeant d'entreprise Jalil Benabdillah lâche ses mandats alésiens pour rejoindre la liste de la présidente de la Région Occitanie, Carole Delga.

C'est une belle "prise de guerre" que vient de faire la présidente (PS) de la Région Occitanie, Carole Delga. Ce 28 janvier, le chef d'entreprise Jalil Benabdillah (fondateur de SDTech), conseiller municipal d'Alès (30) et vice-président délégué au développement économique d'Alès Agglomération, annonce qu'il démissionne de ses mandats alésiens pour se lancer dans la bataille des élections régionales de juin prochain, aux côtés de Carole Delga.

Le communiqué relayant cette annonce est laconique et factuel : le maire d'Alès Max Roustan et le président de l'agglomération Christophe Rivenq, ont pris acte de la décision et accepté sa démission.

En aparté, Jalil Benabdillah se confie à La Tribune sur le sens de ce nouvel engagement et ses implications. Car l'emblématique entrepreneur alésien, engagé par nature, est sur de nombreux fronts et se doit donc, à la lumière de cette décision, « lâcher » d'un côté pour mieux s'engager de l'autre.

La chose politique

A la tête de l'entreprise SDTech, spécialisée dans la micronisation, l'analyse et le traitement à façon des poudres fines et ultrafines pour l'industrie, Jalil Benabdillah est un véritable porte-drapeau économique pour le territoire alésien mais aussi pour toute la région Occitanie.

C'est à son initiative qu'en 2014, plusieurs chefs d'entreprise du bassin alésien se réunissaient pour créer un club d'entrepreneurs, Leader Alès. Depuis, Jalil Benabillah a fait grandir le club à l'échelle du Languedoc-Roussillon puis aujourd'hui de l'Occitanie.

C'est aussi en 2014 que le maire (LR) d'Alès, Max Roustan, est allé le chercher pour l'emmener sur sa liste municipale.

« Je m'intéresse depuis toujours à la chose politique, c'est tellement plus facile de critiquer que de proposer quelque chose, nous confiait celui qui se présentait il y a cinq ans, alors qu'on lui tirait le portrait, comme "un socio-libéral". Je me suis engagé en politique avec comme garde-fou de pouvoir me regarder dans la glace sans avoir honte. »

Attaché au développement de son territoire d'accueil, il avait accepté. Et c'est dans la même logique qu'il dit accepter aujourd'hui de s'engager pour les régionales.

D'un territoire à l'autre

« Ça fait un quart de siècle que je travaille avec la Région, à différents niveaux, rappelle le dirigeant d'entreprise. J'ai connu Jacques Blanc, Georges Frêche, Christian Bourquin, Damien Alary et aujourd'hui Carole Delga... J'ai accompagné Georges Frêche à New York, contribué à l'implantation d'une Maison de la Région au Maroc, mon pays d'origine, etc. Et aujourd'hui, ma proximité et mon amitié avec Carole Delga est de notoriété publique. Je préside Leader Occitanie, un cluster financé à 50% par la Région, en cohérence avec la stratégie économique de la Région... J'accepte donc avec une certaine légitimité de rejoindre Carole Delga. Vous savez mon combat pour les territoires : je vais passer d'une action sur le territoire d'Alès, où j'ai mis mes tripes, à celle sur le territoire d'Occitanie. Il y a une continuité logique. »

Une cohérence d'action, oui. Mais quid de la cohérence politique, ne manqueront pas de s'interroger certains. Car il était jusqu'à aujourd'hui dans une majorité de droite...

« Quand Max Roustan est venu me chercher en 2014, je n'ai pas regardé s'il était de droite ou de gauche, et il a d'ailleurs autour de lui des gens d'horizons politiques différents, répond Jalil Benabdillah. J'ai accepté car c'était une façon pour moi de rendre au territoire ce qu'il m'avait donné. Aujourd'hui, c'est la même histoire : une femme, un projet, un ensemble de territoires. Je n'ai pas regardé si elle était socialiste. Je trouve son action bonne et forte. Je ne suis ni de droite ni de gauche, je suis chef d'entreprise, je veux dépasser les clivages politiques. Ni Max Roustan ni Carole Delga ne m'ont demandé de prendre une carte de parti. »

Anciens alliés et désormais adversaires

Ironie du sort : cette entrée dans la bataille des régionales dans le camp de la socialiste risque bien de l'amener à affronter celui aux côtés de qui il œuvrait dans la même majorité municipale et intercommunale, Christophe Rivenq.

Pour l'heure, Christophe Rivenq est aussi le président du Groupe de l'Union des élus de la Droite et du Centre au Conseil régional d'Occitanie. Il pourrait bien conduire la liste Les Républicains lors du scrutin régional de juin prochain. Se déclarant « sollicité », l'élu annonce qu'il sera au moins tête de liste départementale dans le Gard.

« Donc on se retrouvera sur deux listes opposées, et c'est bien pour ça que je démissionne de mes mandats à Alès, répond Jalil Benabdillah. J'assume les conséquences de ce choix personnel. »

Quel rôle entend-il jouer sur la liste ? « Je ne sais pas encore, c'est trop tôt pour le dire », assure-t-il. C'est aussi trop tôt pour dire s'il sera tête de liste départementale du Gard.

Passation à la présidence de Leader Occitanie

« J'ai de l'énergie et de l'expérience, et quand je m'engage, c'est à 2.000%, c'est pourquoi j'ai demandé l'avis de mes proches et de mon associé chez SDTech, Aziz Ait Amer, avant de prendre ma décision, précise Jalil Benabdillah. Et pour être cohérent jusqu'au bout, j'organise dès à présent ma passation à la présidence de Leader Occitanie car je veux éviter tout conflit d'intérêt. »

Le désormais ancien élu d'Alès est prudent et rappelle qu'« une élection n'est jamais gagnée à l'avance ».

« Il y a une réelle menace du Rassemblement National en Occitanie, on ne peut pas faire comme si de rien n'était, pointe Jalil Benabillah. Il faut être responsable et ça fait partie de mon engagement, ce n'est pas le moment de se disperser, c'est le moment de se réunir ! Toutes les forces de progrès devraient réfléchir à deux fois sur les divisions et les calculs électoraux car les risques sont réels. »

Un sous-entendu à peine voilé à l'intention affichée des Verts de constituer une liste autonome lors de ce scrutin...

Cécile Chaigneau

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