TER en Occitanie : la Région contractualise pour 10 ans avec la SNCF (et le CESER émet des points de vigilance)

Afin de ne pas avoir à ouvrir les lignes TER d’Occitanie à la concurrence, la Région avait décidé de devancer sa nouvelle contractualisation avec la SNCF. La collectivité devrait adopter la nouvelle convention le 23 mars, pour dix ans, avec l’ambition de passer de 70.000 à 100.000 voyageurs par jour. Le CESER, saisi pour donner un avis, applaudit et valide, tout en émettant quelques points de vigilance.
Cécile Chaigneau
La Région Occitanie va signer une nouvelle convention avec SNCF Voyageurs pour la période 2023-2032, définissant les modalités d'exploitation et de financement du service public de transport régional de voyageurs qu'elle confie à SNCF Voyageurs.
La Région Occitanie va signer une nouvelle convention avec SNCF Voyageurs pour la période 2023-2032, définissant les modalités d'exploitation et de financement du service public de transport régional de voyageurs qu'elle confie à SNCF Voyageurs. (Crédits : Région Occitanie)

Le Conseil économique, social et environnemental régional (CESER) d'Occitanie s'est prononcé, ce 21 mars, sur la nouvelle convention de service public ferroviaire régional de transport de voyageurs liO Train 2023-2032 qui sera votée le 23 mars en assemblée plénière et qui définit les modalités d'exploitation et de financement du service public de transport régional de voyageurs confié par la Région Occitanie à SNCF Voyageurs (voir encadré).

Une convention qui intervient alors que la précédente (2018-2025) n'était pas arrivée à son terme. La principale raison : la volonté politique du Conseil régional d'éviter l'ouverture à la concurrence des lignes TER. Et l'Occitanie n'est pas la seule Région à conventionner à nouveau et pour dix ans (la durée légale maximale) avec l'opérateur historique pour éviter cette ouverture à la concurrence, les Régions Bretagne et Centre-Val-de-Loire notamment ayant fait le même choix.

Considéré comme un levier majeur de la transition écologique voulu par la collectivité régionale via sa stratégie REPOS (région à énergie positive), le train est aussi à la fois « un élément central de l'aménagement du territoire, un facteur de développement économique et une réponse aux enjeux liés à l'urgence climatique », souligne d'emblée le CESER, dont la commission "Aménagement du territoire - Politiques environnementales et énergétiques - Transports - Infrastructures - Numérique - Logement", présidée par Christine Carlesso, a examiné la convention.

350 millions d'euros par an

Une convention qui se traduira par un financement de 350 millions d'euros par an accordé par la Région à SNCF Voyageurs, ce qui fait dire à Jean-Louis Chauzy, le président du CESER en Occitanie, que la région est « la première de France en termes d'investissements sur le ferroviaire ».

« En Occitanie, 2 millions d'actifs se déplacent quotidiennement pour aller travailler, rappelle le CESER dans son avis. Au regard de ce chiffre, la Région mais aussi son opérateur la SNCF, se doivent d'être ambitieux, en particulier si l'on met en face les financements régionaux de 3,5 milliards d'euros sur dix ans. »

En préambule, Christine Carlesso veut redire sa satisfaction à voir la Région se ré-engager avec l'opérateur historique : « L'ouverture à la concurrence aurait inquiété la commission pour au moins une raison : tout le monde connaît la capacité des cheminots sur les questions de sécurité et d'information des voyageurs. C'est un savoir-faire qu'on trouve dans le service public... L'autre point, c'est qu'il y a des syndicats de cheminots qui font respecter les conditions de travail ».

« Et les grands opérateurs ferroviaires privés iront sur ce qui rapporte, c'est à dire autour des grandes métropoles de Montpellier et Toulouse, et demanderont que les collectivités territoriales s'occupent du reste ! », ajoute Jean-Louis Chauzy pour évoquer le risque d'un service réduit dans des zones rurales si le choix de la concurrence avait été fait.

Le CESER valide par ailleurs la volonté de la Région de conventionner avec deux autres entités de la SNCF, SNCF Gares & Connexions et SNCF Réseau, Christine Carlesso indiquant que le CESER sera « vigilant à la suite donnée ».

Objectifs quantitatifs et qualitatifs

Satisfecit également quant aux objectifs quantitatifs de la Région : passer de 70.000 à 100.000 voyageurs par jour dès 2029, comme l'indique la convention. L'assemblée consultative redit l'intérêt du dispositif du train à 1 euro, mis en place par la Région et qu'elle juge « attractif et efficace pour stimuler la fréquentation des trains liO et redonner du pouvoir d'achat via l'économie réalisée ».

Dans la convention, la Région « vise une réduction de 20% des trains supprimés pour cause imputables à l'opérateur » et « une diminution de 26% des trains en retard ». Le CESER salue par ailleurs « les objectifs de respect de l'emport, c'est à dire l'obligation, en cas de substitution, de remplacer un train par une rame offrant un nombre de places assises au moins identique ».

Concernant l'offre de trains, le CESER apprécie que la convention remédie à des dessertes en heures creuses, les week-ends et durant les vacances scolaires qui n'étaient jusqu'à présent pas satisfaites.

Enfin, le CESER salue une « maintenance plus performante ». La Région a en effet programmé, notamment, l'achat de 18 rames Régio 2N, mais aussi la création d'un nouveau centre de maintenance à Narbonne (Aude).

Présence humaine, accessibilité

Mais le CESER émet toutefois un avis de vigilance sur cette question de la maintenance, rappelant que cette activité est facteur d'emplois et préconisant d'éviter autant que possible de réaliser cette maintenance des rames en dehors de la région.

« La filière ferroviaire représente 6.000 emplois en Occitanie, avec des poids lourds comme Alstom à Tarbes, CAF à Bagnères-de-Bigorre, Siemens ou Actia, ajoute Jean-Louis Chauzy. Ce sont donc des retombées qui demandent à être confortées. »

Au total, le CESER émet une dizaine de points de vigilance. Il pointe notamment une nécessaire présence humaine sur le service ferroviaire : « Le renforcement de la sécurité et de la sérénité des voyageurs et le maintien de la présence humaine apparaissent comme des enjeux majeurs et nous souhaitons une présence humaine renforcée dans les trains et dans les gares », insiste Christine Carlesso.

Autre interrogation : la convention « ne nous informe pas sur le niveau de mise en accessibilité (pour les personnes à mobilité réduite, NDLR) réalisé sur les quais dans les gares et à bord des trains, ni sur ce qu'il reste à accomplir (...), le texte se bornant à dire qu'il respectera la loi ! C'est insuffisant selon nous », lance Christine Carlesso.

« La question se pose de savoir s'il ne faut pas aller encore plus loin sur le train au regard de la démographie croissante et des enjeux climatiques, en articulant mieux le train avec les pôles d'échanges multimodaux qu'il faut développer davantage », interroge par ailleurs Christine Carlesso, qui indique dans le rapport que « aujourd'hui, par exemple, la part modale du train est très faible, de l'ordre de 2 à 3% en milieu urbain et périurbain ».

Prévoir une clause de revoyure

Selon le CESER, le sujet du verdissement du matériel roulant n'est pas clairement abordé dans la convention, et Jean-Louis Chauzy indique que « le train à hydrogène est un enjeu d'avenir et nous regarderons donc aussi que la SNCF remplace ses appareils roulants au fuel ».

Détail qui n'en est pas un pour les usagers : il existe deux systèmes de billetterie, un sur chacun des anciens périmètres régionaux (Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées), qui sont aujourd'hui incompatibles et non-interopérables. Le CESER invite donc à basculer sur une nouvelle billetique, tout comme il demande que la convention établisse « un barème d'indemnisation clair et simple » des usagers en cas de retards récurrents, et « une hausse des pénalités dues par la SNCF en cas de qualité dégradée ».

Enfin, le CESER regrette que la convention, qui inscrit le partenariat sur une durée importante de dix années et dans un contexte de crise énergétique, ne prévoit pas de clause de revoyure qui permettrait de s'assurer de la bonne exécution de la convention.

Les TER liO en Occitanie

  • 21 lignes
  • 2.636 km de voies ferrées
  • 550 trains du quotidien
  • 281 gares et haltes ferroviaires
  • 71 pôles d'échanges multimodaux (PEM)
  • 70.000 voyageurs/jour
  • plus d'un milliard de voyageurs-kilomètres annuel.

Cécile Chaigneau

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