Comment le site industriel lozérien d’ArcelorMittal réduit sa consommation d’eau

Plan Eau : les industriels à contribution (1/2) - En Lozère, le site du géant mondial ArcelorMittal fait partie de la liste, présentée le 21 août dernier par le gouvernement, des douze premiers plus gros sites industriels consommateurs d’eau qui seront accompagnés par l'Etat pour réduire significativement les quantité d'eau prélevées pour leur fonctionnement. L’aciérie témoigne d’actions déjà engagées, ayant permis de diminuer sa consommation d’eau de plus de 60% depuis 2007. D’autres projets ciblant une plus grande sobriété en eau sont en cours.
Cécile Chaigneau
Le site industriel d'ArcelorMittal en Lozère utilise quelque 250.000 m3 par an pour faire du refroidissement de process et du rinçage de traitement de surfaces.
Le site industriel d'ArcelorMittal en Lozère utilise quelque 250.000 m3 par an pour faire du refroidissement de process et du rinçage de traitement de surfaces. (Crédits : ArcelorMittal)

Site industriel dit "énergo-intensif", l'usine ArcelorMittal de Saint-Chély-d'Apcher, en Lozère, est aussi l'un des plus gros consommateurs d'eau en France. C'est la raison pour laquelle il figure sur la liste, présentée le 21 août dernier, des douze premiers sites industriels (sur cinquante) qui vont être accompagnés par l'Etat pour réduire significativement la quantité d'eau prélevée pour leur fonctionnement.

Dans le cadre de son plan Eau, le gouvernement a en effet indiqué vouloir, notamment par le biais des agences de l'eau (dont le budget annuel a été revu à la hausse de 475 millions d'euros), « faciliter le co-financement d'études, faciliter le co-financement de la mise en œuvre des solutions trouvées, et faciliter la mise en œuvre administrative de ces solutions ». Le ministre de la Transition écologique Christophe Béchu a également assuré que 100 millions d'euros étaient fléchés au sein du dispositif France 2030 « de façon spécifique pour les innovations dans le domaine de l'eau et qui sont à disposition de ces industriels ».

Rappelant, le 21 août dernier, que l'industrie représente 8% des prélèvements en eau en France et 4% de sa consommation, Christophe Béchu, avait alors regretté que « la plupart des acteurs ne se préoccupent pas des volumes qu'ils consomment parce qu'ils ont l'impression que ça n'est pas cher et ne sont donc pas suffisamment vigilants concernant les fuites ».

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250.000 m3 par an

Le site lozérien du géant mondial de l'acier ArcelorMittal, spécialisé dans les aciers électriques haut de gamme, produit pour le secteur automobile (en particulier pour le marché des véhicules électriques et hybrides), le secteur de la production d'énergie (hydro-électricité, éolien, nucléaire,...), les moteurs industriels et les biens de consommation (électroménager, outillage,...). La direction régionale indique être déjà engagée « dans une gestion économe de l'eau », qui reste indispensable à son process industriel, tant à Saint-Chély d'Apcher que sur son autre site dans le sud de la France, à Fos-sur-Mer (Bouches du Rhône).

Sur le site de Saint-Chély d'Apcher, qui emploie 250 personnes, l'eau est essentielle au fonctionnement de l'usine. Grâce au deux cours d'eau au bord desquels elle est installée (le Bès et la Truyère), elle utilise d'ailleurs l'énergie hydroélectrique produite par deux centrales et fournissant la moitié de l'électricité nécessaire au site.

« L'eau est essentielle pour nos process et pour produire énergie décarbonnée, indique Philippe Chapus, directeur du projet Electron Mobilité, basé à Saint-Chély d'Apcher. Elle sert principalement à deux activités : faire du refroidissement de process et du rinçage de traitement de surfaces. En termes de volumes, cela représente environ 250.000 m3 par an. Mais nous avons déjà diminué la consommation d'eau du site de plus de 60% depuis 2007, en supprimant les fuites, en optimisant nos process ou encore en recyclant l'eau dans nos process, même s'il est difficile de préciser le volume d'eau recyclée. Et ce alors qu'en parallèle, nous avons quasiment doublé la surface des aciers produits. »

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Récupérer 8.000 à 12.000 m3 d'eaux de toiture

L'eau consommée par l'aciérie provient « à 85% des eaux de rivières (le cros et la Malagazagne, NDLR), ainsi que de puits, donc de nappes phréatiques, et de l'eau potable, précise le dirigeant. Aujourd'hui, nous travaillons sur un nouveau projet qui nous permettra de réduire encore de 10 à 13% la consommation actuelle. Nous disposons, sur le site de Saint-Chély d'Apcher, d'importantes surfaces de bâtiments, dont un bâtiment récent qui compte 12.000 m2 de toiture. La première phase de ce projet consiste donc à capter les eaux de toiture et à les stocker dans des réservoirs de 6.000 m3. Les canalisations, les automatismes et systèmes de pompage, les installations de stockage représentent un investissement de 1,5 million d'euros. Le dispositif devrait être opérationnel à la fin de l'année. L'objectif sera de capter 8.000 à 12.000 m3 d'eau, selon la pluviométrie, et ce stockage sera utilisé en période d'étiage. »

Une deuxième phase est en cours d'étude, portant sur la mise en place de solutions innovantes pour le refroidissement des process : « Une partie de nos consommations d'eau se fait par système d'évaporation, avec des tours aéro-réfrigérantes. L'idée est de changer de technologie et de recourir à des systèmes de refroidissement à air qui consomment peu d'eau, doublés de systèmes de filtration pour réutiliser l'eau dans nos process. Le dossier est en cours et le système pourrait être opérationnel dans deux ans ».

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« Impossible d'accéder à la ressource en eau potable »

Enfin, ArcelorMittal annonce également « des actions mises en place en lien avec les communautés locales pour répondre aux besoins de l'ensemble des acteurs ».

« La ville de Saint-Chély d'Apcher a une problématique d'eau potable et nous travaillons avec elle pour faire de l'interconnexion des réseaux d'eau avec Le Malzieu par exemple, détaille Philippe Chapus. Dans ce dossier, nous sommes facilitateur : nous sommes consommateur d'eau potable donc il est important de travailler avec les collectivités pour faire cette interconnexion. Nous participons aux réflexions. »

L'industriel argue ainsi ne pas avoir attendu le plan Eau du gouvernement pour se préoccuper du sujet, Philippe Chapus rappelant que si le site industriel n'a pas souffert de la sécheresse cette année, il n'en était pas de même l'année passée : « Il nous a été impossible d'accéder à la ressource en eau potable pour faire tourner nos process, donc il était indispensable de mettre en place des actions pour diminuer drastiquement l'usage de l'eau ».

Qu'attend-il alors de l'accompagnement proposé par le gouvernement ?

« Nous avons des réunions régulières avec les collectivités, l'agence de l'eau Adour Garonne ou la préfecture pour partager nos difficultés et les avancées sur notre plan d'économie d'eau, répond Philippe Chapus. Aujourd'hui, rien n'a encore été acté autour du plan Eau, mais cela pourra peut-être nous aider à trouver des financements sur certains projets. »

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Cécile Chaigneau

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Commentaire 1
à écrit le 31/08/2023 à 9:31
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A une époque lointaine il y avait sur le Bès ( petite rivière ) un barrage avec une retenue d'eau qui alimentait une centrale électrique située en aval qui produisait de l'énergie pour l'usine de Saint Chely .

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