La startup ODAPTOS lève un demi-million d’euros et met un pied aux Etats-Unis

ENTRETIEN - La startup montpelliéraine Odaptos annonce, le 5 janvier 2023, avoir bouclé une levée de fonds d’un demi-million d’euros pour agrandir son équipe et se développer aux Etats-Unis. Elle fait partie des 26 entreprises de la région Occitanie présentes au Consumer Electronic Show (CES) qui se tient du 5 au 8 janvier à Las Vegas. Un rendez-vous mondial incontournable des entreprises de la tech où la jeune entreprise présente la version finalisée de sa solution logicielle destinée à détecter les émotions humaines grâce à l’intelligence artificielle pour une analyse optimisée des comportements des utilisateurs de sites web et autres applications mobiles. Entretien avec Maximilien Joannides, l’un des deux cofondateurs.
Odaptos a développé une solution qui s'adresse aux designers de l’expérience utilisateur sur internet : reposant sur la détection des émotions humaines grâce à l’intelligence artificielle, elle propose une compréhension des besoins et des comportements des utilisateurs de sites internet.
Odaptos a développé une solution qui s'adresse aux designers de l’expérience utilisateur sur internet : reposant sur la détection des émotions humaines grâce à l’intelligence artificielle, elle propose une compréhension des besoins et des comportements des utilisateurs de sites internet. (Crédits : Odaptos)

LA TRIBUNE - Quelle est l'innovation portée par Odaptos (incubée au BIC Montpellier et à l'IMT Mines Alès) ?

Maximilien JOANNIDES, cofondateur d'Odaptos - Odaptos est une société que nous avons lancée en 2020 avec le cofondateur Felipe Restrepo. Tous deux UX designers de formation, nous avons développé une intelligence artificielle qui analyse les émotions des testeurs pendant des tests d'expérience utilisateurs en visioconférence. Ces tests-là étaient auparavant menés à la main : des designers se tenaient derrière des vitres teintées et analysaient les ressentis des testeurs qui se trouvaient dans une salle. Grâce à notre IA, il est possible de mener les tests en visio sans avoir besoin de trois designers par session. Un seul designer mène l'interview, assisté par une IA qui prend des notes à sa place. L'IA analyse ce que dit la personne et créé un transcript dans lequel elle analyse en détail ses micro-expressions et les non-dits de ses gestes, c'est-à-dire tout le langage non-verbal des utilisateurs. Disponibles 30 minutes après la fin de l'interview, les comptes-rendus automatisés permettent ensuite aux équipes marketing et aux équipes de designers de revenir rapidement sur les points de friction et améliorer le produit et le parcours de l'utilisateur sur le web ou sur un produit.

Lire aussiA quoi sert l'intelligence artificielle d'analyse des émotions que développe Odaptos ?

Vous venez de boucler une levée de fonds : de combien et pour quoi faire ?

Nous venons de boucler une levée de fonds de 500.000 euros avec la participation de Meliès Business Angels, Sofilaro (filiale régionale de capital investissement du Crédit Agricole, NDLR), Mines Alès Angels et du fonds d'investissement FrenchTecSeeds (Bpifrance, NDLR). Aujourd'hui, nous sommes trois : deux cofondateurs et un développeur. Cette levée de fonds a pour objectif de nous permettre notamment de recruter cinq salariés - un commercial, un marketing, et trois développeurs - et deux alternants en ce début d'année 2023. Les aides de la Région Occitanie inscrivent cette levée de fonds dans un plan d'investissement global d'1,1 million d'euros, destiné à nous développer au national et à l'international.

Où en êtes-vous dans le développement de votre marché ?

C'est ce sur quoi nous travaillons depuis deux ans : notre solution est passée en phase bêta en mars 2022. Nous avons commencé à tester le marché, à en parler à des agences digitales, à des grands groupes, à des ESN (entreprises de services du numérique, NDLR) pour leur proposer une nouvelle méthodologie de travail sur leurs projets. Nous avons reçu de nombreux bons retours de la part des différents acteurs, en région comme à Paris, avec des agences digitales comme Spiriit (ex-Choosit, NDLR) ou Kirk agency, agence spécialisée dans le luxe basée à Paris avec un pôle à Marseille. Nous venons de commencer des projets avec Prisma Media et Bouygues Telecom qui souhaitent faire de premiers tests avec notre solution sur des parcours utilisateurs. Depuis la rentrée, nous avons un peu changé de segmentation : nous nous intéressons plutôt aux grands groupes et aux ESN parce qu'ils ont des équipes en interne qui font beaucoup de tests à l'année. Des entreprises comme Accenture, Docaposte, Cap Gemini... C'est là que notre solution peut apporter une réelle plus-value à leur travail car leurs designers font parfois 50 tests par mois. Pouvoir les automatiser et améliorer leurs performances sur ce travail-là, c'est leur faire gagner du temps et de l'argent.

En quoi cette version finalisée est-elle différente ?

Nous avons mis en place la première grosse brique technologique, qui nous permet d'analyser le visage ou la voix. Au début, ces tests ne se faisaient que sur le bureau, et maintenant, il est possible de les faire sur n'importe quel navigateur ainsi que sur mobile. Notre objectif est désormais d'aller plus loin en cherchant à analyser encore plus d'émotions sur le visage. Aujourd'hui, nous en analysons sept et nous voulons aller jusqu'à 45 afin de détecter des choses plus complexes, comme l'ironie. Nous souhaitons ensuite développer notre solution sur Android pour nous adresser à l'ensemble du marché.

Quel est l'avantage d'avoir une version sur mobile ?

Il y a deux intérêts sur mobile. Tout d'abord, on y trouve beaucoup d'applications à tester sur le téléphone portable lui-même. Si on fait une expérience sur un navigateur avec des interfaces de téléphone portable, on n'obtient pas le même ressenti. Si les testeurs ont l'appareil dans les mains, ils peuvent tester une application en utilisant leurs doigts, ce qui est l'utilisation normale. Nous pourrons donc utiliser le micro et la caméra du téléphone pour effectuer la même analyse. L'autre intérêt est de pouvoir analyser des objets physiques ou des endroits sur place : on peut par exemple imaginer tester le ressenti d'un utilisateur dans un magasin ou dans des espaces parfumerie... La personne pourrait tenir son téléphone tout en expliquant ses ressentis et son état d'esprit en parcourant les rayons.

Vous êtes présent avec un stand au CES 2023 de Las Vegas : quelles sont vos attentes sur le CES 2023 ?

Si nous nous rendons au CES, c'est pour pouvoir mettre un pied sur le continent américain. Nous sommes allés à New York l'été dernier pendant deux mois, accompagnés par Ad'Occ (l'agence de développement économique de la Région Occitanie, NDLR) et la Maison de la Région Occitanie. Il s'agit pour nous, maintenant, de rencontrer plus d'acteurs du digital, des grands groupes et des directeurs d'innovation sur le terrain. Et échanger avec ces acteurs américains du digital qui sont plus portés sur l'expérience utilisateurs, car ce sont eux qui ont lancé cette démarche dans les années 1980. En France, on a commencé à s'y intéresser depuis une dizaine d'années seulement.

Vous y êtes allés l'année dernière, qu'est-ce qui change cette fois-ci ?

L'année dernière, nous avions plutôt un objectif de recherche de visibilité et d'investisseurs en présentant le concept. Cette année, nous arrivons avec la V1 finalisée afin de pouvoir y trouver des clients et une traction.

Et vous allez y recevoir un prix...

En effet, nous avons reçu un prix de l'innovation, un Innovation award (catégorie Software & Mobile Apps, NDLR), et nous avons aussi une place au showcase de Las-Vegas où nous pouvons montrer notre technologie à côté de LG, Samsung et d'autres grandes boîtes qui font de l'innovation. C'est assez prestigieux !

Quelles sont les prochaines étapes de votre développement ?

D'un point de vue technologique, nous souhaitons développer des tests complètement automatisés. Ce sont des tests que l'on appelle « non modérés » : au lieu d'avoir un intervieweur, les questions sont posées directement au testeur pendant sa navigation. De cette manière, nous pouvons faire des paniers moyens un peu plus grands, car cela prend encore moins de temps aux designers qui ont juste à prendre les réponses pour faire leur travail d'itération. En faisant des tests non-modérés, au lieu de faire par exemple 15 tests par mois, ils pourront en faire 50-60 car ils vont les lancer comme du Google analytics ou du Hotjar sur de plus grandes plages de tests. Pour nous, l'objectif est avant tout de démocratiser l'expérience utilisateur en France... Par ailleurs, nous projetons d'aller à New York afin de participer au programme d'accélération WEVE Accelerator de septembre à décembre 2023, avec un VIE (volontariat international en entreprise, NDLR) post-master pour démarcher les agences et des grands groupes. Ce qui nous aidera à faire du réseau sur la côte Est des Etats-Unis et de la mise en relation avec des investisseurs potentiels en vue d'une prochaine levée de fonds seed ou série A en fin d'année 2024.

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