Mobilités : le covoiturage domicile-travail en bonne voie à Montpellier ?

Dans le baromètre établi par Klaxit et publié le 3 mai, Montpellier est 3e du top 10 des villes en France où on covoiture le plus sur de courtes distances. La métropole montpelliéraine subventionne le dispositif de covoiturage domicile-travail depuis un peu plus d’un an via Klaxit. Comment les entreprises du territoire montpelliérain réagissent-elles aux nouveaux impératifs environnementaux pour aménager ou faciliter le transport de leurs salariés ? La Tribune a interrogé Horiba, Vacanceselect et Orange.
Cécile Chaigneau
Selon un classement établi par Klaxit, 13.758 trajets de covoiturage courte distance ont été enregistré sur le périmètre de la métropole montpelliéraine en mars 2022, soit le 3e meilleur score national.
Selon un classement établi par Klaxit, 13.758 trajets de covoiturage courte distance ont été enregistré sur le périmètre de la métropole montpelliéraine en mars 2022, soit le 3e meilleur score national. (Crédits : Klaxit)

Impératifs environnementaux, hausse des prix des carburants, future ZFE (zone à faibles émissions) qui exclura progressivement certains véhicules trop polluants des villes. 2022 se présente plus que jamais comme l'année d'un virage qui s'amorce en matière de mobilités dans les grandes villes.

A Montpellier, l'exécutif de la Ville et de la Métropole emmené par Michaël Delafosse depuis 2020 a très rapidement mis l'accent sur une politique résolument volontariste favorisant les mobilités dites "durables" : développement des pistes cyclables, gratuité progressive des transports en commun pour les habitants de la Métropole, déploiement en cours d'une 5e ligne de tramway et d'un réseau de bustram, aide à l'achat de vélo à assistance électrique. Tous les curseurs sont poussés au maximum pour sortir l'automobiliste de son véhicule, limiter "l'autosolisme" et désengorger la ville.

Dans sa stratégie Mobilités Horizon 2025, la Métropole a ajouté un autre dispositif, qu'elle subventionne : l'autopartage et le covoiturage, avec l'application Klaxit, spécialisée dans le covoiturage domicile-travail. Car sur les 1,8 million de déplacements chaque jour que compte le territoire (pour une distance moyenne de 4,9 km chacun), 50% d'entre eux s'effectuent en voiture et seulement 1% en covoiturage.

13.758 trajets à Montpellier en mars 2022

Entre mars et décembre 2021, la Métropole de Montpellier a privilégié les grands employeurs du territoire pour créer une première communauté d'usagers de la plateforme Klaxit, avec une rémunération minimale de 2 euros par trajet.

« Nous avons injecté 500.000 euros et l'enveloppe n'a pas encore été toute dépensée », indique Julie Frêche, vice-présidente de Montpellier Méditerranée Métropole, déléguée au Transport et aux Mobilités actives.

Après dix mois d'expérimentation, au 31 décembre 2021, le dispositif Klaxit sur la métropole montpelliéraine comptait 27 grands employeurs et 4.765 salariés inscrits. De 200 trajets en avril 2021 (200 km), le chiffre est monté à 4.000 (90.500 km) au mois de 
décembre 2021, 16.750 covoiturages ont été effectués (pour 371.735 km). Soit 41,7 tonnes de rejets de CO2 évitées en 2021.

Des chiffres qualifiés de « très encourageants » par la collectivité, qui faisait ce premier bilan à la mi-mars 2022. Seulement deux semaines plus tard, Julie Frêche mettait ces chiffres à jour pour La Tribune : « 8.350 inscrits et 2.400 covoitureurs qui sont passé à l'acte, 10.000 trajets et 225.000 km covoiturés en mars 2022, ce qui illustre une réelle montée en puissance ».

Depuis, les chiffres ont continué de progresser... Le 3 mai, Klaxit a publié son classement des 10 villes qui ont covoituré le plus en mars dernier (sur la base des données de l'Observatoire national du covoiturage quotidien recensant tous les trajets effectués en covoiturage courte distance par plus de 20 opérateurs partenaires). Et Montpellier s'y classe en 3e position (hors Paris) avec 13.758 trajets en covoiturage (contre 7.396 en février 2022, soit une augmentation de 86%), derrière Rouen (22.345 trajets) et Angers (14.213 trajets), et devant Nantes (12.002 trajets) et Toulouse (10.804 trajets).

Succès pour le covoiturage subventionné

 « Entre février et mars 2022, le nombre d'inscrits a été multiplié par trois chez Klaxit (au niveau national, NDLR), précise Julien Honnart, président et cofondateur de Klaxit. Avec la hausse du prix des carburants, les automobilistes ont donc cherché des solutions et se sont massivement inscrits sur l'application. Les volumes de trajets en covoiturage ont, eux, augmenté de 60%, soit 3,5 fois moins rapidement. Car les inscrits qui ont finalement franchi le pas et se sont mis à covoiturer sont ceux qui se situent dans des collectivités qui subventionnent les trajets (dont Montpellier donc, NDLR). Même avec un litre de carburant à plus de 2 euros, les automobilistes ne voient pas leur intérêt économique sur le seul partage des frais. Il est nécessaire que le trajet soit subventionné par la collectivité pour qu'ils y trouvent un intérêt économique suffisant, laissent leur voiture au garage et deviennent passagers. »

Comment réagissent les entreprises et leurs salariés sur la métropole de Montpellier ? L'élue en charge des mobilités indique que « 39 conventions ont été passées avec des entreprises, toutes volontaristes et qui veulent améliorer les conditions d'accès au travail de leurs salariés ».

Horiba : 66 inscrits

Chez Horiba, situé sur le parc Euromédecine à Montpellier, Caroline Dars-Denise, DRH en charge des services généraux, des questions sociétales et des sujets mobilités, indique qu'une vingtaine de salariés (sur les 540) prennent les transports en commun et une vingtaine viennent régulièrement à vélo pour une trentaine de façon occasionnelle.

« C'est difficile d'utiliser les transports en commun car le parc Euromédecine est mal desservi, d'autant que nous disposons de beaucoup de parking, ce qui n'incite donc pas à utiliser un autre moyen de transport, souligne-t-elle. Nous avons aménagé une partie des parkings en espaces vélos électrifiés et nous avons signé un accord avec la TAM qui offre 10% de réduction sur un abonnement annuel. Un plan mobilité existe depuis octobre 2021, mais il concerne surtout les gens qui vivent à Montpellier. Pour les autres, la solution alternative, c'est le covoiturage. »

Horiba a donc pris le train du dispositif Klaxit : « Nous avions déjà eu des tentatives d'une quinzaine de salariés qui voulaient créer un réseau de covoiturage. Pour une partie, il manquait l'outil, et l'incitation finale a été l'augmentation des prix des carburants. Aujourd'hui, ils sont 66 inscrits dans le dispositif Klaxit, soit 13% des effectifs, et 44 sont actifs. Et on voit que ça augmente régulièrement. Ça permet d'inciter les collaborateurs à ouvrir le covoiturage à d'autres salariés qui ne travaillent pas loin, comme ceux de Val d'Aurel ou de la Caisse d'Epargne... Le frein principal demeure encore l'autonomie : certains parents, par exemple, qui pourraient faire du covoiturage mais ont des enfants à récupérer. On adapte encore ses modes de déplacement en fonction de ses besoins de vie privée ».

Vacanceselecct : 27.000 km parcourus en covoiturage

Sollicité par La Tribune début avril, Pierre Bonelli, DRH chez Vacanceselect (spécialiste de l'hôtellerie de plein air, 62 campings en France, 1.250 salariés en Europe) se félicite du dispositif Klaxit, qu'il juge « précurseur ».

Le siège de l'entreprise a déménagé de Sète à Montpellier (secteur Garosud) en août 2021. Parmi les 142 salariés du siège qui travaillent sur des horaires de bureaux classiques, 47% résident sur le périmètre de la métropole montpelliéraine, 42% sur le bassin de Thau et 11% dans l'arrière-pays héraultais. Le dispositif Klaxit a rapidement intéressé bon nombre de ces salariés qui vivent en dehors de la Métropole. Et Pierre Bonelli tient les comptes.

« Quand on a déménagé, la majorité des collaborateurs résidant autour du bassin de Thau, souhaitaient conserver l'usage de leur voiture, raconte-t-il. Donc nous avons signé une convention de mobilité avec la Métropole et Hérault Transports. Puis nous avons découvert Klaxit. Aujourd'hui, 56 salariés sont inscrits, et 44 sont des covoitureurs référencés. La majorité sont des salariés qui habitent autour bassin de Thau et la majorité des trajets sont intra-entreprise. Depuis août 2021, 977 trajets de covoiturage ont été réalisés, pour 27.000 km parcourus et 3.000 kg de CO2 économisés. Nous avons même comptabilisé 540 heures de conversation (sourires) ! C'est un vrai succès. Et aujourd'hui, vu le prix de l'essence, c'est aussi un acte de pouvoir d'achat... Nous avons aussi mis en place la prise en charge de 100% de l'abonnement sur le parking du tramway le plus proche mais nous n'avons pas eu beaucoup de demande. Probablement que dans nos recrutements futurs, nous allons attirer une population de jeunes citadins qui pourront venir en tramway. »

Orange : des incitations avantageuses

Le campus montpelliérain de l'opérateur télécom Orange, qui compte 1.250 salariés, se situe à quelques encablures du centre ville, « soit à 10 minutes d'un arrêt de tramway et sur le trajet de deux lignes de bus », précise Philippe Duhot, directeur communication et RSE chez Orange Grand Sud Ouest.

« Nous avons observé une vraie augmentation de l'usage du vélo, souligne-t-il. Le 2e plan mobilité a été signé début 2022, avec l'ambition d'accompagner les salariés vers des déplacements plus propres et plus responsables, les inciter à abandonner la voiture en solo pour covoiturer, utiliser le vélo, le scooter ou la trottinette, ou encore les transport en commun. Nous avons même mis à disposition de chacun une calculette carbone pour mesurer leur empreinte et découvrir les alternatives. Depuis début 2022, chaque salarié dispose d'un forfait de mobilité durable de 400 euros qu'il peut activer comme il veut. Nous visons les 15% de nos salariés qui utilisent tout ou partie ce dispositif d'ici la fin d'année. »

Quid de Klaxit ? Philippe Duhot indique que l'entreprise démarre le covoiturage : « Un salarié va gagner 120 euros par mois s'il est covoituré et nous proposons des mesures complémentaires incitatives : le propriétaire de la voiture en covoiturage peut bénéficier d'une place de parking et aménager ses horaires... L'augmentation du coût de l'essence devrait accélérer ce phénomène. Il y a encore un effet générationnel : on sent un intérêt plus spontané chez les jeunes qui sont habitués à Blablacar ! ».

Cécile Chaigneau

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