Ce que prévoit le plan à 1 milliard d’euros du CHU de Montpellier

Acteur économique majeur du territoire et premier employeur du département de l’Hérault, le CHU de Montpellier présente un ambitieux plan d’investissement d’ici à 2035. Quelque 900 millions d’euros pour moderniser un établissement aux infrastructures vieillissantes, notamment sur la sécurité ou les conditions d’accueil des patients, mais aussi pour regrouper certaines activités dans un nouveau bâtiment de 100.000 m2 au nord de la ville. Le CHU de Montpellier vient de publier son Livre blanc pour expliciter ses projets.
Cécile Chaigneau
Le CHU de Montpellier veut programmer un milliard d'euros d'investissement dans sa modernisation et sa transformation.
Le CHU de Montpellier veut programmer un milliard d'euros d'investissement dans sa modernisation et sa transformation. (Crédits : DR)

C'est un plan de modernisation et de transformation d'envergure que présente la direction du CHU de Montpellier. Une mue qui passera par un vaste plan d'investissement de près d'un milliard d'euros...

Le centre hospitalier de Montpellier est le 7e hôpital de France en termes de ressources humaines, d'activité de soins et de recherche : 2 576 lits, 5 services ou secteurs d'urgences (adultes, enfants, gynécologiques, cardiaques et neurologiques), des plateaux techniques d'imagerie interventionnelle, 5 blocs opératoires (plus de 50 salles réalisant 45.000 interventions par an), mais aussi 12.000 professionnels qui y travaillent, et 362 millions d'euros d'achats par an. Quelque 40 % de ses patients sont issus de la Métropole de Montpellier, 30% sont originaires du reste de l'Hérault et 30% d'autres départements. Il se présente comme le 6e CHU de France en matière de recherche, avec 20 millions d'euros investis en 2018.

L'établissement hospitalier vient de présenter son Livre blanc, un document de synthèse explicitant sa feuille de route 2020-2035, avec des propositions de modernisation et de transformation qui seront intégrées dans le Plan Global Pluriannuel de Financement présenté en juin prochain.

Vétusté, inondations, sécurité

Situé sur un territoire en forte croissance démographique, le CHU se doit d'absorber une demande en santé grandissante. Or son patrimoine immobilier, réparti sur cinq sites au nord de la ville (La Colombière, Saint-Eloi, Gui de Chauliac, Lapeyronie et Arnaud de Villeneuve) est vieillissant, inadapté aux prises en charge modernes et peu évolutif. En 2018, il affichait un taux de vétusté de 64%, ce qui lui valait la 29e place sur 32 de l'ensemble des CHU de France...

Le bilan du Livre blanc fait état de « chocs majeurs qu'il n'était pas possible d'anticiper : l'aggravation des risques d'inondations lors des phénomènes méditerranéens et l'accentuation de la fréquence et de l'intensité des phénomènes caniculaires dans notre région », nécessitant des investissements importants de plusieurs dizaines de millions d'euros pour assurer la pérennité des infrastructures du site et la sécurité des conditions d'accueil des patients.

Sur la question du risque inondation, les hôpitaux Arnaud de Villeneuve et Lapeyronie ont été sécurisés avec la mise en place de batardeaux notamment, mais un projet de mur-digue et un nouveau réseau de collecte des eaux pluviales spécifique au CHU (estimé à 20 millions d'euros) sera financé en partie par la Métropole de Montpellier, qui a déjà reçu une subvention dans le cadre du Plan de relance du Ségur de la Santé.

A ces contraintes, s'ajoute celle de l'impératif d'améliorer la sécurité incendie des quatre hôpitaux principaux du CHU. Un programme, estimé à plus de 50 millions d'euros d'investissements, est en cours de réalisation.

« La Doxa des plans performance »

« Il n'y a pas assez de potentiel pour les projets de restructuration nécessaire, pointe le Pr Patrice Taourel, président de la Commission médicale d'établissement du CHU de Montpellier. Par exemple, certaines activités comme la cardiologie, l'oncologie ou l'infectiologie explosent. Pour cette dernière, nous avons déjà investi dans le bâtiment des maladies infectieuses, récemment inauguré. Mais il faut aussi opérer des regroupements pour être plus fonctionnels en clinique ou en recherche, notamment sur la biologie. La qualité d'accueil des patients est insuffisante : il faut installer la climatisation, des douches individuelles, des chambres à un lit - la pandémie de Covid notamment nous ayant montré que c'était nécessaire - alors qu'aujourd'hui, 25 à 30% des chambres sont des chambres à deux lits. La Doxa des plans performance des hôpitaux, c'était qu'il y avait trop de lits ! Mais en médecine, il est plus difficile de faire de l'ambulatoire, on a beaucoup d'urgences médicales, beaucoup d'urgences psychiatriques... »

Selon Thomas Le Ludec, directeur général du CHU de Montpellier, « le dernier plan de grande ampleur qu'ait connu l'établissement remonte aux années 1970-1980, quand on préparait l'ouverture de Gui de Chauliac et d'Arnaud de Villeneuve ».

Un décalage de modernisation

Le CHU de Montpellier, pour les activités médecine-chirurgie-obstétrique, n'avait pas été inscrit dans les plans Hôpital 2007 et Hôpital 2012, et ce pour diverses raisons (patrimoine relativement modernisé, pas de schéma directeur immobilier, priorisation des centres hospitaliers généraux). La direction de l'établissement montpelliérain estime que le décalage avec les différentes opérations de modernisations du patrimoine des cliniques privées s'est accentué dans la 1ère décennie des années 2000.

« Ce Livre blanc, c'est la feuille de route du CHU pour les quinze prochaines années, soit 900 millions d'euros entre 2020 et 2035, avec dans un premier temps une phase de modernisation jusqu'en 2030 et ensuite une construction majeure, celle du "Grand Lapeyronie" », précise Thomas Le Ludec.

Dans la première phase, 157 millions d'euros seraient affectés aux projets « humanisation et modernisation », concernant plus de 1.100 lits (soit plus de 70 % du capacitaire du CHU en court séjour), 101 millions d'euros sur la sécurisation, et 156 millions aux projets « innovations médicales et soignantes » (extension de bâtiments, développement de nouvelles thérapies, modernisation du pôle formation, mais aussi construction d'un bâtiment de 21.000 m2 pour regrouper 18 laboratoires de biologie médicale actuellement dispersés).

La phase deux, ambitieuse, visera notamment à construire, à horizon 2035, un bâtiment neuf, le "Nouveau Lapeyronie" permettant de regrouper les activités des pôles Neurosciences, Femme Mère Enfant et Urgences au sein d'un bâtiment de sept étages et de plus de 100.000 m2.

Solliciter 355 millions d'euros d'aides

Sur le plan financier, les dispositifs qui soutiendront un tel plan d'investissement restent à affiner...

« Au global, le besoin d'accompagnement du CHU de Montpellier pour la réalisation de son schéma directeur immobilier est évalué, à ce stade, à 355 millions d'euros (205 millions d'euros d'aides seront sollicités sur la décennie 2020-2030 et 150 millions d'euros pour la construction du Nouveau Lapeyronie, NDLR), hors reprise de la dette* », informe le Livre blanc.

Laquelle dette s'élève à 236,5 millions d'euros au 31 décembre 2020, le total estimé des produits étant d'environ 980 millions d'euros.

« C'est une dette bien maîtrisée, affirme Thomas Le Ludec. Ce plan d'investissement pourra être financé en autofinancement du CHU, par le recours à l'emprunt, mais aussi bien sûr par des aides publiques, notamment via le Ségur de la Santé destiné à aider les établissements hospitaliers à se moderniser. Or on fait partie des établissements où il y a des besoins importants. Nous aurons d'autres discussions avec l'ARS sur notre schéma directeur, projet par projet. Mais nous souhaitons bénéficier du maximum d'aides pour deux raisons : l'ampleur de nos besoins et le fait qu'il s'agit d'un rattrapage de modernisation qui ne permettra pas un gain d'activité mais un retour qualitatif. »

* Le CHU souhaite s'inscrire dans le dispositif national de reprise de la dette des établissements hospitaliers. L'aide théorique, sur la base d'une dette de 237 millions d'euros et du taux moyen de reprise de 30%, serait de 71 millions d'euros.

Cécile Chaigneau

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