Essenciagua : du Made in France au développement de filière « plantes et santé » en Lozère

L’entreprise lozérienne Essenciagua est, depuis le 9 novembre et jusqu’au 12, à Paris, sur le salon MIF Expo Paris, le salon du Made in France. Elle y vante un modèle économique fondé sur un approvisionnement en plantes régionales, mais veut aller encore plus loin : embarquer les acteurs du monde agricole et du monde médico-social pour bâtir une filière allant de la culture de la plante au produit de santé. Une démarche que le fondateur d’Essenciagua a baptisée « Plantes et Santé ».
Cécile Chaigneau
En Lozère, Essenciagua distille quelques dizaines de tonnes de plantes, issues de la région, pour produire des huiles essentielles et des hydrolats aromatiques.
En Lozère, Essenciagua distille quelques dizaines de tonnes de plantes, issues de la région, pour produire des huiles essentielles et des hydrolats aromatiques. (Crédits : Essenciagua)

La campagne de distillation, qui commence en mai et voit passer quelques dizaines de tonnes de plantes pour produire des huiles essentielles et des hydrolats aromatiques, vient de se terminer. Alors Laurent Gautun, le fondateur et dirigeant d'Essenciagua, a rangé ses fioles dans des valises et quitté la Tieule, en Lozère, pour le MIF Expo Paris, salon du Made in France qui se déroule du 9 au 12 novembre à Paris. En juillet 2021, c'est son entreprise qui avait représenté la Lozère à l'Elysée, pour l'exposition du "Fabriqué en France"...

Essenciagua revendique non seulement une origine artisanale, biologique et française de ses produits, mais aussi un approvisionnement en plantes régionales, opéré en Lozère et dans les départements limitrophes (Aveyron, Ardèche, Haute-Loire et Hérault). Soit une cinquantaine de plantes à son catalogue pour 200 produits, distribués  dans le réseau des pharmacies, quelques magasins bio ou en direct sur les salons et sur le site internet de l'entreprise.

« C'était d'ailleurs la raison de notre installation en Lozère, au centre d'un réservoir naturel de matières premières : des plantes méditerranéennes, auvergnates, montagnardes, souligne Laurent Gautun. On reçoit les plantes et on les distille. Avoir  cette diversité de 50 plantes est unique  et nous voulons intensifier ce modèle, continuer à monter en gamme sur cette logique de plantes françaises... Notre objectif de développement est de multiplier par trois notre activité, malgré un contexte hyperconcurrentiel. Nous réalisons aujourd'hui un chiffre d'affaires de 900.000 euros (en légère baisse, NDLR), dont 10 à 15% à l'export. Or le Made in France s'exprime bien en France mais encore mieux encore dans des zones géographiques qui rêvent de France comme l'Asie. D'ailleurs, notre premier client est au Japon. Notre territoire a un réel potentiel d'attractivité car de plus en plus de gens qui vivent en zone hyper urbanisées et ont envie de territoires ruraux. Nous réfléchissons à développer des séjours avec une clientèle touristique sur la thématique santé, bien-être. »

Développement et biodiversité

Mais développer son activité dans la logique d'ancrage territorial, c'est aussi embarquer le territoire dans cette dynamique. Sans oublier de concilier le recours aux plantes locales pour soutenir les activités santé et la préservation de la biodiversité. D'où la démarche que Laurent Gautun a baptisée « Plantes et Santé ».

Il est la locomotive de cette démarche qui a vocation à créer une filière réunissant le monde agricole, le secteur médico-social et le monde de la santé : « La Lozère se distingue notamment par deux caractéristiques : un potentiel agricole évident et un secteur médico-social singulièrement développé autour du handicap. Quand on a l'amont et l'aval, ça constitue une filière sur le papier, nous avons potentiellement tous les maillons de la chaîne ! D'où la création de l'association "Plantes et santé en Lozère". »

Laurent Gautun prend pour premier exemple celui de l'arnica. Cette plante des montagnes est particulièrement touchée par le changement climatique et voit ses biotopes sauvages se restreindre. L'Arnica des montagnes, qui ne se distille pas mais qui entre dans la composition de nombreux produits de phytothérapie, est très prisée par l'industrie pour ses propriétés reconnues anti-inflammatoires, analgésiques et circulatoires, et « la pression liée à la cueillette est loin d'être négligeable », insiste le fondateur d'Essenciagua.

« Face à ces enjeux, des initiatives sont aussi à prendre comme de privilégier, dans le cas précis de cette plante, la mise en culture, explique Laurent Gautun. Les plants sont développés par l'Association Le Clos du Nid (située à Marvejols et qui accompagne des personnes en situation de handicap mental ou physique, et qui est gestionnaire d'une entreprise adaptée - NDLR), ils sont ensuite mis en culture par l'agricultrice Pauline Robert, et Essenciagua sécurise le débouché. La vision que nous essayons de pousser, c'est un modèle agricole de polyculture-élevage, d'autant qu'un agriculteur sur cinq est en bio. Et aujourd'hui, compte tenu des problématiques sur la ressource en eau, vaut mieux aider l'arnica que le lavandin. »

Aromathérapie

La démarche, collective, va prendre du temps. Aujourd'hui, Laurent Gautun annonce « une vingtaine d'adhérents qui travaillent sur une dizaine de plantes en Lozère, avec notamment trois agriculteurs-entrepreneurs qu'on accompagne pour faire émerger leur projet ». Et l'entrepreneur mise sur un autre facteur : « Les modèles agricoles vont évoluer : les plantes méditerranéennes vont probablement monter sur les plateaux à 800 mètres ! ».

En attendant, Essenciagua continue de miser sur ses atouts d'activité santé et bien-être en plein cœur d'une zone rurale. Laurent Gautun fomente toujours le projet d'un pôle aromathérapie pour encore mieux valoriser son écosite. Un pôle où accueillir des activités de formation de professionnels, partenaires ou praticiens, mais aussi des touristes désireux d'en savoir plus sur l'art de l'aromathérapie.

« Le projet reste dans les cartons, notamment pour développer la vente directe à domicile : aujourd'hui, nous faisons déjà du visitorat, de la formation expériencielle à la santé naturelle trois fois par an sur notre site, avec des pharmaciens, des médecins, des kinésithérapeutes ou des osthéopathes. Mais cela reste limité et nous voulons monter en puissance avec un vrai centre. Ce qui supposera d'investir sur le site. »

Cécile Chaigneau

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