Viticulture : « C’est le changement climatique qui risque de réguler le marché » (Christophe Bousquet, CIVL)

Président du Conseil Interprofessionnel des Vins du Languedoc (CIVL) depuis juin 2021, Christophe Bousquet fait un point à mi-mandat sur la situation de la filière et les projets en cours. Il tente notamment de répondre à une certaine grogne de certaines appellations, booste ses moyens sur la R&D pour répondre au réchauffement climatique et aux défis environnementaux, et cherche une issue à la période de mévente des vins que traverse la filière viticole.
Christophe Bousquet, vigneron audois et président du Conseil Interprofessionnel des Vins du Languedoc (CIVL) depuis juin 2021.
Christophe Bousquet, vigneron audois et président du Conseil Interprofessionnel des Vins du Languedoc (CIVL) depuis juin 2021. (Crédits : DR)

Porté à la présidence du Conseil Interprofessionnel des Vins du Languedoc (CIVL) en juin 2021, Christophe Bousquet, vigneron audois, a déjà engagé plusieurs nouvelles orientations au sein de l'interprofession. Pour répondre aux reproches émis par certaines appellations qui dénoncent leur manque de visibilité dans la communication du CIVL, le nouveau président a voulu remettre en avant les identités propres de chaque appellation, mais toujours sous la bannière Vins du Languedoc.

« Les campagnes d'affichage, par exemple, peuvent désormais se décliner sous l'identité d'une appellation - Corbières, Limoux, Fitou, Cabardès,... - mais toujours dans le cadre général des Vins du Languedoc, détaille-t-il. Idem sur le salon Wine Paris, où chaque appellation était clairement identifiée au sein de l'espace Vins du Languedoc. »

Autre nouveauté : les appellations qui le souhaitent peuvent augmenter la cotisation volontaire obligatoire (CVO) versée au CIVL et récupérer 70% du montant de cette augmentation pour leur budget, les 30% restant revenant au CIVL. Jusqu'ici, les appellations ne percevaient que 17% de la CVO, le reste alimentant le budget général du CIVL.

Ces évolutions visent à calmer la grogne de trois appellations (Corbières, Fitou et Faugères) qui ont annoncé leur intention de quitter le CIVL en fin d'année. La sortie de l'interprofession de ces trois appellations amputerait le budget du CIVL de 1,2 million d'euros...

« Ni le CIVL ni ces appellations n'ont intérêt à cette séparation », plaide Christophe Bousquet, qui a multiplié les rencontres avec les contestataires et tenté, par ces changements, de répondre à leurs réclamations.

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Les enjeux techniques sont stratégiques

Autre orientation impulsée par le nouveau président : le renforcement du volet R&D de l'interprofession avec la création du poste de direction R&D, confié à Marie Corbel, précédemment directrice de l'appellation Faugères.

« Avec le réchauffement climatique et les défis environnementaux, les enjeux techniques sont tout aussi stratégiques que la communication ou l'économie, défend Christophe Bousquet. Nous renforçons ce volet technique afin que notre commission R&D devienne une vraie interface entre la communauté scientifique et les ODG (organisme de défense et de gestion, NDLR), vignerons et négociants, pour les projets de recherche considérés comme stratégiques pour notre vignoble. »

Et les sujets ne manquent pas : adaptation au réchauffement climatique, évaluation du bilan carbone des exploitations, biodiversité... Dans un premier temps, la priorité a été donnée aux cépages Bousquet (variétés résistantes au mildiou et à l'oïdium ), réclamés depuis plusieurs années par la filière viticole régionale. Un accord a été signé le mois dernier avec l'INRAE pour un déploiement, à partir de 2025, de neuf de ces variétés dans le vignoble régional.

Une feuille de route précisant les prochains sujets prioritaires sera présentée lors de l'AG du CIVL en juin prochain.

Viser la montée en gamme

Le vigneron audois a pris les commandes de l'interprofession alors que la filière viticole fait face à une mévente de ses vins. A fin janvier, sur douze mois glissants, les sorties de chai des AOP rouges sont en recul de 10%, celles des IGP de département et de territoire de 8%. Les rosés, qui avaient permis pendant un moment de pallier la déconsommation des rouges, accusent également le coup, avec un recul de 5 à 6% sur cette même période.

Une distillation de crise, financée par des fonds nationaux et européens, a récemment été annoncée par le gouvernement, afin d'assainir le marché.

« La distillation va sans doute alléger nos stocks, ramener de la trésorerie mais ne résoudra pas le problème, et avec la sécheresse qui s'annonce pour cet été, ne serait-il pas plus judicieux d'avoir un peu de stock ? », s'interroge Christophe Bousquet.

Il tempère toutefois la mévente des vins rouges : « Les chiffres ne sont pas catastrophiques. Nous avons un an et demi de stock en rouge, ce qui n'a rien d'alarmant. Nous perdons des volumes, c'est certain. Mais des AOP comme Terrasses du Larzac, Pic Saint Loup La Clape continuent à bien se vendre. Ce sont les entrées et milieux de gamme qui sont en difficulté. On ne s'en sortira que par la montée en gamme de nos vins. De toute façon, il est à craindre que ce soit le changement climatique qui régule le marché et se charge, à terme, d'ajuster notre production à nos capacités de vente ».

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