Législatives anticipées : inquiétude chez les acteurs économiques occitans

La campagne des législatives anticipées est courte, mais suffisamment longue pour laisser monter l’inquiétude chez les dirigeants économiques de l’Occitanie comme d’ailleurs. Tour de table.
Cécile Chaigneau
Jalil Benabillah, Julien Feja, Julien Hostache, Matthieu Brunet, Matthieu Ourliac et Samuel Hervé.
Jalil Benabillah, Julien Feja, Julien Hostache, Matthieu Brunet, Matthieu Ourliac et Samuel Hervé. (Crédits : DR)

« Ni mépriser, ni exclure »

Jalil Benabdillah, vice-président de la Région Occitanie, en charge du développement économique, président de l'entreprise alésienne SDTech : « Je suis personnellement triste de voir où en est mon pays d'adoption et de cœur... Il faut être lucide, ne pas recommencer les mêmes erreurs, or la classe politique ne prend pas en compte les avertissements envoyés. Je fais une différence entre le RN, non fréquentable et abject, et les électeurs du RN qui ont un message à passer et qu'il ne faut ni mépriser, ni exclure. Il faut les écouter sans renier nos fondamentaux et les valeurs de la République, et leur redonner un espoir. Les calculs politiciens, les petits arrangements de clan donnent une image exécrable de la politique que les gens ne veulent plus... L'avènement du RN au pouvoir, c'est la perte de nos valeurs, le verrouillage de tout ce qui fait société, et en termes d'économie, c'est la crainte du retour d'un chômage endémique, la remise en cause de la réindustrialisation et de l'attractivité de la France. Je combattrai pour démontrer que d'autres voies sont possibles vers une politique pour servir et non pour se servir ».

« Stabilité, prévisibilité »

Samuel Hervé, président du Medef Occitanie, dirigeant-fondateur du Groupe AKTE (restauration collective) dans l'Hérault : « En tant que chef d'entreprise mais aussi que citoyen, le sentiment qui prédomine, c'est l'inquiétude et la perte de confiance dans nos institutions, car les partis des extrêmes ne sont pas forcément propices à la stabilité. Or la prévisibilité est essentielle pour les chefs d'entreprises. On observe déjà une augmentation des défaillances des TPE-PME, j'ai peur que ça s'accélère... Le contexte socio-politique et le contexte géopolitique international - dans des pays populistes ou de quasi dictatures qui s'amusent des faiblesses de l'Europe - ne sont pas rassurants. Or une Europe forte est le salut ! Quelle crédibilité va avoir la France ? Car on aura une crise financière, une crise sociale avec du monde dans la rue, et une crise de confiance ! On peut entendre des mesures non favorables aux entreprises si c'est pour rendre le marché du travail plus efficace ou avoir des capacités d'investissement plus importantes. Mais il faut rester dans un arc républicain social-démocrate ».

« Le pays est vraiment malade »

Matthieu Ourliac, président du Medef Ouest Hérault, P-dg du groupe Caminarem (RH, intérim, recrutements) à Béziers : « On est dans un contexte peu stable pour les entreprises sur un plan législatif, fiscal et économique, c'est tout ce que les chefs d'entreprise détestent ! Les programmes du RN et du Nouveau Front Populaire sont plutôt orientés contre la croissance des entreprises, et me semblent peu crédibles. Pourtant, on trouve au NPF un ancien président de la République (François Hollande, NDLR) qui a fait une politique de l'offre et qui connaît les contraintes du monde économique ! Cela veut dire que le pays est vraiment malade. On a une majorité présidentielle imparfaite mais c'est la moins pire... Dans mon secteur d'activité, la crise du logement joue sur l'emploi. Au vu des programmes, le zéro artificialisation nette et la RT2020 pourrait être renforcés et les taux d'intérêt devraient augmenter. Je ne vois pas comment sortir de cette impasse. Une majorité relative serait peut-être le moins pire des scénarios et donnerait le temps aux Français de réfléchir... ».

« La dynamique nucléaire altérée »

Julien Feja, président de D&S Groupe (spécialisé dans la maîtrise du risque en milieu nucléaire) à Bagnols-sur-Cèze : « Les budget qui servaient à financer les futurs EPR2 ne sont pas encore inscrits dans les lois de finances, ça devait arriver cet été, et ils sont désormais suspendus à nouvelle assemblée et au nouveau gouvernement... La dynamique nucléaire pourrait être altérée. Les entrepreneurs redoutent le côté ingouvernable pendant trois ans, or l'immobilisme n'est jamais bon pour les affaires, pour les démarches d'investissement. Ils craignent également que, selon qui sera à la tête du gouvernement, l'attractivité économique de la France pâtisse de la politique qui sera menée ».

« Incompétent dans le secteur énergétique »

Julien Hostache, cofondateur et président d'Enerfip (financement participatif des énergies renouvelables) à Montpellier : « On se mobilise plus que jamais, on tire la sonnette d'alarme. Le RN aux manettes aura des implications directes pour nos emplois car le parti est anti-énergies renouvelables et incompétent dans le secteur énergétique. Ils vont détricoter ce qui a été construit depuis le début des années 2000... C'est assez dingue d'en être là : alors que les enjeux climatiques sont plus forts que jamais, on est à deux doigts de faire un bon en arrière de trente ans ! Enerfip a la chance de travailler dans d'autres pays européens, donc on s'en sortira mais c'est très inquiétant pour la France ».

« Certaines valeurs que toutes les listes ne portent pas »

Matthieu Brunet, président d'Arcadie (spécialisée dans la production et le négoce d'épices, d'aromates et de plantes bios) à Mejeannes-les-Alès : « Je n'anticipe pas particulièrement d'impact pour le moment, quel que soit le résultat des élections. Tous nos investissements sont déjà actés et financés. Nous sommes sur un marché de niche et nous dépendons de consommateurs qui ne changeront pas d'avis du jour au lendemain. Ce qui peut arriver, c'est un mouvement de déprime qui ferait que les gens consomment moins, mais nous sommes habitués à ce genre de crise. En revanche, l'entreprise est porteuse de certaines valeurs que toutes les listes ne portent pas. Et là, c'est inquiétant... ».

Cécile Chaigneau

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Commentaire 1
à écrit le 22/06/2024 à 9:05
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Hé les gars le dumping social et le dumping fiscal font rage en UE, plombant particulièrement votre business, et vous vous inquiétez de quoi en fait ? Qu'il ne continue pas ? Peur qu'il soit insuffisant ? Avec la Moldavie et L'Ukraine qui rentrent en...

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